Les maîtres d’ouvrage sont aujourd’hui confrontés à des choix difficiles, d’autant plus sur les rues dont le profil en travers est contraint : aménager des voies dédiées aux bus pour améliorer leur performance, prévoir des trottoirs accessibles, réaliser des aménagements cyclables confortables et sécurisés, maintenir des voies routières pour la desserte locale, conserver des places de stationnement, favoriser la nature en ville …
Dans certaines configurations, il est possible d’aménager un couloir bus bidirectionnel à voie unique, ce qui permet d’améliorer le niveau de service des bus avec une emprise réduite. L’espace gagné peut être redistribué aux autres usages, par exemple des aménagements pour les mobilités douces (piétons, vélos) ou pour la végétalisation.
On entend par "couloir bus bidirectionnel à voie unique", une voie dédiée aux bus, sur laquelle les bus peuvent circuler dans les deux sens.
Les 5 types de voies uniques
Afin de garantir la sécurité des usagers, le fonctionnement de cette voie bidirectionnelle doit permettre aux bus de circuler dans les deux sens en évitant tout risque de collision. Les cinq différentes règles de fonctionnement observées en Europe sont détaillées ci-dessous.
Les voies uniques gérées à vue
Dans le cas du couloir géré par conduite à vue, le conducteur peut utiliser le couloir si aucun bus ne l’utilise déjà en sens contraire. Pour que les bus puissent emprunter le même couloir, ce dernier est aménagé en site axial. Les bus accèdent et sortent de ce couloir directement sur la voie latérale ou au niveau d’un carrefour. Cet aménagement est pertinent lorsqu’il est possible de garantir de bonnes conditions de visibilité sur toute la longueur de la voie unique.
Le couloir de bus géré par feux :
Dans le cas du couloir géré par feux, le conducteur peut utiliser le couloir si le feu de circulation dédié lui autorise le passage. La voie unique peut être aménagée en site axial ou latéral. Si les conditions de visibilité ne permettent pas au conducteur de décider d’emprunter en toute sécurité le couloir bus à voie unique, il est nécessaire d’utiliser les feux pour gérer l’exploitation du site.
Le couloir de bus alterné dans l'espace :
Dans le cas du couloir bus bidirectionnel à voie unique, alterné dans l’espace, le conducteur peut utiliser le couloir sur une section prédéfinie, généralement en approche du carrefour à feu. Le couloir est séparé en deux sections, une affectée à chaque sens. La voie unique est aménagée en site axial. La séparation entre les sections affectées à chaque sens de circulation est matérialisée par du marquage au sol, une bordure ou un îlot.
Le couloir bus alterné dans le temps :
Dans le cas du couloir bus bidirectionnel à voie unique, alterné dans le temps, le conducteur peut utiliser le couloir selon l’heure de la journée. Le couloir est affecté à un sens de circulation le matin, puis à l’autre sens de circulation le soir, en fonction des remontées de file dues aux déplacements pendulaires. Une période d’une heure de non-utilisation de la voie unique en milieu de journée est préconisée pour éviter toute collision au moment du changement de sens. La voie unique peut être aménagée en site axial ou latéral, en milieu urbain et en milieu interurbain.
La voie bus dynamique à contre-sens :
Les cas précédents ont montré comment réduire l’emprise dédiée aux bus en passant de deux voies bus à une voie unique, tout en maintenant un niveau de service performant et des conditions de sécurité satisfaisantes. Mais il est même possible de créer un couloir bus sans voie dédiée aux bus. C’est le cas en Suisse avec ce concept appelé "Voie bus dynamique à contresens" ou "Contra-flow" : sur une route bidirectionnelle à deux voies de circulation, un système dynamique de capteurs et de feux permet d’arrêter la circulation dans les deux sens pour permettre au bus de dépasser la remontée de file. C’est un concept adapté à une voirie avec trafics pendulaires ; il est aussi nécessaire que la voirie principale soit peu ou pas interrompue par des voies entrantes sur les sections concernées. Ce type d’aménagement est actuellement à l’étude en France
Sur un même réseau, voire sur un même axe, on observe que plusieurs modes de gestion des voies uniques peuvent être combinés selon les contraintes et spécificités de l’infrastructure.
Création d'un groupe de travail international
Les retours d’expérience et préconisations sont basés sur l’analyse de plusieurs sites, répartis sur différents réseaux, en France et en Europe. Certains de ces aménagements étant innovants, les retours d’expérience sont peu nombreux.
La Semitan, Nantes Métropole et le Cerema ont copiloté et animé un groupe de travail et d’échange international (francophone) associant des exploitants de transport en commun et des autorités organisatrices de la mobilité (AOM), ainsi que le GART, l'UTPF - Union des Transports Publics et Ferroviaires et l'UITP – Union Internationale de Transport Public.
Ce groupe, qui s’est réuni 10 fois entre 2021 et 2024, a étudié des exemples européens et internationaux, avec différentes solutions selon le contexte.
Publication de la fiche IUTCS
Ce partage de retours d’expérience a permis de rédiger la fiche technique n°12 de la série IUTCS (insertion urbaine des transports collectifs de surface), publiée en septembre 2024. Ces travaux étant particulièrement suivis à l’étranger, avec un intérêt marqué de l’UITP (Union Internationale des Transports Publics), cette fiche a été traduite en anglais et publiée en mai 2025.
Ce travail international a été récompensé en 2025 par le "prix de reconnaissance spéciale" dans le cadre des UITP Awards 2025 (catégorie excellence opérationnelle). La création d’un groupe d’échange anglophone est en cours, afin de recueillir davantage de retours d’expérience et de développer cette innovation à l’étranger.