Le 17 juin 2025, la rencontre régionale de l'aménagement Hauts-de-France sur le thème "Comment faire la ville avec et pour les habitants à l’heure du changement climatique?" a eu lieu à Fourmies, une commune engagée sur ces sujets, en lien avec la démarche régionale Rev3 et plus récemment les démarches d’adaptation à propos desquelles le Cerema et la ville sont partenaires.
Une journée riche en partage, enseignements, et pistes de solutions concrètes organisée par Olivier Dupré et Catherine Bocquet de la Direction territoriale Hauts-de-France : près de 50 représentants de collectivités, de l’État, d’établissements publics, de bailleurs, d’associations, de professionnels de l’urbanisme et de l’innovation sociale et partenaires ont répondu présents pour partager leurs expériences et monter collectivement en compétence sur ce sujet clef de la participation citoyenne dans les projets liés au changement climatique, dans les espaces urbains comme ruraux.
Mickaël Hiraux, président de la communauté de communes sud Avesnois et maire de Fourmies, Antoine Lebel, directeur du Cerema Hauts-de-France et Lionel Hermange, responsable du pôle aménagement de la DREAL ont ouvert la rencontre.
La participation, un projet dans le projet
Géraldine Geoffroy du pôle participation du Cerema, est intervenue en début de matinée en vue de partager des repères théoriques et réglementaires essentiels sur la participation citoyenne. Dressant un bref historique de l’émergence de cette préoccupation autour notamment de textes fondateurs, elle a explicité les apports d’une telle démarche, que ce soit en termes de connaissance enrichie, de développement de pratiques démocratiques mais aussi de pertinence des choix d’orientation des projets.
L’attention à porter au cadre des démarches participatives apparaît comme un facteur de réussite : enjeu et périmètre de la participation, modalités et temporalité, contexte et parties prenantes… L’importance d’adapter les modalités de participation à la variété des publics a également été rappelée. Loin d’être un supplément d’âme des projets, la participation doit donc être pensée comme un projet dans le projet. Le pôle participation du Cerema développe une expertise et des ressources (comme la boussole de la participation) pour les acteurs qui souhaitent s’engager en ce sens.
Le site de la boussole de la participation, un guide pour mener des démarche participatives :
>> Boussole de la participation
Retours d'expériences régionaux
Second témoignage de la journée, Théo Hudelle a exposé en tant que chef de projet pour le bureau d'études VoixActive trois exemples concrets de démarches participatives, dans trois contextes très différents :
La concertation en ruralité sur des documents cadres : PLUiHM du Ternois- L’engagement citoyen en ruralité : Stratégie déchet du Pays-de-Lumbres
- La parole des habitants dans les projets d’aménagement : Cité Crombez à Noyelles-Godault
Il a conclu son propos en dressant trois enseignements principaux de ces démarches : d’abord l’importance d’adapter les formats de concertation au contexte, avec parfois un panachage des dispositifs, ensuite l’enjeu de créer une dynamique de confiance, et enfin l’attention à porter au pilotage agile et évolutif : il faut savoir changer d’option lorsque le dispositif imaginé initialement s’avère inefficace.
Nathalie Pitaval, Directrice de projet urbanisme mobilité au Cerema, a ensuite témoigné de son expérience ancienne sur le pays de Lumbres, initiée à l’occasion de l’élaboration du PLUI adopté en 2019 et poursuivie au-delà. Plus de 2 000 participants ont été recensés sur l’ensemble des initiatives organisées autour du projet de territoire : exposition, enquêtes en porte à porte, réunion publique, concours photo, ateliers en milieu scolaire…
Cette culture du territoire l’a conduit à candidater avec le Cerema au projet européen "Mobility Makers" lancé en 2023 et faisant du pays de Lumbres un terrain d’expérimentation pour une recherche-action : ce sont ainsi 5 volontaires âgés de 13 à 25 ans et 5 volontaires de plus de 65 ans qui ont été retenus pour tourner un film documentaire sur les changements de comportements de mobilité. Loin d’être une fin en soi, le film est un support de mobilisation citoyenne pour questionner et faire évoluer les pratiques quotidiennes de mobilité, avec de nombreuses projections prévues sur le territoire et au-delà.
"Faire avec et pour"
Pour poursuivre cette matinée, Éléonore Drouet, chargée de mission "Territoires en Transitions" au CERDD (Centre Ressource du développement durable des Hauts de France) était invitée à témoigner de l’action du CERRD en matière de participation citoyenne, dans le contexte du changement climatique. Elle est d’abord revenue sur les impacts du changement climatique en Hauts-de-France, avec par exemple 40% de la surface régionale exposée fortement et moyennement au phénomène de Retrait et Gonflement des Agiles, ce qui représente 1 million de maisons, principalement situées dans l’Oise et le Nord.
Puis, elle a développé l’enjeu de "faire avec et pour" et donc de concilier réponse aux défis climatiques (atténuation et adaptation) et aux besoins sociétaux. "Faire avec" permet d’une part de mobiliser l’expertise d’usage, précieuse pour le diagnostic, la conception et l’application de solutions adaptées et, d’autre part, de favoriser une montée en compétence permettant aux acteurs de gagner en autonomie et de transformer leurs pratiques. Enfin, elle a conclu son intervention par une présentation des ressources du CERDD en matière de participation et de changement climatique.
Enfin, Marie Henneron, Directrice REV3 Ville de Fourmies, a conclu la matinée en illustrant la manière dont la commune aborde avec pédagogie et créativité le sujet complexe et parfois anxiogène du changement climatique auprès des habitants. À partir notamment de l’exemple de la co-conception du quartier REV3, du projet "Nouvelles Voi-es-x de la Transition" qui propose à des jeunes d’enregistrer podcasts et journal télé à partir de leur vision de l’avenir, ou encore du projet en cours avec le Cerema sur territoires adaptés à +4°C, elle a témoigné de l’importance du portage politique du sujet de la participation, de l’enjeu d’ancrer cette culture dans le temps long, et de la manière dont la participation bouscule aussi les pratiques et perception des professionnels "experts".
Après la pause déjeuner, un atelier participatif était proposé aux participants : répartis en trois groupes, ils étaient invités à lister collectivement les enseignements de la matinée, à identifier d’éventuelles autres ressources et expériences à partager, à lister des sujets connexes à approfondir ou encore à exprimer leurs besoins et suggestions pour de prochaines actions d’animation régionale. Nous remercions les présents d’avoir activement joué le jeu.
Principaux enseignements :
Sujets à approfondir :
- Valorisation des expériences de concertation et capitalisation des apprentissages, y compris des échecs.
- Concertation dans des contextes spécifiques : copropriétés, tissu pavillonnaire, croisement de publics différents.
- Permettre à tous de s’exprimer face aux inégalités dans la prise de parole en public.
- Gestion des contraintes organisationnelles et de la sur-sollicitation.
- Évaluation d’impact : définition d’indicateurs pertinents pour mesurer l’efficacité des démarches.
Besoins et suggestions pour la suite
- Formation et sensibilisation des élus et techniciens à la participation citoyenne.
- Valorisation des témoignages d’habitants pour inspirer et motiver.
- Production de fiches outils détaillées pour faciliter la mise en œuvre des démarches.
- Comment le changement climatique et ses spécificités questionne-t-il la participation, face à son déni ou sa relativisation mais aussi face à l’éco-anxiété ?
- Évaluation rigoureuse des actions menées, avec des critères clairs et partagés.
Enfin, des participants en ont profité pour exprimer leur enthousiasme sur l’évènement : "Une journée vitamine qui permet la prise de contacts d’autres acteurs et partenaires", "c’était fourmidable !".
L’après-midi s’est conclue par la visite du tiers-lieu "Le Central" : ancien supermarché, ce bâtiment accueille désormais un fablab, un repair-café, des espaces de coworking, un studio d'enregistrement et une salle de répétition, ainsi qu'un restaurant... Les habitants et visiteurs sont guidés par des médiateurs et ont accès notamment à des salles de réunion et des machines orientées vers le réemploi. Véritable outil d’échange et d’innovation citoyenne, ce tiers lieu rayonne aujourd'hui bien au-delà de la ville.
