17 septembre 2021
Abeille en train de butiner une fleur
Olivier Brosseau - TERRA
Le Cerema publie un guide pour les gestionnaires de dépendances vertes d'infrastructures. L'objectif: donner les clés d'une gestion différenciée pour faire des bords de route des refuges adaptés au cycle de vie des pollinisateurs. A l'occasion de la sortie du guide "Adapter la gestion des bords de routes pour préserver les insectes pollinisateurs sauvages", le Cerema propose une interview en 3 question de l'auteur sur les enjeux et les leviers d'action.

Ce guide destiné aux gestionnaires de dépendances vertes d'infrastructures apporte un accompagnement en termes de stratégie et de méthodes, et est basé sur des bonnes pratiques de gestion identifiées par le Cerema. A l'occasion de la sortie de l'ouvrage, le Cerema propose une interview en 3 question à l'auteur, Christophe Pineau, Chef de groupe "Ingénierie écologique" au département des transitions territoriales du Cerema ouest.

 

Quel est l’enjeu pour les gestionnaires de dépendances vertes à mener une gestion différenciée, et en quoi cela consiste-t-il ?

 

Couverture du guideLes dépendances vertes routières représentent environ 1% du territoire, elles constituent des corridors écologiques pour la biodiversité et notamment pour les pollinisateurs. Des modes de gestion adaptés peuvent favoriser leur présence. La gestion différenciée ou raisonnée, c’est différencier dans l’espace et le temps les modes d’entretien, les matériels utilisés.

D’habitude les dépendances vertes des routes souffrent plutôt d’un excès que d’un manque d’entretien, et la gestion différenciée demande moins de moyens matériels et humains que l’entretien classique ce qui permet de faire des économies tout en favorisant la biodiversité.

L’idée est de ne pas agir de manière systématique : on n’entretient pas les dépendances vertes partout, tout le temps de la même manière, pour laisser aux pollinisateurs le temps d’accomplir leur cycle de développement au niveau de la dépendance verte. Les pollinisateurs se déplacent dans une zone assez limitée, de 300 à 400 m autour de leur nid en général, et peuvent donc vivre entièrement sur une dépendance verte, par exemple une dépendance d’autoroute qui peut faire 50 mètres de largeur.

Par ailleurs, il peut y avoir des éléments perturbateurs autour de la dépendance verte, et l’intérêt de cette gestion est aussi d’éviter des déplacements des pollinisateurs vers ces zones.

Il s’agit donc d’adapter la gestion au type de dépendance, par exemple un talus, un fossé, un accotement et selon la distance par rapport à la route, et ainsi de donner une certaine stabilité au milieu en gérant uniquement ce qui est utile en termes de sécurité et de patrimoine.

 

 

En termes de méthode, quelle démarche recommande le Cerema pour la gestion des dépendances vertes? 

fauchage en bord de route en zone ruraleIl est important d’organiser la gestion des dépendances vertes au niveau du réseau. Lors de la rédaction des appels d’offre, le maire peut définir la hauteur et les dates des fauches ainsi que le nombre de passages dans l’année.

En tant que gestionnaire, il est important d’avoir une vision globale de son patrimoine de dépendances vertes et de faire un diagnostic des différentes dépendances en termes de qualité et d’attractivité pour les pollinisateurs. Pour que le couvert végétal soit diversifié en plantes à fleurs et non en graminées, il faut réduire la pression de la fauche et laisser le temps aux plantes de pousser.

Les espèces ont aussi des besoins différents pour se nourrir, s’abriter, se reproduire, se déplacer, et la diversité végétale en laissant la place à des herbacées, des plantes semi-ligneuses, des arbustes, permet de répondre à un maximum de besoins.

Ensuite, il faut établir un plan de gestion avec une cartographie des dépendances et de leurs enjeux.

La gestion doit concilier les enjeux environnementaux et d’entretien avec les enjeux de sécurité qui priment, et il faut se demander ce que l’on peut faire dans chaque configuration pour favoriser la diversité végétale et donc les pollinisateurs. C’est pour cela qu’une cartographie est très utile.

Le plan de gestion peut aussi prévoir d’alterner les pratiques d’une année sur l’autre sur certaines parcelles, ou sur une même zone de laisser plus ou moins de végétation en alternance.

Il y a une évolution culturelle autour de cette gestion plus durable des dépendances vertes, par exemple la fauche tardive ou l’augmentation de la hauteur de fauche à 12 cm sont aujourd’hui répandues, et l’effort est à poursuivre aussi bien à destination des gestionnaires et des équipes qui entretiennent ces espaces, que du grand public.

La démarche de définition d’un plan de gestion, à laquelle il est intéressant d’associer les équipes de terrain, est l’occasion de diffuser ces nouvelles pratiques et d’expliquer leur intérêt. Le Cerema peut d’ailleurs intervenir pour organiser et mener ces formations.

 

Quelles actions peuvent être mises en place pour favoriser le travail des insectes pollinisateurs ?

Différentes expériences ont été menées par des gestionnaires, ce guide en présente certaines, et au-delà de la zone de sécurité de part et d’autre de la chaussée le gestionnaire est assez libre dans ses choix.

Les actions à mener peuvent être de plusieurs ordres : techniques, méthodologiques, matérielles. L’idée est de favoriser une diversité de plantes à fleurs qui permettent aux pollinisateurs de s’abriter, de se reproduire, de se nourrir, en laissant des zones de refuge non-gérées une année sur deux ou en mélangeant les herbacées, les semi-ligneuses, les arbustes afin d’accueillir différentes familles de pollinisateurs par exemple. L’objectif est que le bord de route soit une continuité pour les pollinisateurs.

Il est possible d’agir au niveau des matériels choisis, qui peuvent être réglés pour ne couper que le nécessaire, ou qui permettent de broyer la fauche et d’exporter le broyat.

Les connaissances évoluent sur les pollinisateurs, mais il nous reste beaucoup à apprendre sur eux, et les méthodes pourront évoluer.

 

Pour télécharger le guide :