4 septembre 2025
Aire de covoiturage dans le Rhône
B. Daval - Cerema
Organisée par la cellule régionale France Mobilités en Auvergne-Rhône-Alpes, la journée "Covoiturage et autopartage : comment renforcer les usages partagés des véhicules ?" s'est déroulée le 20 février 2025 à l'Institut d’Auvergne-Rhône-Alpes du Développement des Territoires à Clermont-Ferrand. L'événement a rassemblé plus d'une centaine de personnes.

Les cellules régionales France Mobilités accompagnent le déploiement de services de mobilité dans les territoires peu denses : territoires ruraux, villes petites et moyennes, espaces périurbains des agglomérations. En Auvergne-Rhône-Alpes, la cellule régionale France Mobilités regroupe le Cerema, l'ADEME, la Banque des Territoires, l'ANCT, la DREAL et la Région. Elle intervient en soutien des projets de mobilités des collectivités, pour capitaliser les connaissances sur les projets locaux et pour animer l'écosystème régional de la mobilité

C’est dans cette dynamique que la cellule régionale France Mobilités Auvergne-Rhône-Alpes a organisé une journée dédiée à la promotion de l’autopartage et du covoiturage en Auvergne-Rhône-Alpes. L’événement visait à renforcer la coopération entre acteurs du territoire en valorisant des retours d’expériences concrets. Près d’une trentaine d’intervenants, représentants de collectivités, d’associations, d’employeurs ou d’acteurs économiques, ont partagé des initiatives variées : services d’autopartage en boucle, entre particuliers ou en entreprise, lignes de covoiturage, aides financières à la pratique, covoiturage solidaire, autostop organisé ou encore aménagement d’aires dédiées.

 

L'autopartage et le covoiturage : éléments de contexte

Stationnement dédié à l'autopartage à Lille - Cerema

En introduction de la journée, la Direction Générale des Infrastructures, des Transports et de la Mer (DGITM) a rappelé les grandes orientations du plan national "Covoiturage du quotidien", dont l’objectif est d’atteindre 3 millions de trajets covoiturés par jour d’ici 2027, contre moins d’un million en 2022. Pour atteindre cette cible, le plan repose sur plusieurs mesures structurantes : 

  • un soutien financier de l’État aux covoitureurs, en complément de l’aide apportée par les collectivités locales ;
  • une prime de 100 € destinée aux conducteurs débutants ;
  • la mobilisation du Fonds Vert pour accompagner les projets portés par les territoires.

Deux ans après son lancement, ce plan a permis d’impulser une dynamique, favorisant la structuration des politiques locales en matière de covoiturage : aménagement d’aires de covoiturage, déploiement de campagnes d’incitations financières, aménagement de voies réservées au covoiturage, création de lignes de covoiturage… Le nombre de trajets réalisés via les plateformes de covoiturage a plus que doublé en deux ans, atteignant désormais 900 000 trajets par mois. 

La DREAL Auvergne-Rhône-Alpes a précisé que le Fonds Vert a déjà financé un grand nombre de projets de covoiturage dans la région, en particulier dans les départements de la Savoie, de la Haute-Savoie, de l’Ain et du Rhône. À ce jour, près de 40 campagnes d’incitations financières ont pu être soutenues, ainsi que des projets d’aménagement d’aires de covoiturage, de création de lignes de covoiturage ou encore de réalisation d’études préalables à la mise en œuvre de services. La reconduction en 2025 de la mesure dédiée au covoiturage du Fonds Vert permettra d’accompagner cette dynamique.

Enfin, cette dynamique régionale s’inscrit pleinement dans les objectifs de la feuille de route 2030 de la COP Auvergne-Rhône-Alpes, qui prévoit notamment le développement d’infrastructures dédiées au covoiturage et à l’autopartage, en cohérence avec les thématiques abordées lors de cette journée.

 

Autopartage et covoiturage : quels rôles pour les employeurs ?

En introduction, la DGITM a présenté le Forfait Mobilités Durables (FMD), qui permet aux employeurs de prendre en charge les frais de transport personnels de leurs salariés pour leurs trajets domicile-travail, à condition qu'ils utilisent des moyens de transport alternatifs tels que le covoiturage, l'autopartage ou le vélo. Selon le Baromètre du FMD de 2024, près de 30 % des employeurs ont mis en place ce dispositif, avec un montant maximum moyen de 420 € par salarié.

Les interventions suivantes ont montré comment les collectivités peuvent encourager l'usage des modes de transport partagés pour les déplacements domicile-travail. La Région Auvergne-Rhône-Alpes propose la plateforme de covoiturage MOV’ICI pour faciliter la mise en relation entre conducteurs et passagers. Mobicoop et l'association Covoiturage Auvergne, prestataires de la Région, ont précisé que MOV'ICI est mise à disposition gratuitement pour les collectivités locales et les employeurs, et est sans frais de commission pour les usagers.  350 communautés de covoiturage regroupent les habitants d'un territoire ou les salariés d'une entreprise ou d'un groupe d'entreprises. Des outils de communication et d’animation personnalisables sont disponibles pour promouvoir le covoiturage, et une animation terrain est assurée pour chaque communauté afin d'accompagner les salariés dans ce changement de comportement.

La Communauté d’agglomération de Privas Centre Ardèche a mis en place plusieurs services de mobilité sous la marque T'CAP. Le service d’autopartage en boucle T'CAP d'autopartager, soutenu par l'AMI TENMOD et opéré par CLEM, propose trois véhicules électriques en libre-service depuis 2021. Ce sont près de 400 réservations qui ont été réalisées en 2024. Le dispositif d'autopartage entre particuliers, déployé depuis septembre 2024 avec l’opérateur CARTAGE, connaît quant à lui des résultats plus modestes avec une trentaine de demandeurs en 6 mois. 

Depuis 2023, l'agglomération propose également une incitation financière au covoiturage T'CAP de covoiturer, soutenue par le Fonds Vert et opérée par Karos. Elle permet aux administrations et entreprises adhérentes de proposer à leurs salariés des trajets domicile-travail à très faible coût. Enfin, 50 points d'arrêt T'CAP de faire de l'autostop ont été installés dans des zones peu desservies pour faciliter le contact entre conducteurs et autostoppeurs.

Deux témoignages ont illustré le rôle des employeurs dans la promotion du covoiturage. Michelin a lancé un service de covoiturage pour aider ses collaborateurs dans leurs déplacements quotidiens, avec l'objectif de réduire l'autosolisme et l'empreinte carbone des trajets pendulaires. Depuis mars 2023, Michelin propose ce service à ses salariés via l'opérateur Karos, et a instauré un forfait mobilités durables de 800 € par an. Le succès de cette initiative repose sur l'implication d'un référent covoiturage, une communication régulière, des animations sur les différents sites et une incitation financière.

Enfin, le Département de l’Ardèche a mis en place un service d’autopartage de ses véhicules professionnels. Généralisé depuis octobre 2024 après trois ans d'expérimentation, ce dispositif permet aux agents du Département d’utiliser les véhicules professionnels le soir et le weekend pour leurs usages personnels. Les véhicules sont équipés de boîtes à clés et sont accessibles via un logiciel interne de réservation. Les agents paient le coût réel d'usage du véhicule, soit 0,26 € par km pour un véhicule léger. Ce dispositif vise notamment à permettre aux agents de se séparer de leur second véhicule, souvent polluant et peu utilisé. 

Les services d'autopartage

Cette seconde partie de la matinée a été consacrée à différents services d'autopartage mis en place dans les territoires ruraux ou peu denses. Porté par des structures variées comme des collectivités, des Parcs Naturels Régionaux, des associations ou des employeurs, souvent avec l’appui de prestataires spécialisés, l’autopartage permet de repenser l'utilisation de la voiture personnelle. Les présentations ont permis d’illustrer les formes variées que peut prendre l’autopartage : autopartage en boucle, en free-floating, entre particuliers ou en entreprise.

Crédit : Libelul autopartage

Les premières interventions ont porté sur les services d’autopartage en boucle. L’association Dromolib, en collaboration avec l’opérateur Clem, a présenté le service Libelul autopartage, expérimenté à partir de 2023 sur les territoires de la communauté de communes du Crestois et du Pays de Saillans et de la Communauté de communes Val de Drôme en Biovallée. Ce service repose sur quatre véhicules électriques en boucle, accessibles 24h/24, et a rencontré une bonne adhésion des habitants : 160 usagers sont inscrits, réalisant en moyenne une cinquantaine de trajets par mois. 

À la suite de cette expérimentation, les deux communautés de communes prévoient de reprendre directement l’exploitation du service, en conservant son fonctionnement actuel. L’opérateur Clem a ensuite présenté son retour d’expérience sur les facteurs territoriaux favorables au développement de l’autopartage. D’après son analyse, plus de 12 000 communes présentent des caractéristiques propices à l’implantation de ce type de service.

De son côté, l’opérateur Citiz a souligné l’importance d’intégrer l’autopartage aux pôles de mobilité, notamment en lien avec les gares et les réseaux de transport en commun. L’entreprise privilégie le modèle de l’autopartage en boucle, qu’elle adapte à la fois aux territoires urbains et ruraux. Le Parc Naturel Régional (PNR) du Pilat a ainsi mis en place dès 2013 un service d’autopartage en libre-service, en partenariat avec Citiz. Des collaborations avec des établissements publics comme un hôpital ou un office de tourisme ont permis d’atteindre des taux d’utilisation satisfaisants. Un troisième véhicule est envisagé pour répondre à la demande. Le PNR développe également l’autopartage entre particuliers : six groupes d’autopartage sont aujourd’hui actifs, et ce nombre est amené à croître.

La suite des échanges a porté sur l’autopartage entre particuliers. L’Agence Locale de l’Énergie et du Climat de l’Ardèche (ALEC07) a présenté son accompagnement des initiatives citoyennes sur le sujet, en insistant sur l’importance de la communication, de la sensibilisation et du soutien de proximité auprès des habitants. Le Syndicat Mixte des Transports en Commun (SMTC) de l’agglomération clermontoise a partagé son retour d’expérience sur le service Mon auto partagée, lancé en 2017 avec le soutien de l’ADEME, et pérennisé en 2020. Sa gestion a été confiée à l’association Covoiturage Auvergne. En 2025, 15 véhicules sont disponibles en autopartage sur le territoire du SMTC.

La coopérative Mobicoop a présenté quant à elle la solution Coloc’Auto, un dispositif qui propose des outils et un accompagnement pour les territoires souhaitant développer l’autopartage entre particuliers.

L’autopartage apparaît ainsi comme une réponse pertinente pour repenser l’usage de la voiture individuelle et encourager des mobilités plus durables, y compris dans les territoires peu denses. La diversité des initiatives présentées témoigne de la richesse des approches possibles, tout en mettant en évidence le rôle essentiel de l’accompagnement et de la coopération entre acteurs locaux.

Les services de covoiturage

Présentation du service CovoitSolidaire à Saint-Eloy - Crédit : Pays de Saint-Eloy

Cette séquence ciblait les services mis en place par les collectivités pour faciliter et amplifier les usages du covoiturage. Les deux premières interventions ont permis d'aborder les politiques d'incitations financières au covoiturage.

Dans un premier temps, l’Assemblée de Pays Tarentaise Vanoise (APTV), syndicat mixte regroupant les cinq intercommunalités de la vallée de la Tarentaise en Savoie, a partagé son retour d’expérience sur la mise en place d’un dispositif d’incitations financières au covoiturage. Inspirée d’une initiative lancée par Métropole Savoie, l’ensemble des intercommunalités du département ont adopté une incitation harmonisée, opérée par Blablacar Daily, offrant la gratuité pour les passagers. L’Agence Écomobilité Savoie Mont-Blanc a assuré l’animation et la communication autour du dispositif, tandis que Mobicoop a contribué à l’organisation des événements. Deux ans après le lancement, le coût de l’incitation est estimé à 20 000 € par an et par intercommunalité. Grâce à un cofinancement à hauteur de 50 % par le Fonds Vert, cette politique apparaît accessible financièrement. L’APTV souligne l’importance de la gratuité pour les passagers et d’une animation régulière, particulièrement dans les zones mal desservies par les transports en commun.

Le Syndicat Mixte des Transports en Commun (SMTC) de l’agglomération clermontoise a présenté son approche du covoiturage, ciblant principalement les autosolistes sur les trajets domicile-travail. Cette stratégie repose sur un programme d’aides financières lancé en 2024 sur la plateforme régionale MOV’ICI. L’objectif est de rendre le covoiturage plus attractif que perçu initialement, pour encourager un changement durable des habitudes. Le dispositif comprend deux volets : un volet gratification (5 € versés à un conducteur publiant un trajet régulier pendant 30 jours ou plus) et un volet incitations (1,50 € pour chaque mise en relation réussie, avec un coût de 0,10 €/km pour le passager). Une campagne de communication a accompagné le lancement, la constitution d’une masse critique d’utilisateurs restant un défi majeur.

Parmi les outils visant à massifier l’usage du covoiturage, les lignes de covoiturage constituent une solution hybride entre auto-stop organisé et transport en commun. La Communauté de communes Cœur de Savoie a ainsi mis en place la ligne onCovoit à la fin de l’année 2021. Ce service relie une gare TER à une zone enclavée via un itinéraire de 10 km comportant cinq arrêts, fonctionnant de 6h30 à 20h dans les deux sens. Les réservations peuvent être faites via application, SMS ou téléphone. Les conducteurs reçoivent une indemnisation (0,50 € par trajet proposé ou 1 € en cas de prise en charge effective), tandis que les passagers voyagent gratuitement. Une garantie de prise en charge est proposée aux heures de pointe après 20 minutes d’attente. L’opérateur Ecov, en charge de l’exploitation, gère les réservations, la prévention contre la fraude et l’animation du service. Une communication renforcée (présence aux arrêts, actions en entreprise, stands sur les marchés, supports digitaux…) accompagne le dispositif. Depuis l’automne 2024, environ 150 trajets sont réalisés chaque mois. Le coût annuel pour la collectivité est d’environ 80 000 €.

Enfin, la Communauté de communes du Pays de Saint-Éloy, située en zone rurale au nord-ouest du Puy-de-Dôme, a présenté le dispositif de covoiturage solidaire Covoit’Solidaire. Ce service vise à accompagner les personnes en situation de précarité ou d’isolement n’ayant pas de solution de mobilité. Il repose sur l’engagement de conducteurs bénévoles, qui utilisent leur véhicule personnel ou l’un des deux véhicules mis à disposition par la collectivité. Lancé en 2019 grâce à l’AMI TENMOD et initialement limité aux déplacements liés à la santé, le service a été élargi en 2024 à d’autres motifs. Néanmoins, le manque de conducteurs disponibles entraîne actuellement des listes d’attente pour certains bénéficiaires.

Ces différentes initiatives montrent que le covoiturage, sous ses diverses formes (incitations financières, lignes dédiées, covoiturage solidaire…) constitue un levier pertinent pour renforcer la mobilité durable, notamment dans les territoires peu denses. Leur réussite repose sur des outils adaptés, un accompagnement de proximité, et l’implication conjointe des collectivités et des acteurs de terrain.

Les infrastructures pour le covoiturage

Réseau Start pour le covoiturage dans la région de Rennes. Crédit : STARR

En complément des services de covoiturage, le développement des usages partagés des véhicules repose également sur l’aménagement d’infrastructures dédiées. Cette séquence a mis en lumière plusieurs initiatives locales visant à promouvoir le covoiturage à travers des aménagements spécifiques.

Le Syndicat Mobilités des Territoires de l’Aire Métropolitaine Lyonnaise (SMTAML) a élaboré en 2022 un Schéma de Développement des Aires de Covoiturage (SDAC), en réponse à une obligation issue de la Loi d’orientation des mobilités de 2019. Ce schéma a nécessité un important travail de recensement de l’existant et de concertation avec les acteurs du territoire. Son objectif est de fournir aux collectivités une vision claire du réseau actuel, accompagnée d’outils pour en faciliter le développement ou l’amélioration. Le SDAC est enrichi par une "Charte des Aires de Covoiturage" visant à améliorer la qualité des aménagements et à harmoniser les politiques à l’échelle métropolitaine. Trois cahiers en constituent le socle : un diagnostic du réseau, des recommandations pour les aménagements et équipements, et une méthode pour identifier et hiérarchiser les sites à développer. 

Dans la continuité de cette démarche, le SMTAML a lancé en 2024 une enquête qualitative et quantitative sur deux ans, afin d’évaluer l’usage des aires existantes, de mieux connaître les profils d’usagers et de recueillir leurs attentes.

Saint-Flour Communauté, dans le cadre d’une délégation de compétence de la Région Auvergne-Rhône-Alpes, mène également une politique active en faveur du covoiturage. Six aires ont ainsi été aménagées entre 2017 et 2019. Une enquête menée en 2024 a permis de dresser un état des lieux des pratiques et d’élaborer un plan d’action structuré en trois axes : l’amélioration des installations existantes (meilleure signalétique, bornes de recharge, évaluation régulière), la création de nouveaux services (communauté de covoiturage sur Mov’ici, pôle d’échanges multimodal à la gare de Saint-Flour), et une communication renforcée pour accroître la visibilité des aires.

La Communauté de Communes du Massif du Sancy a, quant à elle, présenté une initiative originale pour mieux repérer les lieux d’autostop ou de covoiturage spontané : Halt Ô Stop, une solution low-tech et gratuite, sans inscription, adoptée par la collectivité. Elle repose sur des panneaux en bois permettant aux passagers d’indiquer leur destination parmi une liste préétablie. Le déploiement du dispositif, réalisé avec l’aide de jeunes en service civique, s’est articulé en trois étapes : analyse des besoins, installation de panneaux supplémentaires et finalisation du maillage territorial. Aujourd’hui, une vingtaine de points sont équipés, et d’autres implantations sont à l’étude. L’un des enjeux majeurs est désormais de mieux comprendre les usages de ce service.

Ces différentes initiatives témoignent de la diversité des approches pour favoriser le covoiturage et développer la mobilité partagée, en tenant compte des besoins spécifiques de chaque territoire et de leurs usagers.


La cellule régionale France Mobilités Auvergne-Rhône-Alpes poursuivra ses actions d’animations en 2025, avec une journée consacrée aux mobilités solidaires et inclusives prévue à Lyon en fin d’année.

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