10 juillet 2025
Covoiturage
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Le 26 juin dernier, le rendez-vous mobilité du Cerema était dédié à la mesure et la connaissance du covoiturage : l’occasion de revenir sur les nombreuses questions que soulève la définition du covoiturage, de présenter les derniers outils de mesure développés et de découvrir des études et dispositifs locaux de diagnostic des pratiques de co-voiturage.

Mesurer le covoiturage soulève de nombreuses questions : que recouvre exactement cette pratique (trajets organisés via une plateforme, en famille, entre collègues ou amis) ? Les dispositifs publics mis en place pour favoriser le développement du covoiturage révèlent-ils des usages déjà existants, ou induisent-ils de nouveaux comportements ? Comment distinguer un véritable effet de levier d’un effet d’aubaine ?

 

Outils existants, évolutions récentes et perspectives

Pour tenter de répondre à ces questions, plusieurs outils de mesure et de connaissance existent ou sont en cours d’expérimentation. La première partie du webinaire a permis de revenir sur l’ensemble de ces dispositifs, en suivant une logique d’entonnoir : commencer par les outils donnant une connaissance la plus générale (le taux d’autosolisme sur un axe) pour aller vers des dispositifs destinés à la mesure d’une pratique spécifique (le covoiturage intermédié recensé dans le registre de preuve de covoiturage).

Tout d’abord, Fabrice Reclus a présenté le dispositif expérimental en cours de déploiement par le Cerema : 3 sites de mesure du nombre d’occupants des véhicules vont être utilisés auprès de 3 collectivités territoriales adhérentes au Cerema (conseil départemental de l’Ain, Rouen Métropole et Angers Métropole/conseil départemental du Maine-et-Loire). L’objectif in fine sera de construire une série d’indicateurs (taux d’autosolisme, taux d’occupation des véhicules) chaque mois et d’alimenter l’observatoire national du covoiturage de la DGITM.

En réponse à une question posée, Fabrice Reclus a précisé qu’un travail était en cours avec l’UGAP pour que le marché "Territoires de demain" permette aux collectivités d’acquérir le même type d’instrumentation dans les prochains mois.

 

Leïla Aissaoui et Brice Boussion ont ensuite développé comment les enquêtes de mobilités, dispositifs de quantification de la mobilité quotidienne au niveau national (EMP) et local (EMC²), pouvaient apporter des éclairages intéressants sur la pratique du covoiturage : d’abord en permettant de suivre les évolutions sur le temps long qui montre combien la possession puis l’usage de la voiture se sont progressivement individualisés au cours du temps, puis en apportant une compréhension fine des motifs de déplacements à plusieurs : les voitures se remplissent surtout le weekend, pour des déplacements à destination du loisir. 

L’accompagnement concerne par ailleurs 1/3 des déplacements partagés en voiture. Sur certains territoires où une question spécifique a été posée lors de la mise en œuvre de l’EMC², on apprend par ailleurs qu’un conducteur sur dix transporte des passagers qui ne sont pas de leur ménage un jour moyen de semaine.

La présentation :

Le transport de passagers n’appartenant pas à son ménage, c’est aussi la définition que prend l’Ademe lorsqu’elle enquête sur les pratiques informelles de covoiturage. Mathieu Chassignet est venu présenter les résultats de la dernière enquête sur le covoiturage, réalisée en 2024, et permettant de mieux comprendre les usages de toutes les formes de covoiturage : informel, intermédié, lignes de covoiturage, autostop organisé. 

L’enquête permet par exemple d’aborder les motivations des covoitureurs, qui sont principalement les économies financières et la convivialité, ou les incitations possibles pour les non covoitureurs, qui sont la réduction des frais, la flexibilité et davantage de simplification des processus de mise en relation. L’enquête permet aussi de quantifier les effets de report modal : ainsi, 56% des passagers de covoiturage auraient pris leur voiture en cas du covoiturage impossible.

En réponse à une question, Mathieu Chassignet a développé la méthode de calcul des émissions de GES évitées grâce au covoiturage : en cas de covoiturage, environ un quart des émissions de GES émises dans une situation de référence sans covoiturage, est évité.

 

La présentation :

Flux de covoiturage / Observatoire du covoiturage

Enfin, Eric Jeannière est venu présenter l’observatoire du covoiturage de la DGITM et notamment le registre de preuve de covoiturage qui valide et certifie la preuve de trajet covoituré via une plateforme. L’observatoire du covoiturage recense aussi l’ensemble des politiques d’incitation mises en œuvre par les collectivités territoriales, et la base nationale des lieux de covoiturage.

En réponse à une question, Eric Jeannière a précisé que les données du RPC sont disponibles à plusieurs échelles : communale, EPCI, départements ou régions, en origine et/ou destination. Il est possible d’avoir des données de localisation de l’origine et de la destination des trajets covoiturés de manière encore plus fine grâce aux données ouvertes disponibles sur data.gouv.  Une deuxième question a été posée sur l’effet d’aubaine : comment savoir si les personnes recensées sur le RPC sont des nouveaux covoitureurs ou non ? Aucune donnée ne permet de connaître les logiques individuelles et les pratiques antérieures ; en revanche, il est possible d’analyser la fréquence et la régularité des trajets d’une même personne, permettant d’analyser l’ancrage du covoiturage chez cette personne.

La présentation :

Retours d’expérience de collectivités : diagnostic des pratiques et suivi de leurs politiques de covoiturage

La deuxième partie du webinaire a été consacrée à des retours d’expériences et d’études locales.

Lorenzo Joncheray et Lucas Montbuleau-Gentelet ont présenté l’étude réalisée par le Cerema pour le compte du Syndicat des Mobilités de Touraine. Cette étude avait pour objectif de proposer un schéma de lignes de covoiturage sur le périmètre du SMT. Après avoir réalisé un benchmark français des lignes réussies, le Cerema a mis en œuvre une méthode basée principalement sur les données du recensement de l’Insee et de l’EMC² pour tracer les itinéraires de ces lignes et positionner les arrêts de covoiturage. Une affectation sur le réseau routier des pratiques existantes recensées dans le RPC a permis de fiabiliser et adapter ces lignes à un potentiel théorique.

En réponse à une question, Lorenzo Joncheray a développé une méthode expérimentale de mesure de la fréquentation des aires de covoiturage, basée sur une extraction d’images aériennes.

Enfin, Arnaud Saillet a présenté les travaux du SMMAG pour suivre l’évolution du covoiturage sur un territoire où de nombreux dispositifs existent déjà : lignes de covoiturage Mcovoit’ Lignes +, une application de mise en relation Mcovoit’ RDV, et de l’autostop organisé Mcovoit’ Pouce. Une synthèse est notamment réalisée régulièrement pour agréger l’ensemble des résultats : nombre de trajets réalisés par plateforme (RPC) et leurs caractéristiques (horaires, distances, principales origines/destinations). Afin de mieux comprendre les motivations et freins, une enquête spécifique auprès des usagers a été réalisée et permet de mieux comprendre les attentes des usagers, et les freins à basculer de conducteur à passager.

En réponse à une question, Arnaud Saillet a précisé qu’il était complexe de mesurer l’éventuelle concurrence que représenterait une ligne de covoiturage par rapport aux transports en communs. En revanche, l’effet de report des transports en commun vers les lignes de covoiturage est bien réel en cas d’évènements exceptionnels rendant les transports en commun inopérants.

 

La présentation :

Le replay :

 

Dans le dossier Les Rendez-vous Mobilités du Cerema

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