À l'instar du domaine routier, la présence de contaminants (eau, neige, verglas) sur les revêtements des pistes aéroportuaires constitue une problématique majeure pour la sécurité du trafic aérien au sol. La perte d'adhérence et/ou de contrôle directionnel lors des décollages et des atterrissages peut causer des situations déstabilisantes voire dangereuses pour les avions (phénomènes d'aquaplaning par exemple). Il est donc fondamental de pouvoir anticiper les hauteurs et zones d'accumulation d'eau lors d'un événement pluvieux.
Les méthodes actuelles, simples et éprouvées, sont toutefois loin de répondre aux nouvelles exigences internationales de contrôle en temps réel de l’état des pistes. Par ailleurs, la croissance importante du trafic génère des contraintes de capacité des aéroports et milite pour une minimisation de l’occupation des pistes par des inspections humaines. Enfin, le changement climatique risque de causer, suivant les lieux, non seulement une augmentation de la fréquence des précipitations, mais également de leur ampleur.
Dès lors, il devient indispensable de pouvoir mieux appréhender les quantités d'eau qui vont se déverser et s’écouler sur les revêtements des pistes. En France, le Service technique de l'Aviation civile (STAC) et le Cerema ont choisi de collaborer sur le projet Ophelia afin de répondre à ces attentes en développant une nouvelle méthode de diagnostic en temps réel spécifique aux besoins aéroportuaires.
Le projet Ophelia, financé dans le cadre du réseau Carnot Effi-sciences est un programme de recherche et innovation qui vise à développer un outil opérationnel et ergonomique pour que les gestionnaires des aéroports connaissent l'état de contamination hydrique de leurs pistes à tout instant. L’équipe technique est prise en charge par un chercheur du Cerema (M.Boutledja) assisté de deux ingénieurs contractuels (A.Karmar-Sharma, F.Daizé) avec l'appui de plusieurs agents du Cerema mais également du STAC et de plusieurs aéroports. La solution proposée est basée sur une approche de modélisation multi-physique exploitant principalement la mécanique des fluides et s'inspirant des approches de type "éléments finis" pour discrétiser le système. Le principe est de relier les informations de surface de la piste avec les paramètres météorologiques variables (connexion avec les serveurs de Météo France) afin d'établir un réseau d'écoulement et d'en prédire les hauteurs et les zones d’accumulation d'eau. L'influence fondamentale de la macrotexture sur le drainage superficiel est également prise en compte par le modèle. Les effets environnementaux intègrent la pluie, le vent et l'évaporation dans le calcul.
Le logiciel a été développé sous Delphi pour pouvoir être déployé par les opérateurs des pistes aéroportuaires. En parallèle, une version complémentaire a été produite sous Matlab pour un usage interne à des fins de recherche. Les premiers résultats de validation enregistrés sur la piste de l'aéroport de Lyon St-Exupéry et analysés sont très satisfaisants, et sont en cours de consolidation sur la piste de l'aéroport de Strasbourg Entzheim.
Les prochains défis du projet consistent en une consolidation logicielle puis un déploiement commercial de l’outil Ophelia.