6 mai 2019
Une assemblée attentive
RAMOS Marie-Pierre - CGET/DG/COM
Le 29 janvier dernier, le Cerema a présenté ses derniers travaux sur les quartiers prioritaires de la politique de la ville à un large auditoire réuni au CGET. La mobilité des habitants des quartiers de 33 unités urbaines métropolitaines a été analysée. Sur de nombreux aspects, elle est plus faible que celle des autres habitants. L’étude, disponible en ligne, a caractérisé les personnes les plus concernées, puis mis l’accent sur un certain nombre de profils types pour en éclairer la mobilité.
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Actualité de l'Equipe projet de recherche ESPRIM : Perturbations et la Résilience des systèmes de Mobilité
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On constate aussi que les quartiers prioritaires de la ville sont bordés ou traversés par de nombreuses coupures : routes, voies ferrées, zones d’activités, pentes fortes, etc. L’ensemble des quartiers métropolitains et ultramarins a fait l’objet d’une analyse, au regard des coupures linéaires, surfaciques et topographiques qui les affectent. 

 

La mobilité des habitants des quartiers prioritaires de la politique de la ville

Les enquêtes ménages certifiées Cerema rassemblées dans une base unique ont été traitées spécifiquement pour permettre une exploitation des données sur les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV). Nicolas Juste du Cerema Nord Picardie a ainsi pu comparer la mobilité des habitants des QPV avec celle des autres habitants des unités urbaines.

Dans les QPV, les déplacements par personne sont moins nombreux, ainsi que les distances parcourues dans la journée. Cependant le nombre de sorties (qui peuvent compter plusieurs déplacements) et les temps de déplacements sont très proches dans les QPV et en dehors.

RER circulant sur un pont à Paris
Crédit : Bernard Suard - TERRA 

Cela signifie que les sorties comptent moins de déplacements, et donc moins de motifs, en QPV et que les déplacements y sont plus lents.

La raison principale de cette lenteur des déplacements tient au moindre accès à l’automobile. Cet accès plus faible à la voiture est particulièrement fort pour les habitantes des quartiers. Quel que soit leur âge, elles ont moins le permis que leurs homologues des autres secteurs et leurs ménages disposent beaucoup moins souvent de plusieurs véhicules.

L’agglomération parisienne se distingue nettement des agglomérations de province, même des plus importantes, par un moindre usage de la voiture, compensé par les transports collectifs. De ce fait, les écarts de mobilité sont moindres entre les habitants des quartiers et les autres dans l’unité urbaine francilienne.

Quatre modélisations ont déterminé les probabilités de conduire une voiture, le nombre, la distance et le temps des déplacements quotidiens dans les quartiers et en dehors. L’effet propre de la domiciliation dans un quartier prioritaire n’est pas neutre, mais son influence est très inférieure à celle des caractéristiques socio-économiques des ménages.

Les coefficients des modèles ont ensuite été utilisés pour générer plusieurs profils particuliers d’habitants afin de représenter leurs écarts de mobilité selon la domiciliation en quartiers prioritaires ou non. Ainsi, malgré un taux d’accès à la voiture très inférieur dans les quartiers, du fait de sa domiciliation, un homme actif ouvrier a, toute chose égale par ailleurs, plus de probabilités (de nécessités ?) d’utiliser sa voiture pour aller travailler lorsqu’il habite en QPV. Ce paradoxe est à mettre en lien avec les localisations souvent excentrées des quartiers et des emplois peu qualifiés et avec le peu d’offres alternatives à la voiture pour aller travailler : les lignes de transport collectif rabattent le plus souvent sur les centres aux densités élevées.

 

Coupures spatiales et quartiers prioritaires de la politique de la ville

Circulation sur le périphérique parisien, vue en hauteur
Crédit: Arnaud Bouissou - TERRA

Une seconde approche s’est focalisée sur les coupures physiques qui participent à l’enclavement des quartiers. Si les coupures contribuent à l’enclavement, elles ne suffisent cependant pas seules à le déterminer, d’autres facteurs socio-économiques interviennent également et ce sont principalement les représentations des personnes extérieures au territoire "enclavé" qui le définissent ainsi.

Yohan Urie, du Cerema Normandie Centre a mesuré les coupures physiques pour l’ensemble des 1514 QPV métropolitains et ultramarins. Ces coupures sont:

  • Linéaires (routes, voies ferrées et cours d’eau). Ces coupures linéaires affectent fortement ou très fortement plus de 30% des quartiers. 46% des quartiers sont directement coupés par des linéaires tandis que 42 % sont longés.
  • Surfaciques (surfaces d’activités, aéroports, cimetières, forêts, plans d’eau): ces coupures  impactent fortement ou très fortement environ un quart des quartiers. Ces QPV ont au moins 25% de leur aire attenante touchée par ces surfaces.
  • Topographiques (éloignement et pente). Les coupures topographiques les plus fortes concernent également environ un quart des quartiers. Parmi ces derniers 27 % d’entre eux sont à plus de 2 km de leur mairie, et 18 % sont entourés de pentes supérieures à 20 %.

Ces différents types de coupures ont été mesurés dans une enveloppe de 300 m autour des QPV.

En métropole, aucune corrélation n’a été trouvée entre la présence de ces coupures et l’offre de transport collectif. Cependant près d’une soixantaine de quartiers confrontés à de fortes ou très fortes coupures bénéficient d’une desserte, rapportée à la population, supérieure de 50 % à celle de leurs agglomérations. Ces actions sont un effet direct des politiques publiques locales et nationales d’amélioration de l’offre TC.