1 juin 2014
Pylone radar à La rochelle
Le Cerema a produit en 2014 un rapport sur l'évaluation des radars discriminants sur la rocade de Toulouse.

Contexte de l'étude

Dans le cadre de sa politique de sécurité routière, le Gouvernement a mis en place un système de contrôle automatisé des infractions au Code de la Route. Le contrôle des vitesses constitue l’axe principal de ce système dont les équipements de terrain, plus connus sous le nom de radars, ont été installés régulièrement depuis 2003. Au 1er avril 2014 étaient en service 2203 radars fixes « classiques » et 221 radars dits « discriminants » dans la mesure où ils sont capables de discriminer à la fois la voie de circulation et le type de véhicule du contrevenant. Par cette dernière fonctionnalité, les radars « discriminants » sont notamment capables de sanctionner les PL à leur réelle vitesse réglementaire, quand celle-ci est différente de la vitesse limite applicable aux véhicules légers.

Le déploiement progressif et intensif du parc de radars a incité le DCA, Département du Contrôle Automatisé de la DSR, a lancé un programme d'études pour évaluer les dispositifs et pouvoir prendre du recul par rapport à la mise en service, ce qui permet une analyse durable des évolutions des comportements.

Pour les radars discriminants, Il était nécessaire au DCA d’avoir des éléments au plus tôt concernant l’impact sur les vitesses pratiquées, impact qui lui, peut se mesurer rapidement après la mise en service du radar. C’est pourquoi, compte tenu de la disponibilité de données, ESAD-ZELT a proposé un suivi dans le temps, à long terme, des vitesses pratiquées au niveau de radars discriminants de la Rocade de Toulouse.

Deux sites sont proposés, l’un sur la rocade Nord-Ouest A620 dit Ginestous, géré par la DIR Sud-Ouest, l’autre sur la rocade Est A61 PR236, géré par ASF, site dénommé « Balma » dans ce qui suit. Ces sites ont tous les deux un avantage conséquent pour l’intérêt de l’étude du fait qu’au même endroit, dans le sens de circulation inverse, un radar fixe « classique » a été installé précédemment (2008 pour Ginestous et 2006 pour la rocade Est). L’autre avantage, tout aussi conséquent dans la pratique, est la présence à proximité immédiate (moins de 300 m) d’une station de recueil de données trafic permanent (de type SIREDO pour la DIRSO).

L’étude

Dans le présent rapport, nous avons effectué un suivi journalier des vitesses pratiquées sur deux sites de la Rocade de Toulouse ayant en commun la mise en place d’un contrôle automatique des vitesses classique dans le sens extérieur (en 2006 et 2008) puis un radar discriminant dans le sens intérieur en 2012-2013, le tout à proximité d’une station de mesure permanente des vitesses (de type SIREDO). Le premier site dit Ginestous est sur la Rocade Nord-Ouest de Toulouse, gérée par la DIR-SO et le second, dit Balma, sur la Rocade Est, gérée par ASF.

Sur chacun des sites, dont le profil est 2x3 voies, les dispositions réglementaires sont marquées par :

  • une baisse de la vitesse limite autorisée (de 110 km/h à 90 km/h pour les VL et 80 km/h pour les PL à titre expérimental de juin à septembre 2006 ;
  • la reprise de ces dispositions au 1er juillet 2007, pérennisées le 4 octobre 2007.

Les équipements de terrain de contrôle automatique ont été installés aux dates suivantes

  • l’installation d’un radar classique dans le sens extérieur : pose le 14 avril 2005 et mise en srvice le 3 février 2006 sur le site Balma et pose le 13 décembre 2007 et mise en service le 19 mars 2008 sur le site Ginestous ;
  • l’installation d’un radar discriminant précédé d’un radar pédagogique dans le sens intérieur (pour les deux sites : pose le 23 octobre 2012 et mise en service le 5 février 2013 après installation du radar pédagogique le 10 janvier 2013, puis remplacement de l’ETP par un panneau le 23 octobre 2013).

Nous avons éliminé les impacts des phénomènes de congestion en période de pointe pour nous concentrer sur des moyennes représentatives de la nuit (22h-6h) et de la période creuse de jour (10h-16h et 20h-22h). Puis nous avons analysé les variations dans le temps (moyennes journalières) par périodes bornées par les événements marquant les évolutions réglementaires et l’équipement en contrôle automatique.

graphique

A l’échelle des graphiques traitant de 7 à 9 ans de données journalières, les évolutions des vitesses moyennes apparaissent, de façon assez spectaculaire, comme une stabilité remarquable dans des paliers contrastés : VLA à 110 km/h, VLA à 90 km/h, sans et avec radar.

Par contre, il n’apparaît pas d’effet significatif au moment de l’installation du radar en sens inverse, du moins tant que celui-ci est installé en accotement.

A l’échelle de ces graphiques, l’effet du radar sur la vitesse moyenne apparaît nettement dès la pose de l’équipement. La réaction des usagers apparaît ainsi quasiment « du jour au lendemain ». Toutefois, l’observation des graphiques zoomés sur la période entre la pose et la mise en service du radar permet de moduler légèrement cette impression.

On peut voir par exemple, sur le site Ginestous, qu’en 2008, dans le sens extérieur, la réaction au radar classique est décalée d’environ un mois après la pose, qu’elle s’opère progressivement sur une période d’une dizaine de jours puis la vitesse se stabilise lentement jusqu’à la mise en service. Dans le sens intérieur, l’impact du radar discriminant apparaît plus brutalement : la forte chute de vitesse (la nuit : environ – 25 km/h sur la voie de gauche, - 15 km/h sur la voie médiane et – 10 km/h sur la voie de droite) est obtenue en l’espace de 4 à 5 jours. Elle sera prolongée de 2 à 3 km/h au moment de la mise en service du radar pédagogique.

Sur le site Balma, la pose du radar classique en 2005, alors que la VLA était de 110 km/h est suivie, du jour au lendemain, d’une très forte baisse de la vitesse (au moins 15 km/h). Dans les 2 semaines qui suivent, celle-ci va remonter lentement et se stabiliser ensuite à environ 8 km/h en-dessous des valeurs initiales, mais sans effet spécifique ressenti à la mise en service. A la pose du radar discriminant en octobre 2012, la baisse de vitesse est également immédiate puis un léger palier de baisse, d’environ 1 km/h, sera ressenti au moment de la mise en service du radar pédagogique. Toutefois, l’incidence du remplacement de celui-ci par un panneau n’apparaît pas à l ‘échelle de ces graphiques.

L’impact directement visible de l’implantation du radar, au-delà de la baisse immédiate de la vitesse moyenne, se traduit par une réduction des écarts de vitesse nuit / jour et une réduction des écarts entre voies de circulation.

En quelques chiffres, sur le site Ginestous :

L’abaissement de la VLA de 110 km/h à 90 km/h s’est traduit globalement par une baisse de la vitesse moyenne de 12 % en sens extérieur et 9 % en sens intérieur.

L’effet de la mise en service du radar classique en 2008 dans le sens extérieur s’est traduit, sur la vitesse moyenne, par :

  • sur la voie de droite, une baisse de 6 % à 7 % ;
  • sur la voie médiane, une baisse de 4 % la nuit et 2 % le jour ;
  • sur la voie de gauche, une baisse de 20 % la nuit et 12 % le jour ;
  • globalement une baisse de l’ordre de 5 %, amenant une vitesse moyenne avec radar de 86 km/h la nuit et 84 km/h en période creuse de jour.

En sens intérieur, la mise en service en 2013 du radar discriminant a eu les effets suivants sur la vitesse moyenne :

  • sur la voie de droite, baisse de 11 % la nuit et 8 % le jour ;
  • sur la voie médiane, baisse de 18 % la nuit et 11 % le jour ;
  • sur la voie de gauche, baisse de 27 % la nuit et 19 % le jour ;

globalement une baisse de l’ordre de 12 %, amenant une vitesse moyenne avec radar de 81 km/h la nuit et 80 km/h en période creuse de jour.

Quelle que soit la voie de circulation, les effets sont amplifiés (presque de moitié) la nuit par rapport à la période creuse de jour.

De plus, l’effet du radar discriminant dans le sens intérieur apparaît environ deux fois plus important que celui du radar classique antérieurement. En effet, quand la vitesse moyenne avait été ramenée d’environ 89 km/h à 85 km/h au moment de l’installation du radar classique en sens extérieur, elle l’a été de 91 km/h à 80 km/h en sens intérieur après l’installation du radar discriminant.

On ne peut toutefois pas expliquer ce constat par la seule possibilité du radar discriminant de verbaliser les poids lourds (à plus de 80 km/h) car le phénomène est observé sur toutes les voies. D’autre part, compte tenu du taux de PL (de l’ordre de 7 %), le seul fait de ramener leur vitesse à 80 km/h au lieu de 90 km/h n’aurait comme conséquence qu’une diminution de 0,8 % de la vitesse moyenne du flot. L’effet complémentaire peut donc être conjoncturel, la modification des comportements pouvant être accentuée en 2013 par rapport à 2008, ou être attribué à un effet additionnel du radar pédagogique qui précède le radar sanction. Toutefois cette dernière hypothèse pourrait être contredite par le fait qu’au remplacement du radar pédagogique par un panneau, on observe à nouveau la nuit, une baisse de vitesse de l’ordre de 0,5 %.

Pour ce qui concerne le taux de respect de la limite réglementaire de 90 km/h, on constate ce qui suit : avant radar, lorsque la VLA est de 90 km/h, le pourcentage de véhicules en infraction avoisine 60 % de nuit et 53 % de jour. A la mise en service du radar classique, dans le sens extérieur, le taux d’infractions est divisé par 2 dans le sens du radar (par exemple de 58 % à 30 % la nuit) alors qu’il n’est réduit que de quelques points dans le sens inverse. Par contre, à la mise en service du radar discriminant en sens intérieur, la réduction du taux d’infraction est encore plus forte puisque, dans ce sens de circulation, le taux est divisé environ par 6 pour atteindre 8 % à 9 %, alors qu’il reste en sens inverse autour de 30 %.

En quelques chiffres, sur le site Balma :

La baisse de la VLA à 90 km/h se traduit par :

  • en sens extérieur, avec radar, baisse de 9 % à 10 % (de 90 km/h à 82 km/h) ;
  • en sens intérieur, sans radar, baisse de 6 % (de 94 km/h à 89 km/h).

Lors de l’installation des équipements de contrôle automatique :

  • estimation d’une baisse de 9 % au moment de la pose du radar classique en sens extérieur en avril 2005, la VLA étant alors de 110 km/h ;
  • la baisse des vitesses intervient essentiellement au moment de la pose du radar ;
     
  •  En sens intérieur, la VLA étant de 90 km/h, on mesure :
  1. à la mise en service du radar sens extérieur posé en TPC et flashant par l’arrière, donc visible de face pour les usagers du sens intérieur, on mesure une baisse de vitesse de 1 % la nuit et 2 % le jour ;
  2. à la pose du radar sens intérieur, une baisse de 6,5 % la nuit et 3,7 % de jour ;
  3. à la pose du radar pédagogique : un complément de baisse de 1,5 et 1,2 % ;
  4. d’où globalement une baisse de vitesse moyenne de 8 % la nuit et 5 % le jour.

Conclusion

Au vu du suivi des mesures de vitesse dans une période encadrant l’installation de deux radars sur le site de Ginestous de la Rocade Nord-Ouest de Toulouse, il apparaît que les effets sur les vitesses pratiquées du radar discriminant précédé d’un radar pédagogique mis en service en 2013 dans le sens intérieur sont plus amples (- 12 %) et sont apparus plus rapidement que ceux du radar classique installé dans le sens inverse en 2008 (- 5 %). Sur ce site, au remplacement du radar pédagogique par un panneau, on constate la nuit une légère baisse supplémentaire des vitesses (- 0,5 %).

Par contre, sur le site de Balma, sur la rocade Est de Toulouse, les impacts sont globalement moins contrastés et le sens de la comparaison classique / discriminant inversée : le radar classique installé en 2005 en sens extérieur alors que la VLA était de 110 km/h sont plus forts (- 9 %) que ceux du radar discriminant mis en service en 2013 en sens intérieur (- 6 %) avec une VLA de 90 km/h.

Dans le dossier Contrôle automatique de vitesse