Une rénovation énergétique n'est performante que si l'enveloppe du bâtiment est rendue étanche à l'air et qu'un système naturel ou mécanique permette un renouvellement de l'air suffisant et permanent pour assurer une bonne qualité de l'air intérieur.
Suite au constat de l'existence de peu de données sur l'étanchéité à l'air des bâtiments existants, la Direction de l'Habitat, de l'Urbanisme et des Paysages (DHUP) a commandé au Cerema une étude sur la perméabilité à l'air des bâtiments de logements construits avant 2005.
Le but a été de réaliser un état des lieux de la perméabilité à l'air dans ce type de construction afin de :
- recenser les fuites récurrentes,
- travailler à la création de modèles prédictifs de la perméabilité à l'air d'un logement
- et de développer par la suite une méthodologie de diagnostic visuel permettant d'évaluer simplement le renouvellement de l'air d'un logement.
Le projet...
Une campagne de diagnostics visuels suivis de mesures a été confiée au Cerema entre 2017 et 2018 et a concerné 107 logements. Un recensement des données déjà disponibles sur ce sujet a également été réalisé.
L'ensemble des données récoltées a été compilé dans une base de données, dont l'analyse a fait l'objet d'un rapport remis au commanditaire en décembre 2018.
Le panel de logements diagnostiqué était représentatif de la répartition des logements en France métropolitaine.
Les logements ont été choisis en fonction de leur année de construction, de leur caractère individuel ou collectif et de leur style architectural.
Quelques exemples de bâtiments sélectionnés : maison rurale construite avant 1948, pavillon construit entre 2000 et 2005, immeuble de bourg d'avant 1948 ou encore Barres et Tours construites entre 1948 et 1974.
Les objectifs d'Exist'air...
Etablir un protocole de mesure dans l'existant. Les normes de mesures de perméabilité à l'air sont utilisées aujourd'hui principalement pour les bâtiments neufs. Afin de réaliser la campagne de mesure, le Cerema a commencé par adapter les méthodes de travail au contexte du bâtiment existant.
Dresser un état des lieux de la perméabilité à l'air dans les logements existants. Cet état des lieux est quantitatif (obtention du Q4Pa-surf et du n50 pour chaque logement) et qualitatif avec une recherche exhaustive des fuites.
Interroger la base de données pour tenter de répondre à quelques questions en vue de faire avancer les connaissances et les méthodes de mesure de la perméabilité dans les logements existants :
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Est-ce que certaines fuites jouent un rôle prépondérant dans le niveau d’étanchéité à l’air global mesuré ?
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Est-ce que ces fuites auraient pu être anticipées sans avoir eu recours à une recherche de fuites à proprement parler ?
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Le résultat de mesure s’explique-t-il par certaines caractéristiques du bâtiment (matériaux, équipements, état général, etc.) ?
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Ces caractéristiques "impactantes" peuvent-elles suffire pour faire une estimation a priori de la perméabilité à l’air ?
Faire évoluer les réglementations en vigueur et aider à la préparation des réglementions futures sur les bâtiments existants (RT existant, DPE, etc.)
Evaluer la ventilation des logements en parallèle de la perméabilité à l'air et de l'aération afin de qualifier le renouvellement de l'air des logements par un nouvel indicateur A+V+P-.
La méthode de diagnostic et de mesure...
Un protocole de diagnostic visuel a été élaboré dans le cadre du projet Exist'air. Il permet un relevé des informations de manière uniforme sur les logements du panel de mesure.
Ce protocole détermine les éléments à relever ainsi que les informations associées telles que : le type de menuiseries, les matériaux de construction, l'état des joints des ouvrants, le nombre de trappes, le détalonnage des portes intérieures, les systèmes de ventilation, de chauffage, etc.
Les plans du bâtiments sont également relevés sur le terrain.
A l'aide d'une porte soufflante et du matériel associé, les agents du Cerema réalisent, suite au diagnostic visuel, une recherche exhaustive des fuites d'air de l'enveloppe du logement.
Enfin, une mesure de perméabilité à l'air (méthode 3 de la norme NF EN ISO 9972 et FD P50-784) est effectuée.
Les résultats obtenus pour chacun des logements sont consignés dans une base de données, dans un rapport de diagnostic visuel ainsi que dans un rapport de mesure de perméabilité à l'air.
Les résultats
Les valeurs de Q4Pa-surf obtenues (cet indicateur représente le débit de fuite par m² de surface déperditive hors plancher bas sous une dépression de 4 Pa (Pascals), et s’exprime en m3/(h.m²) sont présentées ci-après:
Les appartements ont un meilleur résultat que les maisons, en moyenne et en médiane.
Q4Pa-surf du panel Exist'air – 117 logements – 67 appartements – 50 maisons
Les logements construits avant 1948 ont un Q4Pa-surf bien plus élevés que ceux construits après la seconde guerre mondiale.
Q4Pa-surf du panel Exist'air – 117 logements – 39 avant 1948 – 32 entre 1948 et 1974 – 46 après 1974
D'une part, il a été possible d'identifier des types de fuite qui impactent plus fortement le niveau d'étanchéité à l'air global, même s'il a été parfois difficile, voire impossible, de détecter ces fuites par de simples observations (c'est-à-dire sans avoir recours à la mesure à proprement parler) :
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Liaison entre blocs de maçonnerie (type fissure sur mur en pierres, briques);
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Percements sur parois verticales ou horizontales (décoration, ameublement, modification de réseaux de chauffage, etc.);
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Diverses liaisons entre parois et doublages ;
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Liaison entre murs et plafond (horizontal ou sous rampant) ;
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Liaison entre poutre apparente et plafond ;
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Trappe et chassis de désenfumage;
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Lanterneau d'éclairage zénithal.
D'autre part, il semble que certaines caractéristiques des logements soient corrélées au niveau de perméabilité à l'air mesurée, ces caractéristiques étant différentes entre les maisons et les appartements. Cependant, la taille de l'échantillon, plutôt réduite, ne permet pas de généraliser ces résultats selon un modèle suffisamment robuste.
Caractéristiques des logements influentes sur la perméabilité à l'air des maisons :
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La présence de plusieurs trappes (au moins 2) ;
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La présence de plusieurs équipements spécifiques (au moins 2) ;
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L’absence d’isolation extérieure du plancher haut.
Caractéristiques des logements influentes sur la perméabilité à l'air des appartements :
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La présence de murs mitoyens de type cloison légère ;
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La présence d’appareils à combustion non étanches ou de foyers ouverts ;
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La présence de conduits condamnés ;
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La situation de l’appartement dans le bâtiment : les appartements situés au RDC ou en étage intermédiaire ont en moyenne une valeur de Q4Pa-surf plus élevée que les appartements du dernier étage (calcul d’ATbat).
A partir de ces caractéristiques influentes, un modèle linéaire pour les appartements et un autre pour les maisons ont été créés. Ces deux modèles ne sont pour l'instant pas assez précis pour prédire un pourcentage important de variabilité de Q4Pa-surf.
Enfin, le renouvellement d'air a été évalué de façon qualitative, et il ressort que pour la majorité des logements, les ventilations, si elles existent, sont défaillantes, mais sont compensées par de bonnes habitudes d'aération de la part des occupants, et par une forte perméabilité à l'air des bâtiments.
Les éléments suivants peuvent être rapportés :
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Un quart des 117 logement ne dispose pas de ventilation (aucune extraction d'air naturel
leou mécanique), -
La VMC simple flux est le système de ventilation majoritairement observé,
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Il manque au moins une sortie d'air dans les pièces humides de la moitié des logements diagnostiqués
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Il manque au moins une entrée d'air dans les pièce sèches de la moitié des logements diagnostiqués
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Le passage de transit d'air sous les portes est défaillant dans 2/3 des logements du panel
L'indicateur A+ V+ P- ...
La ventilation, l’aération par ouverture des fenêtres, et la perméabilité à l’air étant les trois principaux phénomènes qui contribuent au renouvellement d’air dans les logements, le Cerema a proposé dans son rapport une évaluation de la performance de chacun de ces paramètres.
Chacun de ces trois contributeurs au renouvellement de l'air est qualifié indépendamment des autres, sur la base de trois niveaux de performance (contribution forte, moyenne ou faible) :
- Aération : en fonction de la fréquence de l’ouverture des fenêtres (A3 : quotidienne – A1 : rarement ou jamais) ;
- Ventilation : en fonction du type de non-conformité, et du nombre de non-conformités relevées (V3 : ventilation conforme et effective – V1 : défauts rendant la ventilation quasi nulle);
- Perméabilité à l’air : en fonction du Q4Pa-surf avec pour seuils 0,6 et 1,2 m3/h/m² (P1 : Q4Pa-surf < 0,6 m3/h/m² - P3 : Q4Pa-surf > 1,2 m3/h/m²).
Un score baptisé "A+V+P-" est ensuite établi pour chaque logement. Voici les résultats sur notre panel de 117 logements :
Les profils A+V+P- les plus représentés dans le panel Exist'air sont les suivants :
- A3V1P3 : 47 logements (44 % de l’échantillon) sont aérés quotidiennement, ne disposent pas d’une ventilation qui contribue correctement au renouvellement d’air, et sont très perméables à l’air ;
- A3V1P2 : 13 logements (12 % de l’échantillon) sont semblables au profil précédent, mais sont un peu moins perméables à l’air ;
- A2V1P3 : 11 logements (10 % de l’échantillon) ont une forte perméabilité à l’air, une ventilation insuffisante, et une aération moins fréquente que les deux profils précédents
- A1V1P3 : dans 9 logements (8 % de l’échantillon), le renouvellement d’air se fait principalement par les défauts d’étanchéité à l’air.
Les suites données à Exist'air...
Exist'air 2 est déjà lancé !
Afin d'augmenter la fiabilité des modèles développés et les conclusions d'Exist'air, le Cerema et la DHUP ont décidé de continuer l'étude en 2019 et d'augmenter le nombre de logements diagnostiqués et mesurés.
Ainsi, en 2019, le Cerema prévoit de diagnostiquer et mesurer la perméabilité à l'air de 80 à 140 logements supplémentaires. Les données de cette seconde mesure de campagne s'ajouteront à la base de données créée en 2108.
Le tout sera ensuite analysé selon la même méthode que celle employée dans la première phase de l'étude Exist'air.