A destination des élus et de leurs équipes, le Cerema présente dans un document de la collection Les Essentiels, "Climat, l'urgence à s'adapter", une approche pour intégrer le besoin d'adaptation dans les stratégies de territoire, et comment mettre en oeuvre une dynamique résiliente. Nicolas Beaurez, responsable de la mission Résilience-Transitions-Climat, répond à 3 questions sur les enjeux de résilience des territoires.
Pourquoi le Cerema publie-t-il ce document à destination des élus ? Quelle est l’approche du Cerema sur ce sujet ?
On observe une prise de conscience des collectivités sur les enjeux d’adaptation au changement climatique, du fait de l’actualité d’une part, parce que les élus et les habitants voient les impacts réels du changement climatique d'autre part. Avec des problématiques différentes, mais qui sont de plus en plus marquées : recul du trait de cote, déficit d’enneigement, sécheresses, qui ont impacts sur l’ensemble des territoires. Il y a aussi le rapport du GIEC qui confirme l’urgence à agir.
L’objectif de cet Essentiel est de présenter une approche intégrée, qui consiste à identifier l’ensemble des composantes du territoire, l’ensemble des activités qui vont être impactées. Cette approche permet aussi de prendre en compte les effets domino, qui peuvent amplifier davantage la vulnérabilité du territoire : par exemple un déficit d’enneigement a un impact sur le tourisme, qui a un impact sur l’économie, le logement, l’attractivité…
Nous voulons aussi montrer que la démarche doit être systémique : l’adaptation au changement climatique n’est pas une question parmi d’autres, elle nécessite d’interroger tous les sujets, tous les projets. C’est une question chapeau qui doit être au cœur de tout projet, de toute action.
Il faut se demander si l’aménagement, la construction qu'on réalise va être adapté à un climat plus chaud, plus sec, à davantage d’intempéries ? Cela fait écho au sujet de l’atténuation des impacts au changement climatique qui implique de réfléchir à l’impact à long terme et à rechercher in fine la sobriété.
L’autre message essentiel est celui des co-bénéfices : rechercher l’adaptation d’un territoire aux impacts du changement climatique, c’est mener des actions comme la maîtrise de la biodiversité, la gestion des eaux pluviales à la parcelle, le développement de l’économie circulaire… Ces démarches apportent de nombreux bénéfices.
Quels sont les outils pour permettre à une collectivité de se saisir de la question et d’établir une stratégie en cohérence avec ses besoins ?
Ces outils sont de plusieurs ordres, et ils peuvent être utilisés pour mener une démarche par étapes. D’abord il faut comprendre le sujet et ses implications pour le territoire. Le Cerema propose pour cela différents outils de sensibilisation destinés à permettre aux conseils et services municipaux de comprendre la complexité du sujet.
Ensuite on peut utiliser les outils de l’intelligence collective et la mobilisation de tous les acteurs, pour établir une transversalité dans la réflexion. Ces acteurs doivent donc s’approprier les différents enjeux pour pouvoir agir.
Ce sont là les premières briques de la démarche. L’étape suivante est de réaliser un premier diagnostic des vulnérabilités du territoire et de ses composantes par rapport à une série d’enjeux liés au changement climatique, pour savoir quelles activités, quelles composantes seront impactées, quand et comment. Ce diagnostic se mène en plusieurs étapes pour approfondir certains sujets en fonction des besoins et des enjeux prioritaires du territoire.
Il y a aussi un aspect prospectif à ce diagnostic qui permet d’humaniser le sujet. Car il y a une différence entre parler de chiffres et montrer des tableaux sur les impacts du changement climatique, et mettre en récit ces prévisions par rapport à la configuration du territoire. On peut aussi dresser différents scénarios pour déterminer les actions à mener.
Un outil à mobiliser est la boussole de la résilience, qui permet d’identifier tous les leviers que peut mobiliser une collectivité ou n’importe quelle structure en fonction de ses besoins. Elle permet de bâtir une stratégie d’adaptation à l’échelle du territoire sans oublier aucun des aspects de l’adaptation, en apportant une vision à 360° des actions à mener. Son avantage est aussi de faciliter le dépassement du travail en silo, par discipline, et d’intégrer les risques émergents.
Elle a été utilisée par exemple dans le cadre de CRTE ou d’élaboration de PCAET…
Cette stratégie se décline ensuite dans toutes les actions de la collectivité : planification, politiques publiques, communication…
Pour réaliser ces démarches il faut être agile, adapter les stratégies, les actions, rediscuter des plans chaque année pour les ajuster et aussi pour voir les évolutions ou ce qui ne fonctionne pas. Cette agilité est également nécessaire face à l’accélération du changement climatique et à l’apparition de nouveaux phénomènes qui touchent et toucheront les territoires, car l’idée est bien d‘anticiper.
Comment se positionne le Cerema pour aider les collectivités face à ce besoin d‘adaptation des territoires ?
L’adaptation au changement climatique est au cœur de l’action du Cerema. Elle est intégrée dans l’ensemble de nos domaines d’activité, du bâtiment à l’aménagement du territoire, en passant par les infrastructures ou le littoral et à travers des solutions comme la nature en ville. Comme l’adaptation au changement climatique nécessite une action structurelle sur les territoires, on parle d’ailleurs d’adaptation "transformative", nous sommes très bien placés pour accompagner les territoires dans cette réflexion stratégique et thématique.
Nous apportons des connaissances, à travers des formations destinées aux collectivités, et nous pouvons les accompagner en proposant une approche globale pour les stratégies de territoires. Nous avons mis au point une formation « engager une démarche de résilience territoriale » qui utilise la boussole de la résilience pour mettre en œuvre cette démarche globale.
Ce travail avec les collectivités qui sont à des étapes différentes de leurs réflexions et actions à ce sujet, nous permet aussi de capitaliser les informations sur leurs besoins, les retours d’expérience.