12 juillet 2023
rue centre ville avec bus et tramway
La journée du 2 mai 2023 a permis de rassembler une cinquantaine de participant autour de la thématique de la qualité de l’air extérieur. Organisée par le Cerema, avec l’appui de l’Agence Régionale de Santé Normandie, d’Atmo Normandie, de la Région Normandie et de la La Direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) de Normandie, elle avait pour but de sensibiliser et de présenter les clés de compréhension et d’action en faveur de la qualité de l’air extérieur aux collectivités et acteurs de la qualité de l’air en Normandie.

Organisée par le Cerema, avec l’appui de l’Agence Régionale de Santé Normandie, d’Atmo Normandie, de la Région Normandie et de la La Direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) de Normandie, elle avait pour but de sensibiliser et de présenter les clés de compréhension et d’action en faveur de la qualité de l’air extérieur aux collectivités et acteurs de la qualité de l’air en Normandie. Elle s’est articulée en deux temps : un premier temps de présentation et un second temps d’échanges et de partages d’expérience.

Premier temps : séance plénière de partage

L’introduction de la journée a été donnée par Denis MERVILLE, Président d’Atmo Normandie, et Président de l’Association des Maires de Seine Maritime. Cela a été l’occasion de mettre l’accent sur l’importance de cette thématique en Normandie, et sur l’intérêt qu’elle présente pour les citoyens, notamment en termes de santé publique. 

 

Séance plénière
 © Cerema

Focus sur l’état des lieux de la qualité de l’air en Normandie

La première présentation a été réalisée par Nicolas LEPELLEY, Directeur adjoint d’Atmo Normandie. Il a notamment pu présenter l’état des lieux de la qualité de l’air en Normandie, et, introduire cette thématique et des notions techniques nécessaires à la compréhension des participants pour le reste de la journée. Après une présentation du cycle de l’air, la différence entre émissions et concentrations (qui dépendent notamment de la météo) a été abordée. L’orateur a décrit l’inventaire des émissions, qui permet de cibler la contribution des différents secteurs d’activité selon chaque polluant. Par exemple, le secteur des transports est responsable de la majorité des émissions d’oxydes d’azote (50%), tandis que le secteur résidentiel – tertiaire est le principal émetteur de PM2.5 (38%). 

Enfin, Atmo Normandie a pu mettre en avant ses rôle et missions sur le territoire : observateur de la qualité de l’air, informateur et sensibilisateur, accompagnateur des acteurs et des décideurs du territoire, tout en participant à l’amélioration des connaissances

Une information en temps réel de la qualité de l’air en Normande est consultable sur le site internet Atmo Normandie.

Qualité de l'air : enjeux sanitaires

L'Agence Régionale Santé (ARS) Normandie et Santé Publique France ont pris la main afin de présenter conjointement les enjeux sanitaires liés à la pollution de l’airMorgane Faure, coordinatrice de l’unité fonctionnelle Environnement Extérieur à l’Agence Régionale de Santé Normandie, a commencé par développer les risques et les impacts sanitaires de la pollution de l’air ambiant qui constitue un enjeu majeur de santé publique.

En effet, chaque année, les experts estiment à plus de 40 000 le nombre de personnes qui décèdent prématurément en France en raison d’une exposition chronique à une qualité de l’air dégradée.

Pourquoi ? Car les polluants pénètrent dans l’organisme, principalement au travers des voies respiratoires, puis se diffusent à l’ensemble du corps (organes, circulation sanguine, …) et libèrent des molécules toxiques. Les impacts nocifs dépendent de chaque polluant, de facteurs individuels, et de la durée d’exposition. Il est ici important de distinguer une exposition chronique d’une exposition aïgue. C’est cette première qui contribue le plus au développement de maladies graves et représente le plus de risque (bien que moins facilement détectable). 

Les effets nocifs démontrés sont alors nombreux : pathologies respiratoires, cardio-vasculaires, naissances prématurées, naissances en sous-poids …

Enfin, concernant les mécanismes et les effets liés aux pollens, ils engendrent une perte de qualité de vie chez les personnes sensibles (20% de la population française) et des coûts de santé publique conséquents.

On retiendra qu’il n’existe pas de seuils de pollution en dessous desquels il n’existe pas d’effets néfastes pour la santé, si bien que même une légère amélioration implique des effets bénéfiques sur celle-ci.

Myriam Blanchard, chargée de projet en épidémiologie à Santé publique France, a pris la suite pour aborder les questions d’évaluation des impacts de la pollution de l’air sur la santé.

A la suite de progrès scientifiques notables au cours du 20ème siècle, particulièrement en matière d’épidémiologie, le monde prend conscience de la nocivité de la pollution atmosphérique, de la multiplicité des sources, et de la nécessité de la surveiller et d’objectiver son impact sanitaire.

Dans ce contexte, en 1997, est créé en France le Programme de Surveillance Air et Santé (PSAS). Il vise à appuyer les politiques publiques locales, nationales et européennes de gestion de la qualité de l’air dans le but de protéger la santé des populations. Par exemple, il réalise ou aide à la réalisation d’Evaluation Quantitative d’Impacts Sanitaire (EQIS).

Ces dernières permettent de quantifier le fardeau de la pollution porté par une population donnée, et d’évaluer les impacts ou bénéfices sur la santé attendus de différents scénarios visant à réduire les niveaux de pollution. Les EQIS reposent sur des études épidémiologiques, toxicologiques et expérimentales permettant de mettre en avant un lien de causalité entre l’exposition à un polluant et un risque pour la santé. Bien que soumises à plusieurs limites, ces études ont le mérite d’objectiver les impacts de politiques publiques et de sensibiliser la population. D’autres outils d’évaluation comme les Evaluations d’Impact Sanitaire (EIS) existent.

Pour finir, l’ARS Normandie a évoqué les effets indirects sur la santé d’actions en faveur de la qualité de l’air extérieur.

Compte tenu de la diversité des sources de pollution, ces actions peuvent porter, par exemple, sur les infrastructures de transport, les logements, la végétalisation, et l’aménagement au sens large. Elles sont alors porteuses de co-bénéfices (cohésion sociale, activité physique, alimentation, bruit, chaleur, …). L’importance cruciale de l’intégration des enjeux sanitaires dans les politiques publiques est ainsi démontrée. 

La présentation :

Qualité de l'air : les contours réglementaires à l'échelle française

La 3ème présentation, assurée par Cyrille GACHIGNAT de la DREAL Normandie, a permis de délimiter les contours réglementaires entourant la qualité de l’air extérieur à l’échelle Française.

Dès 1996, la loi « LAURE » n°96-1236 reconnaît à chacun « le droit de respirer un air qui ne nuise pas à sa santé », et le Code de l’Environnement prévoit une surveillance de la qualité de l’air sur l’ensemble du territoire. Par ailleurs, les normes françaises en matière de seuils de pollution découlent des directives européennes. Réglementairement, c’est la directive européenne 2008/EC/50 qui régit la qualité de l’air ambiant et qui impose, par exemple, le respect de seuils limites en moyenne annuelle, pour certains polluants.

 

Qualité de l'air extérieur : le rôle du Cerema

Pour le Cerema, Lucas Montbuleau-Gentelet, chargé d’études trafic, déplacements et qualité de l’air, a élargi ce cadre à l’échelle Européenne et au contexte mondial, avant de développer son rôle et ses offres de service dans le domaine de qualité de l’air extérieur.

Le rôle du Cerema
 © Cerema

A l’échelle mondiale, la pollution atmosphérique constitue l’un des plus grands risques environnementaux pour la santé, si bien que 99% de la population mondiale vit dans des endroits où les seuils préconisés par l’OMS ne sont pas respectés. Cette exposition entraîne annuellement 4,2 millions de décès prématurés. De plus, ce fardeau sanitaire n’est pas porté équitablement par l’ensemble de la population : 89% de ces décès surviennent dans des pays à revenus faibles ou intermédiaires.

Fort de ces constats, c’est l’Organisation Mondiale pour la Santé (OMS), en sa qualité d’autorité coordinatrice en matière de santé internationale, qui publie des lignes directrices (avec des normes recommandées). Mises à jour en 2021, ces normes ont fortement été revues à la baisse, pour tenir compte des enseignements scientifiques des deux dernières décennies.

A l’échelle Européenne, le constat est le suivant : annuellement, 300 000 décès prématurés sont imputables à la pollution de l’air. En octobre 2022, une proposition de révision de la directive 2008/EC/50 a été publiée, avec une entrée en vigueur probable en 2027, dans une optique d’alignement progressif avec les nouvelles recommandations OMS. Elle impose notamment de respecter des valeurs limites à l’horizon 2030, néanmoins, avec toujours une certaine asymétrie avec les normes OMS de 2021, basées sur des constats scientifiques récents.

Le Cerema a détaillé ensuite le rôle qu’il joue dans la qualité de l’air extérieur.

En tant qu’expert sur les problématiques d’environnement, d’infrastructure, de climat et d’énergie, le Cerema a l’habitude d’accompagner les collectivités sur des questions en lien avec la thématique de la journée. Historiquement en lien avec les infrastructures routières, il a récemment élargi son champ d’action aux enjeux de pollution liés au transport maritime et fluvial, tout en développant le lien avec l’aménagement et l’urbanisme. Ces actions comprennent des actions opérationnelles, méthodologies, de conseil, la rédaction de guides, de formations, …

Son rôle dans ce domaine est maintenant d’autant plus fort qu’il a bénéficié d’une enveloppe financière dans le cadre du versement d’une astreinte de 10M€ par l’Etat (suite à sa condamnation pour non-respect de ses engagements en matière de lutte contre la pollution de l’air). Il a ainsi pu initier un "Programme Air", permettant de mettre en œuvre un programme d’actions en faveur de la qualité de l’air.

La présentation :

Enjeux et accompagnement de la Région Normandie

La dernière intervention a été présentée par la Région Normandie, représentée par Delphine Baudry, chargée de projets Territoires et Climat, et Emilie Nourrisson, chargée de projets déchets et qualité de l’air.

Elle a abordé la qualité de l’air extérieur dans les schémas régionaux et les outils proposés pour faciliter la mise en œuvre des objectifs à cette échelle.

Le Schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (SRADDET) fixe pour objectifs de diminuer l’exposition aux polluants atmosphériques pour améliorer la qualité de vie et la santé des normands, et d’améliorer la qualité de l’air régionale, en mobilisant tous les secteurs d’activité (objectifs 36 et 71).

Par ailleurs, la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles du 27 janvier 2014 confie aux Régions le rôle de chef de file en matière de qualité de l’air. Dans ce contexte, la Région Normandie se veut jouer un rôle de coordination et d’accompagnement des collectivités sur la qualité de l’air.

 

Quels sont les outils pour faciliter la mise en œuvre de ses objectifs ?

Le Plan Climat Air Energie Territorial (PCAET) a notamment pour objectif l’amélioration de la qualité de l’air. Il se décline en diagnostic, complété par une stratégie territoriale, permettant la formulation d’un plan d’actions concrètes. Néanmoins, comme le PCAET doit s’articuler avec les objectifs du SRADDET, la Région Normandie propose aux collectivités l’outil ORECAN : présentation des dispositifs d’aide pouvant accompagner les actions, et grille d’auto-évaluation des PCAET.

Enfin, la Région Normandie met également à disposition des dispositifs d’aide à la mobilité décarbonnée :

Second temps : table d’échanges au travers de retours d’expérience

L’après-midi a été consacrée à une table d’échanges animée par Lucas MONTBULEAU—GENTELET et Michaël SAVARY du Cerema. Les thèmes envisagés portaient sur la qualité de l’air, la santé, et la mise en œuvre concrète de projets de territoire en leur faveur. Son objectif était d’illustrer les enjeux et les clés de mise en œuvre au travers de retours d’expériences.  Elle a ainsi mobilisé :

  • Hélène Burgat, 2ème vice-présidente de Caen la mer en charge de la Transition écologique, sur un projet d’EQIS mené sur son territoire ;
  • Stéphane Wolf du Ter’Bessin sur le PCAET implémenté sur son territoire ;
  • Éric Duval et Léo Kazmierzcak de la Métropole Rouen Normandie pour partager leur expérience respectivement sur la ZFE-m et une EQIS-PA ;
  • Nicolas Lepelley pour apporter une vision transversale et l’expertise d’Atmo Normandie ;
  • Et Erwan Vatan, du Cerema, pour le projet SESAME

De ces échanges est ressortie l’importance de la communication et de la pédagogie pour faire adhérer les citoyens à ces différents projets, c’est-à-dire favoriser l’acceptabilité sociale. Ces derniers ont besoin d’objectifs concrets et de perspectives positives derrière des projets ; d’autant plus s’ils sont synonymes de changement de comportement et de contraintes.

Vulgariser puis communiquer sur les concepts et résultats s’avère alors tout autant crucial que délicat.

 

Quelle communication choisir pour présenter les divers indicateurs ? Quel vocabulaire choisir ? Quelles images utiliser ? Simplifiées mais parlantes ? Détaillés mais plus difficile à s’approprier ? Voilà autant de questions peu évidentes que doivent se poser les collectivités.

Sur le fond, il apparaît important de mettre en avant les bénéfices en termes de santé publique, qui concernent tout le monde, qu’ils soient directs (diminution de l’exposition de la population aux polluants par exemple), ou indirects (amélioration du cadre de vie, davantage d’activité physique, moins de bruits …) et très souvent afférents à de telles actions en faveur de la qualité de l’air.

Il est également important de ne pas opérer de rupture sociale dans les changements à opérer. De ce fait une attention particulière (accompagnement, aides, …) doit être portée aux publics vulnérables (foyers modestes, public sensible …). L’idée est de faire passer le message que des projets ambitieux en matière de santé publique et d’amélioration de la qualité de l’air peuvent engendrer des changements de comportements, mais qu’ils ne sont pas insurmontables au regard des bénéfices attendus …

Enfin, la santé publique est une démarche intégrée dans toutes les politiques publiques car l’aménagement du territoire favorise des comportements individuels et collectifs ayant une répercussion sur la santé. En revanche, l’enjeu est de fournir aux collectivités les outils nécessaires pour objectiver, et quantifier si possible les impacts et les bénéfices de ces mesures sur la santé. Ce qui a le potentiel d’amener une réelle plus-value pour sensibiliser le public. Pour cela, des outils existent tandis que d’autres commencent juste à émerger. Ce sont donc d’importants axes de travail à prendre en compte pour les acteurs de la santé et de la qualité de l’air. 

Table d'échanges
© Cerema

Cette communauté de spécialistes, d’élus et de techniciens initiés ou novices a pu échanger à la suite des présentations, et au travers de retours d’expériences :

  • Sur l’état des lieux de la qualité de l’air extérieur en Normandie ;
  • Sur les implications que peut avoir la qualité de l’air sur la santé ;
  • Sur le cadre réglementaire à l’échelle Française et Européenne, et sur le contexte mondial ;
  • Sur les aides et les offres de services proposées par différents acteurs en lien avec la prise en compte de la qualité de l’air sur les territoires ;
  • Sur les ZFE-m ;
  • Sur le PCAET, en particulier sa composante qualité de l’air ;
  • Sur les EQIS-PA : Etude Quantitative d’Impact Sanitaire – Pollution Atmosphérique.

Le mot de conclusion a été apporté par François Galland, Directeur du Département Mobilité, Sécurité et Ouvrages d’Arts au Cerema Normandie-Centre. Il a essentiellement exprimé l’ambition du Cerema de perpétuer, par différents moyens, ce type de temps d’échanges autour de cette thématique, aussi large qu’importante.