26 février 2024
Mise en œuvre d’un épandage de lait de chaux sur chaussée revêtue par un enduit superficiel
Cerema
Pour traiter le phénomène de ressuage des chaussées (remontée du bitume lors de fortes chaleurs), une solution innovante composée de lait de chaux a été développée par l'entreprise Lhoist. Celle-ci a fait appel au Cerema pour évaluer l'impact environnemental de cette solution, notamment vis-à-vis des eaux de surface. Ce travail a également permis de proposer un dosage de qui permet d'assurer l'efficacité du traitement et de réduire le risque d'impact environnemental.

Après des premiers contacts en 2018, une collaboration entre le Cerema et l’entreprise Lhoist s’est mise en place dans le cadre d’un contrat Carnot.

Pourvoyeuse d’une solution de lutte contre le phénomène de ressuage des chaussées en période caniculaire par épandage de lait de chaux, l’entreprise Lhoist a attisé l’intérêt des gestionnaires routiers mais s’est vu questionnée quant à l’éventuel impact environnemental de cette technique.


Mesurer l'impact environnemental : une étude en 3 phases

Les périodes de fortes chaleur peuvent accélérer la dégradation des enduits superficiels d’usure à cause du phénomène de ressuage, qui se matérialise par une remontée de bitume à la surface de la chaussée. Une solution technique à coût modéré est l’épandage d’une suspension de lait de chaux, qui permet de prévenir et de traiter efficacement le ressuage en évitant la ruine de la chaussée à court terme et en garantissant la sécurité des usagers. Avant de généraliser cette pratique, la question de l’impact environnemental de cette solution technique a été soulevée par les gestionnaires.

En effet, le lait de chaux étant, de par sa constitution, un produit très basique, la question de l’impact environnemental du produit a fait l'objet d'une étude du Cerema, en particulier pour ce qui concerne les eaux superficielles.

Ces dernières sont effectivement les premières, du fait du caractère quasi imperméable des couches de roulement, à réceptionner les eaux de ruissellement pluvial ayant lessivé la surface de la chaussée et potentiellement entraîné les divers polluants présents.

Une étude d’évaluation de l’impact sur la qualité des eaux superficielles de l’épandage de lait de chaux sur chaussée recouverte par des enduits superficiels d’usure a donc été réalisée par l’Agence de Clermont-Ferrand (ACF) du Cerema, en partenariat avec la société Lhoist et en lien avec le Conseil Départemental du Puy-de-Dôme. 

 

Cette étude s’est déroulée en 3 phases distinctes :
 
  • Une modélisation théorique de l’entrainement de la chaux par les eaux de ruissellement pluvial ;
  • La détermination des potentiels impacts environnementaux du produit commercial de la société Lhoist et une étude sur modèle réduit simulant le lessivage d’une chaussée traitée au lait de chaux, pour lesquels les capacités analytiques et l’expertise de la plateforme d’essais physico-chimiques de l’ACF a été largement sollicitée ;
  • Le suivi physico-chimique et hydrobiologique in situ sur 3 années de 2019 à 2021 d’un cours d’eau situé en contrebas d’un tronçon de route départementale sous circulation et traitée au lait de chaux, qui a mobilisé une nouvelle fois la plateforme d’essais physico-chimiques ainsi que le laboratoire d’hydrobiologie de l’ACF.

Des recommandations pour la mise en ŒUVRE

Chaussée traitée au lait de chaux

In fine, l’étude a mis en avant un possible risque d’impact saisonnier sur les eaux superficielles des épandages de lait de chaux pour le traitement du ressuage, en cas d’entraînement du produit par des eaux de ruissellement pluvial (en cas d’orages estivaux notamment). Ce risque reste toutefois limité si la quantité épandue est réduite dans les secteurs situés à proximité d’eaux de surface, et si le temps de séchage du produit est suffisamment long.

L’étude a ainsi permis d’édicter des recommandations à l’attention des gestionnaires routiers quant à la mise en œuvre de l’épandage du lait de chaux (temps de séchage, conditions météorologiques, dosage à proximité de zones vulnérables…), visant à atténuer au maximum le lessivage du lait de chaux et donc les impacts environnementaux sur les eaux superficielles. Cette étude a été publiée dans les actes du 27ème congrès mondial de la route (voir ci-dessous).

Sur la base de ces résultats, à partir de 2022, la technique par épandage au lait de chaux s’est largement développée au niveau des territoires. Mise en œuvre dans un but préventif, la technique permet de ralentir la détérioration de nombreuses routes rurales, contribuant ainsi à l’allongement de la durée de vie des enduits superficiels, tout en garantissant la sécurité des usagers.

Lors d’un été 2023 particulièrement chaud, elle a permis, entre autres, de garantir la qualité des routes du département du Puy De Dôme et la sécurité des coureurs cyclistes lors du passage du Tour de France qui a pris ses quartiers pendant 4 jours autour de Clermont-Ferrand.

Présentée dans le cadre du XXVIIème congrès mondial de la route organisé par l’association mondiale de la route (PIARC) à Prague en octobre 2023, l’étude a été reconnue pour sa qualité et récompensée :

  • d’une part à l’échelle internationale avec l’obtention d’une mention spéciale dans la catégorie Conception, Construction, Entretien et Exploitation des routes, décernée par le PIARC au début du congrès (voir la vidéo) 
  • d’autre part à l’échelle nationale avec l’obtention d’une médaille d’or dans la même catégorie, décernée par le comité miroir français de l’association PIARC-France lors d’une cérémonie organisée à Paris en novembre 2023.

Vidéo pour le PIARC 2023 :

 

Ces interventions ont permis de valoriser et récompenser le travail et l’implication de 9 agents du Groupe Eau et Risques de l’Agence de Clermont-Ferrand ayant grandement contribué à la réussite de ce projet Carnot, totalement en phase avec les orientations du Cerema en matière d’adaptation au changement climatique.

 

L’équipe-projet du Groupe Eau et Risques de l’Agence de Clermont-Ferrand