22 novembre 2021
Autoroute du Sud
Le Cerema contribue, conjointement avec la DIR Atlantique et l'Université Gustave Eiffel, à la définition et la mise en œuvre de méthodes innovantes de diagnostic de l'état des chaussées, permettant d'identifier des phénomènes difficilement perceptibles comme les fissurations internes. Un chantier instrumenté depuis 2014 sur une section de l'A63 a permis de mettre au point de nouvelles méthodes par géophones et jauges longitudinales, ainsi qu'un modèle prédictif.

Tout gestionnaire de réseau a besoin de connaitre l’état structurel de ses chaussées pour adapter sa stratégie de préservation de son patrimoine. Particulièrement, le phénomène de fissuration interne du corps de chaussée (et par conséquent invisible pour un observateur extérieur) est très difficile à appréhender, par les moyens d’auscultation non destructifs existants.

 

Vers de nouvelles méthodes d'auscultation des chaussées capable de détecter l'invisible

Depuis 2014, une équipe pluridisciplinaire du Cerema Sud-Ouest conduit l’évaluation d’un des premiers chantiers instrumentés en continu en France afin de contribuer à l’élaboration d’une solution alternative aux méthodes traditionnelles de diagnostic de l’état structurel de la chaussée. 

couche de chaussée en coupe (schéma)
Schéma d'une couche de chaussée

L’instrumentation de chaussée installée lors des travaux de renforcement de la chaussée de l’A63 vise à évaluer l’apport de différents capteurs pour qualifier l’état structurel du corps de chaussée et particulièrement détecter la remontée d’une fissure au travers d’un matériau bitumineux. La méthodologie proposée suppose de modéliser la structure de chaussée initiale puis de suivre, à intervalles réguliers, l’évolution de la réponse des capteurs sous une charge connue et par extension, apprécier l'évolution du comportement mécanique de la structure. Cette charge est obtenue par le passage annuel d’une charge de référence mais aussi, directement déduite du trafic routier, par filtrage sur certaines silhouettes de poids lourds.

La configuration de l’instrumentation, la pose puis l’exploitation des données recueillies ont été construites en bénéficiant de l’appui technique de l’Université Gustave Eiffel (Laboratoire Auscultation, Modélisation et Expérimentation des infraStructures de Transport).

Le pilotage du projet a été réalisé par le groupe Gestion du Patrimoine et Géotechnique du Département Infrastructures (Bordeaux). Cette équipe a également conduit l’exploitation des données qui a mobilisé des connaissances en dimensionnement et modélisation de structure de chaussée, de comportement des matériaux mais aussi de traitement de données de grande masse. L’Equipe Référente en Instrumentation, du même département, a assuré l’acquisition des réponses des capteurs ainsi que la maintenance du dispositif.

Les sollicitations ponctuelles des capteurs ont mobilisé les équipes d’auscultation du Cerema Sud-Ouest (Bordeaux et Toulouse).

Le projet a été conduit en étroite collaboration avec le Service d’Ingénierie pour l’Exploitation et l’entretien de la Route (DIR A). Sur le terrain, les équipes du Centre d’Entretien et d’Intervention de Mios ont assuré la protection des personnels et des matériels lors des opérations de mesures.

 

Les premiers résultats

Après 6 ans d’activité, les capteurs communicants noyés dans la chaussée sont opérationnels en quasi-totalité. Au cours de cette période, le nombre de fichiers enregistrés avoisine 100 000.

Selon la grandeur enregistrée (déformations, déplacement vertical), il est proposé des premières méthodes encourageantes de détection de remontée de fissure :

 

Jauges longitudinales

Une modélisation informatique de la structure de chaussée selon l’évolution des niveaux de déformation et le positionnement de la jauge par rapport à la fissure.

vue d'un graphique

 

Géophones (2 approches)

  • Eléments de comparaison de l’allure des signaux après sollicitation par une charge maitrisée
  • Application opérationnelle de travaux de thèse portés par l’Université Gustave Eiffel permettant d’évaluer le niveau de déflexion au passage de Poids-Lourds de type T2S3
graphique de mesure de signaux géophones

 

En complément à l’application de détection de remontée de fissure, deux autres usages sont proposés :

 

Tri et exploitation de données de grand masse

Un premier modèle "prédictif" de l’évolution structurelle de cette chaussée a été proposé suite aux travaux d’un stagiaire de l’Université Technique de Compiègne (UTC), appuyé par les enseignants-chercheurs de l’Ecole Supérieure des Technologies Industrielles Avancées (ESTIA)

 

Variation de la température dans le corps de chaussée

Les fluctuations annuelles des températures (moyenne, maximale et minimale) servent de base à une approche exploratoire de diffusion de chaleur au travers du corps de chaussée

Graphique des données de température

 

Au vu de ces premiers résultats prometteurs, il est acté de développer la valorisation de cette instrumentation afin d’approfondir prioritairement les approches de remontée de fissure puis de consolider le modèle "prédictif" de l’évolution structurelle. Les algorithmes prédictifs sont appliqués ici pour estimer l'évolution des niveaux de déformations dans la structure de chaussée à partir des données enregistrées. Deux modèles ont été définis : un modèle dit "cumulatif" et un modèle dit "multiplicatif", qui s'alimentent des données précédemment enregistrées et adaptent leur "prédiction" dès lors que de nouvelles mesures sont fournies par le site d'instrumentation.