Patricia Gout, directrice du développement au Cerema Est a ouvert la journée en précisant les grands enjeux du décret pour diminuer la consommation des bâtiments tertiaires en exploitation (en 2020, le secteur du bâtiment en France représentait 43% des consommations énergétiques dont un tiers par les bâtiments tertiaires). L'objectif principal du dispositif BACS ("building automation and control systems" ou "systèmes d’automatisation et de contrôle des bâtiments") est:
- améliorer le pilotage des systèmes techniques du bâtiment
- assurer un suivi des données d'exploitation permettant de relever des optimisations possibles.
Décret BACS et systèmes de gestion technique
La journée a commencé par un zoom sur les aspects réglementaires : Aurélie Leonate de la DREAL Grand Est a présenté les grandes lignes du décret BACS et a répondu aux questions, notamment liées à la mise en œuvre opérationnelle de cette nouvelle réglementation. Les questions étaient centrées sur des cas particuliers remontés par les gestionnaires de parc, sur le calcul du temps de retour sur investissement d’un système de Gestion Technique du Bâtiment (GTB).
Dans un second temps, Yaneck Zajkowski du Cerema Est a abordé le pilotage des installations techniques. L’objectif était de présenter les services (surveillance, supervision et suivi énergétique) apportés par la GTB, ainsi que les différents niveaux de régulation possibles (de la classe A "élevée" à la classe D "tout manuel").
Méthode de suivi énergétique à travers les données GTB
Julie Runser et Arthur Quarteroni du Cerema Est ont présenté ensuite une démarche de suivi des performances énergétiques d’un bâtiment récemment livré : la Maison de l’Habitat et du Développement Durable d’Epinal. Il s’agissait notamment d’expliquer comment détecter des incohérences entre le fonctionnement du bâtiment attendu via les documents délivrés à la réception et les observations issues de la GTB.
Un outil a été développé pour suivre précisément la consommation d'énergie d'un bâtiment à partir des données enregistrées, la méthode consistant à comparer la consommation réelle avec une consommation de référence, en tenant compte des facteurs qui influencent les résultats (météo, nombre d'occupants…). D’autres d'éléments ont été exposés ensuite pour permettre de comprendre le fonctionnement réel du bâtiment, suivre et contrôler les systèmes en place pour éviter les dérives énergétiques et anticiper d'éventuels dysfonctionnements.
Retour d’expérience : la Maison de l’Habitat d’Epinal
Le dernier temps de la matinée était consacré au retour d’expérience de Sami Kriouche, de la Communauté d’Agglomération d’Epinal, qui a évoqué l’importance de l'implication de la maîtrise d’ouvrage lors de la conception d'un système d'automatisation pour un projet neuf ou réhabilité tant sur l'expression des besoins du bâtiment étudié que l’arbitrage des propositions faites par la maîtrise d’œuvre. Une installation trop complexe serait contre-productive pour un suivi efficace.
Il a rappelé qu'un système d'automatisation bien conçu facilite la démarche de contrôle mais qu’elle n'est possible que si des moyens humains associés à des compétences techniques en adéquation sont déployés pour assurer le suivi du bâtiment. A titre d'exemple, la mise en place de la GTB a permis d'objectiver les plaintes des occupants en termes d'inconfort ressenti en hiver à la Maison de l’Habitat. Par ailleurs, grâce au déploiement d’une GTC il a été possible de réduire de 30% la consommation énergétique de la bibliothèque intercommunale, située à Epinal. Ce gain d'énergie a été réalisé grâce à l'installation d'une GTC associée au remplacement de groupes froid et à la modification de la régulation des centrales de traitement d’air.
L’après-midi a été l’occasion de parcourir les premières étapes de la démarche de mise en conformité BACS avec Céline Dubreuil, en présentant différents cas d’assujettissement et une méthode de diagnostic de l’existant. Cette intervention a permis d’introduire la table ronde qui suivait et dont le thème était : "Comment les collectivités mettent en œuvre la démarche BACS ?". A cette occasion, sont intervenus, Luc Schorderet de la Communauté européenne d’Alsace (CEA) ainsi que Christian Vitu et Jean-Luc Boutin élus de la ville de Raon-aux-Bois. Ces deux collectivités ont témoigné tour à tour de leurs expériences dans la structuration de la démarche BACS, chacune à partir de son patrimoine bâti et de ses moyens propres.
Les échanges de table ronde :
Une table ronde a été organisée, avec :
- M. Christian VITU, maire de Raon-aux-Bois et M Jean Luc BOUTIN conseiller délégué à la commune de Raon-aux-Bois
- M Luc SCHORDERET, en visio, responsable du service énergie et qualité de l’air de la direction de l’immobilier de la Collectivité Européenne d’Alsace
- M Yaneck ZAJKOWSKI, chargé d’études en gestion, exploitation, usage au Cerema
Elle a permis de revenir sur les démarches des deux collectivités et d'aborder les questions de financement, de diagnostic, d'adaptation des démarches dans le cadre du décret BACS. Différentes questions ont été posées, notamment :
Pourquoi un système de pilotage des installations de chauffage a-t-il été installé dans chacune des deux communes ?
Pour Raon-aux-Bois, une petite commune, la raison était d’abord économique, la facture énergétique devenait insoutenable pour la collectivité. Le choix s’est porté sur le patrimoine le plus énergivore. L’objectif était donc de diminuer la facture d’énergie et les émissions de CO2.
Pour la CEA, qui est une jeune collectivité née en janvier 2021 de la fusion des deux départements alsaciens, la remise à niveau et l’installation de GTB s’inscrit dans la stratégie énergétique de 2023. Il s’agit notamment de réduire de 40% les consommations d’énergie des collèges d’ici 2030 en lien avec les obligations du décret tertiaire.
Quelle méthodologie a été suivie pour mettre en place la GTB ?
Raon-aux-Bois a commencé par réaliser un diagnostic énergétique. Cela a permis aux élus de la ville de de faire le point sur ses sources d’approvisionnement et de passer du chauffage au gaz au chauffage au bois. Le système de pilotage des températures dans les locaux communaux (école et garderie principalement) a permis au final de faire une économie de 38% pour un investissement de 21.000€. Dans un contexte de hausse du cout des énergies, cet investissement a été rentabilisé dans ses premières années d’utilisation. Il a permis de garantir un niveau de confort aux occupants lors de la crise énergétique de 2022 (si la collectivité n’avait pas anticipé, elle aurait été incapable de faire face à sa facture énergétique).
Du côté de la CEA, la consommation annuelle était de près de 720 GWh avec 147 collèges représentant 80% des consommations, dont 2/3 destinées au chauffage et avec un taux d’inoccupation de 75% (nuits et congés scolaires).
La CEA a réalisé en interne un diagnostic des systèmes de pilotages existants, de leur état de fonctionnement (en 2023 si la moitié des établissements étaient équipés d’un système de pilotage, seuls 10% disposaient d’un système fonctionnel). Cet état des lieux a permis de chiffrer un plan de remise à niveau adossé à des gains énergétiques associés. A ce jour, le plan d’action GTB doit être validé par les élus de la collectivité afin d’y allouer les moyens humains et financiers nécessaires à son exécution.
Durant la table ronde, il a été largement question du financement des projets. A ce titre, les présentations se sont achevées sur les dispositifs existants permettant de financer la mise en place du décret BACS tels que l’intracting, les fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA), la dotation de soutien à l’investissement local (DSIL) ou les certificats d’économie d’énergie (CEE).
Julien Borderon du Cerema Est a clôturé la conférence en faisant une synthèse des moments saillants de la journée.
