3 janvier 2024
parking relais dans le val d'oise
Bernard Suard - TERRA
Le 4 avril 2023, le Cerema a organisé un webinaire à destination des lauréats du bonus "urbanisme-transport" du 4ème appel à projets TCSP, sur la thématique du stationnement. Retour sur les éléments saillants abordés lors de ce webinaire.

Présentation de la fiche "Stationnement" de la boîte à outils de l’articulation urbanisme-transport

(Emmanuel Perrin, responsable d’études mobilités au Cerema)

Mettre en place une offre TC performante ne suffit pas à en assurer une exploitation optimale. Pour optimiser son usage, il est nécessaire en parallèle de limiter les facilités de stationnement.

Exemple d'analyse d'impact du stationnement sur les TCSP - © Cerema

 

Pour réguler le stationnement public autour d’un TCSP, il faut à la fois :

  • Agir sur l’offre de stationnement : suppression de places sur voirie (conséquence inévitable de l’arrivée d’un TCSP), sans chercher à vouloir reconstituer cette offre réduite ailleurs (pas assez rentable) ;
  • Adapter la règlementation du stationnement disponible : cibler les usagers voiture pour les inciter à se rabattre vers les TCSP, assurer une rotation des véhicules stationnés (et donc, toucher un public d’usagers plus larges pour remplir les transports)

L’action sur la règlementation peut mobiliser deux leviers, soit en limitant la durée de stationnement, soit tarifer l’utilisation des places de stationnement. Egalement, il convient d’optimiser sa stratégie stationnement vs. TCSP en se posant quelques bonnes questions :

Quelles sont les catégories d’automobilistes que l’on souhaite voir en priorité se rabattre vers le TCSP (pas la même priorité pour tous) ? 

Faut-il compenser les places supprimées en surface par du stationnement souterrain (coût de tels équipements) ? 

N’y at-t-il pas d’autres moyens d’augmenter la capacité d’accueil et la disponibilité des places de parking (stationnement bien règlementé ET bien contrôlé) ?

 

S’intéressant ensuite aux parkings-relais (P+R) pour assurer le rabattement vers des TCSP, la présentation rappelle que ces derniers ont certes rencontré un certain succès, mais qu’ils ont également des effets pervers largement démontrés (coûts, concurrence faussée en faveur de la voiture mais au détriment d’autres modes de rabattement, immobilisation du foncier…). En outre, la question du dimensionnement des P+R reste prégnante, et doit être pensée au regard de la capacité du TCSP à desservir.

Enfin, l’un des enjeux de l’articulation stationnement-TCSP – et non des moindres ! – concerne également le stationnement privé, qui doit aussi être régulé pour pouvoir inciter les habitants situés dans le périmètre de desserte du transport à utiliser cet équipement plutôt que leurs voitures individuelles. En ce sens, des règles sont mobilisables notamment via le plan local d’urbanisme. Toutefois, ce levier reste limité aux constructions neuves notamment : pour ces dernières, le PLUi pourra par exemple ne pas exiger un nombre de places minimal pour les nouvelles habitations, ou au contraire, fixer un nombre de places maximal pour les constructions nouvelles autres que d’habitation.

Au final, les politiques de régulation du stationnement autour des TCSP restent sensibles politiquement et sujettes à plusieurs difficultés (idées reçues, compétences et acteurs différents…). Cependant, il s’agit d’un levier réellement efficace de rabattement vers les TCSP, peu coûteux à mobiliser (voire rentable pour la collectivité !), et qui amène à repenser la place de la voiture dans l’espace public.

 

Quelle stratégie politique locale de stationnement dans la Métropole Européenne de Lille ?

 (Olivier Asselin, chargé de mission politiques de stationnement)

O. Asselin commence sont intervention par un double rappel préliminaire :

  • la contrainte sur l’offre de stationnement automobile "à destination" est un levier majeur de report modal vers les autres modes – dont les transports en commun ;

  •  cette contrainte est plus efficace quand la commune de destination est bien desservie en TC (mais ce n’est pas suffisant).

L’utilité du pouvoir de police du stationnement pour poser le cadre général d’organisation des mobilités aux alentours des TCSP est également rappelée : le pouvoir de police du stationnement reste de la compétence communale, alors que le plan de mobilité (PdM) est un outil de ressort métropolitain. L’enjeu est de parvenir à assurer la compatibilité des arrêtés de police locaux (relevant de contextes micro et d’une logique territoriale fine) avec le PdM, document de cadrage d’une politique globale des mobilités à horizon de 10 ans environ. C’est pourquoi le PdM lillois pose quelques directives générales :

  • réglementer les durées de stationnement (stationnement payant + macarons) des centres métropolitains du ressort de la MEL et, plus largement de limiter les durées de stationnement en centre-ville 

  • réglementer les abords des stations de TCSP – actuelles et futures – les mieux desservies ;

  • assurer la continuité et la cohérence des règlementations entre les communes situées le long des axes TCSP actuels et futurs.

Le PdM organise par ailleurs l’offre générale du stationnement public et privé sur le ressort de la MEL.

Sur la prise en compte des interactions entre intermodalité et stationnement :

  • sur le territoire de la MEL, les pôles d’échange multimodaux (PEM) sont hiérarchisés entre PEM "majeurs" et "de proximité" ; de même, la MEL distingue les "parkings-relais" (P+R) qui sont à accès contrôlé, des "aires relais" (A+R) qui sont à accès libre.

  • la MEL prend en charge le service des P+R, en se fixant quelques grands objectifs tels que revoir les contrôles d’accès sur l’ensemble des P+R, affiner le diagnostic pour mieux qualifier le stationnement au sein et aux abords des P+R, différencier les tarifs des P+R entre habitants de la MEL et hors MEL, ou encore mieux valoriser l’offre des A+R.

  • Pour encourager l’usage du vélo en rabattement des TCSP, la MEL prévoir dans son PdM d’ "équiper toutes les gares et points d’arrêt TER d’une offre de stationnement vélos, sur l’ensemble des 34 gares du territoire avec une solution adaptée au contexte (arceaux, abris ouverts, abris sécurisés, etc.)."

Sur l’articulation de la politique de stationnement et de la planification urbaine :

  • Source : Métropole Européenne de Lille

    La MEL a défini des "disques de valorisation des transports" (DIVAT) qui sont des périmètres modélisant le service rendu par l’offre de transport collectif (niveau 1 "très performante" et 2 "performante") et qui ont des conséquences en termes de politique locale de stationnement ;

  • Dans les DIVAT de niveau 1, adapter les normes du PLUi (1 place pour 100m² de surface de plancher pour les bureaux et activités tertiaires, et possibilité ouverte de fixer des maximas pour autres usages, hors habitations) pour limiter la création d’offre de stationnement supplémentaire ; réglementer / limiter l’offre existante de stationnement. 

  • Dans les DIVAT de niveau 2, des ambitions similaires sont autorisées selon les contextes locaux.

Au global, la MEL a l’ambition d’agir également sur l’offre de stationnement privé en lien avec les futures lignes de tramway et de BHNS : optimiser l’usage de l’offre publique et privée, en recherchant pour cette dernière des possibilités de mutualisation éventuelle ; anticiper l’évolution des comportements de mobilité ; maîtriser la création d’offre nouvelle de stationnement

Au final La politique de stationnement dans le PDM est :
  • un levier de changement de comportement de mobilité auprès des métropolitains

  • un levier majeur d’accompagnement des politiques

  • une réponse à l’enjeu du financement de la mobilité pour tous, moyennant un prix abordable à la fois pour l’usager et pour les collectivités qui mettent en œuvre les solutions de mobilité.

Retour d’expérience sur la politique de stationnement de Dijon Métropole 

(Fabrice Lambert, chargé de projets mobilités et stationnement)

Le PLUi de Dijon Métropole – qui est un PLU intégré traitant, outre les enjeux d’aménagement, également ceux concernant l’habitat et les mobilités – est un projet ambitieux, qui vise entre autres à accroître la part des transports collectifs (de 13% à 20%), des modes actifs (de 3% à 12%) et des mobilités partagées tout en réduisant la part de l’auto-solisme et l’usage des modes motorisés (de 53% à 38%), sur la période 2016-2030. 

L’agglomération dijonnaise a eu une politique volontariste de regroupement des différents services de mobilité sur la métropole – y compris les offres de parking public – dans une délégation unique et globale de service public. La métropole dijonnaise devait percevoir la totalité des recettes d’exploitation de ces différents services, versant en contrepartie un forfait de charges + l’éventuel intéressement sur les recettes et la prime qualité. Lors de la présentation (avril 2023), cette approche intégrée – DSP unique transports publics + stationnement – était unique en France. 

Dijon Agglo a, par ailleurs, défini 10 secteurs résidentiels sur son ressort, tenant compte de la proximité des dessertes en TCSP et régis par des règlementations différentes en termes de limitation de durée de stationnement et de tarification.

3 parkings-relais gratuits sont, en outre, accessibles gratuitement 7j/7, 24h/24 dans l’agglomération. 
 

Présentation de la politique de stationnement de la ville de La Rochelle 

(Karen Mounier, directrice du service stationnement)

"Ne pas supprimer la voiture mais la remettre à sa juste place, tout en accompagnant le changement en offrant aux usager l’opportunité d’expérimenter une vie sans voiture." Depuis les années 1970, la ville de La Rochelle a choisi de faire des déplacements un terrain d’innovations et d’expérimentations. La ville est engagée, parallèlement, dans une démarche "Territoire zéro carbone", prévoyant la réduction de moitié de son empreinte carbone en 2030 et sa neutralité carbone en 2040.

Concernant l’organisation du stationnement à La Rochelle :

  • il y a une volonté politique d’adapter les tarifs pratiqués sur voirie en fonction des évolutions tarifaires en parkings publics (=> le stationnement en voirie est maintenu plus cher que dans un parking) ;

  • le choix a été fait d’une gestion du stationnement public en régie (pas de délégation) ;

  • 4 P+R (bientôt 5 dans la ville) existent et sont gratuits pour les abonnés au service de TC Yélo ;

  • Lancement d’une appli multi-services, « La Rochelle Au Bout Des Doigts », qui permet (depuis septembre 2023) notamment de payer son abonnement à distance et de connaître en temps réel les places de parking disponibles ;

 

La Rochelle est historiquement l’une des villes les plus favorables aux politiques cyclables en France. Dans cette optique, le vélo est pensé comme un mode de rabattement vers les transports en commun, d’où l’installation systématique de vélos-parcs proches des pôles multimodaux de l’agglomération.

La ville est d’autre part un pôle touristique très important. C’est pourquoi la municipalité et l’intercommunalité portent de concert une politique globale de stationnement visant à orienter les touristes en voiture vers les P+R.

Un exemple d’infrastructures de stationnement dynamiques, l’exemple de "Chronobus" à Nantes 

(Damien Garrigue, chef de projets)

Le réseau Chronobus concerne 8 lignes de BHNS et 90 km de liaisons au total, qui complètent les lignes de TCSP les plus structurantes de l’agglomération (3 lignes de tramway et 2 lignes "Busway").

Pour accompagner ce réseau de transport en commun, des aménagements spécifiques ont été mis en place. Une politique de stationnement a également été développée, avec notamment la création de plusieurs parkings relais le long du réseau de transport.

Les lignes Chronobus se composent de lignes de bus qui bénéficient d'un certain nombre de sections en site propre lorsqu'il est nécessaire, mais qui, la plupart du temps, circulent dans la circulation générale tout en étant assurés de circuler dans de bonnes conditions.

L'une des premières mesures prises dans les zones contraintes a été de rendre de l'espace à la chaussée en supprimant le stationnement. 

Une palette d’aménagements a été utilisée en fonction des lignes et des objectifs à atteindre :

  • Élargissements de chaussées et suppression/organisation du stationnement/livraisons,
  • Stations apaisées (couloir bus "virtuel")
  • Facilitations du franchissement des carrefours
  • Couloirs bus classiques (intégration des vélos)
  • Interruptions de couloirs bus prioritaires 
  • Sites propres /réservés
  • Couloirs de bus axiaux alternés à une voie
  • Couloirs de bus "temporels" (=> comment un espace qui a un certain usage à un moment de la journée, peut aussi se transformer en autre chose à un autre moment ; ex : des zones de stationnement où il est interdit de se garer entre certaines heures et qui devienne des lignes de bus). Voir l’exemple de la rue Grignon
  • Plans de circulation et régulations de flots

 

L’idée est d’instituer une souplesse de gestion selon l’endroit / la période considéré(e) pour pouvoir adapter l’utilisation de la voirie à une utilisation optimale des circulations (des TC, mais aussi des véhicules particuliers par exemple pour stationner à certaines heures de la journée et pas à d’autres).

Le replay :