Les spécialistes du Cerema ont réalisé plus d'une vingtaine d'interventions lors d'ateliers et présentations, sur des sujets tels que la sécurité routière, les leviers d'innovation pour les collectivités, la gestion du trafic, les véhicules intelligents, le développement du covoiturage, le traitement des données de mobilité...
Les 23 et 24 janvier 2024 avaient lieu les Rencontres ATEC-ITS consacrées à la mobilité intelligente. Des spécialistes de la mobilité sont intervenus lors d'ateliers et conférences, pour présenter les travaux en cours et les innovations dans des domaines très variés, allant des leviers techniques pour développer le covoiturage à la gestion et au suivi du trafic, en passant par l'analyse des accidents, le véhicule autonome, les nouveaux services de mobilité, la présentation du Mobility Data Hub...
Ces rencontres, dont les échanges ont été riches, ont aussi permis aux équipes du Cerema de rencontrer les acteurs de l'écosystème français de la mobilité intelligente.
Sécurité routière
Réduire les accidents de la route grâce à un outil de détection de virages dangereux
Natacha Vandereruch (Michelin Mobility Intelligence) et Clémence Bruneval (Cerema Normandie Centre) ont effectué une présentation commune sur le travail réalisé de 2022 à 2023. L'outil "Virages atypiques" de MICHELIN Mobility Intelligence qui a pour objectif de faciliter la gestion préventive des routes et la sécurité des usagers, a été présenté. Il se focalise sur la problématique des virages dangereux hors agglomération. En effet, les virages sont un enjeu important identifié en accidentologie. Le service calcule un score de dangerosité des virages de 0 (faible) à 1 (très élevé) aussi appelé indicateur de virage atypiques.
Les équipes du Cerema ont présenté la méthodologie mise en œuvre afin d’expertiser l’outil proposé par MICHELIN Mobility Intelligence. L’analyse a été structurée en 4 phases :
- Analyse globale des données MICHELIN Mobility Intelligence sur le territoire de la Seine-Maritime
- Analyse de l’indicateur virage atypique
- Etude de 8 virages en lien avec leurs indicateurs
- Etude de 2 itinéraires en lien avec leurs indicateurs
Cette étude a mobilisé les différentes compétences des équipes du Cerema :
- Recueil de données à partir d’un véhicule instrumenté
- Analyse de données
- Analyse de l’infrastructure
- Analyse du ressenti usager
Les nombreux échanges menés entre les deux équipes ont permis à MICHELIN Mobility Intelligence d’améliorer l'outil afin de le rendre plus stable, plus complet et plus performant.
Lieux de concentration d’accidents : prioriser les zones accidentogènes en milieu urbain
Cette présentation de Mélanie d'Auria-Llexa (Cerema Centre-Est) portait sur l'identification des zones les plus accidentogènes. Chaque année, deux tiers des accidents corporels ont lieu sur le réseau routier en agglomération, ce qui représente un tiers de la mortalité routière. Mieux les appréhender afin de les prévenir constitue donc un enjeu fort des acteurs locaux.
Afin de les appuyer, le Cerema a présenté une méthodologie permettant d'identifier les lieux de concentration d’accidents (LCA) en milieu urbain. Les résultats donnent la possibilité aux gestionnaires de voirie d’objectiver l’accidentalité sur leur territoire afin d’échelonner les actions pour réduire l’insécurité routière.
La détermination des LCA est basée sur un calcul de densité d’accidents sur le périmètre étudié afin d’en déduire les secteurs où la densité est la plus importante et les analyser. Sur la base des zones identifiées, il est ainsi possible dans un second temps d'aller plus loin dans l'étude des circonstances d'accidents.
Récemment, la méthodologie a fait l’objet d’une publication sur le site du Cerema (lien ci-après). Cette méthode déjà mise en œuvre dans plusieurs études du Cerema pourrait être déployée de manière indépendante par les gestionnaires de voirie.
Les collectivités, actrices majeures de l’innovation dans les mobilités
Patrice Morandas (Cerema Territoires et ville) a organisé et animé une table ronde avec des acteurs des collectivités pour présenter des actions mises en place à différentes échelles afin de développer les mobilités.
Les collectivités territoriales et leurs groupements ont vu leur rôle réaffirmé en matière de mobilité par la LOM, et leur organisation modifiée autour de deux acteurs majeurs : les régions et les intercommunalités. Cependant, tous les types de structures sont amenés à jouer un rôle à divers titres dans ce domaine essentiel à la vie des territoires et de leurs habitants.
Des politiques innovantes en matière de mobilité sont menées par des collectivités pionnières depuis plusieurs années : cette table ronde a permis d'en présenter certaines. Les intervenants de cette table ronde:
- Tristan Boursico, Chef de projet information multimodale / MasS - Région Grand Est, a présenté les actions mises place par la Région Grand Est, chef de file de l'organisation des mobilités, notamment en termes de mutualisation des services numériques.
- Aurélien Cagnard, Directeur du Laboratoire Territoire et Mobilités - Métropole Rouen Normandie a présenté les réflexions de la métropole et les innovations dans le domaine des mobilités, pour favoriser la multimodalité et l'intermodalité, comme le déploiement de services d'autopartage, de lignes de bus express à haut niveau de service, les efforts d'automatisation du transport à la demande, le rôle-clé du MaaS pour faciliter l'évolution des comportements de mobilité. Le déploiement de la ZFE-m en phases successives a aussi été abordé ainsi que les actions mises en place pour accompagner la ZFE : augmentation des transports en commun, lignes de covoiturage, parkings relais, déploiement de bornes électriques, aides financières pour les particuliers...
- Vincent Prioul, Responsable Services aux Communes et Mobilités - CC Val de Drôme en Biovallée a illustré l'action dans une territoire rural, avec l'élaboration dès 2014 d'une stratégie suivie d'expérimentations, pour définir une politique des mobilités en 2020 avec la prise de compétence mobilité. Le covoiturage est un des leviers de mobilité retenus, avec la création en cours d'arrêts et d'une application dédiée, ainsi que le développement des modes actifs avec la construction d'un schéma directeur cyclable parmi d'autres actions. L'objectif est de développer des services pour les premiers et derniers kilomètres, en complémentarité des services de transport en commun et scolaires gérés par la région, et en partenariat avec les territoires voisins et les associations.
- Intervention conclusive de Michel Neugnot, 1er Vice-président de la Région Bourgogne-Franche-Comté, en charge des mobilités,
des transports scolaires, de l’intermodalité et des infrastructures.
Après un rappel du contexte législatif et de son évolution, Patrice Morandas a présenté l'ouvrage conjoint du Cerema et du Groupe de Recherche sur l'Administration Locale en Europe (GRALE) sur l'action publique locale en matière de mobilités.
Prise en compte des axes structurants dans les ZFE-m
Lors de l'atelier "Vers un avenir intelligent des transports : solutions et innovations", Tiffany Darini et Loïc Duffy du Cerema Centre-Est ont présenté la démarche de prise en compte des axes structurants dans les zones à faibles émissions mobilité (ZFE-m).
Face aux fortes émissions de polluants liées au trafic routier et à leurs conséquences en termes de santé publique, la loi d'orientation des mobilités de 2019 a instauré les ZFE-m permettant aux collectivités de limiter la circulation des véhicules les plus polluants sur leur territoire. Les règles de mise en place de la ZFE-m sont définies par la collectivité. L'inclusion des axes structurants peut permettre la mise en place d'un périmètre lisible, ambitieux et cohérent sur une agglomération.
Cependant, un axe structurant supporte un trafic important, il est donc nécessaire d'évaluer l'impact de leur intégration pour identifier les éventuels points de difficulté, notamment sur le report éventuel du trafic de transit.
L'objectif du travail réalisé est de proposer une méthode d'évaluation de l'inclusion d'un axe structurant dans une ZFE-m. La méthodologie proposée se déroule en plusieurs étapes, correspondantes à des fiches explicatives, dont la première permet de caractériser et définir le réseau d'étude.
La deuxième correspond à un point d'arrêt fort de l'étude qui consiste à étudier la nécessité d'une étude approfondie d'inclusion d'un axe structurant dans une ZFE-m. Une estimation de la part du trafic de transit qui serait reportée sur un axe alternatif, en cas d'inclusion dans la ZFE-m, est réalisée, en prenant en compte des hypothèses de changement de parc, de changement modal ou de renoncement au déplacement. Ce calcul permet de déterminer l'existence, ou non, d'un ou plusieurs axes secondaires pouvant supporter le report du trafic de l'axe structurant ainsi déterminé.
En complément de l'étude d'impact généralement réalisée dans le cadre d'une étude de scénario ZFE-m, il est proposé, dans la cinquième fiche, des méthodologies d'étude des impacts sur la sécurité routière et le bruit.
Nouvelles mobilités
Outils de gestion et d’analyse au service des nouvelles mobilités
L'atelier "Outils de gestion et d'analyse au service des nouvelles mobilités" présidé par Elias Siddiki (Ingérop) et rapporté par Éric Klein (Cerema), a permis d'explorer des avancées clés, et de nouvelles solutions intelligentes, notamment basées sur l'IA, qui auront un impact ces prochaines années dans le paysage de la mobilité:
- La mesure des flux logistiques par Orange Business par Floating Mobile Data (FMD): Les données (objets IOT, vitesse, direction et map matching) sont collectées, filtrées et stockées, et des classes de véhicules de type VUL et PL sont déduites des traces initiales de téléphonie mobile. Les véhicules sont anonymisés, comptabilisés puis leurs volumes "redressés" via des données de référence (FCD – Floating Car Data – et autres). La solution Flux Vision offre la visualisation de "Fréquentations" (volumes par zones/sections) et de "Matrices Origines/Destinations" (comptages par itinéraires). Les temps de trajet, heures de départ, etc. sont des sujets qui seront développés dans la suite de ce projet de recherche très prometteur. Le taux de pénétration FMD est aujourd’hui évalué à 20% avec des écarts d’environ 10% calculés sur plusieurs cas d’usage (en regard de comptages de référence).
- La simulation d'optimisation de l'électrification de flottes de bus par Setec qui a développé un outil d'aide à la décision par simulation appelé Volt@bus. La simulation nécessite plusieurs séries de données d’entrée dont notamment les caractéristiques du matériel roulant, le climat et les donnes inter-stations. La démarche de simulation conduit à optimiser l’exploitation inter-station par les consommations de "traction" et "auxiliaires". Elle est ponctuée des étapes suivantes : le diagnostic initial du réseau, le calcul de la consommation énergétique, l’adaptation de la planification et le planning de charge / puissance. L’outil de simulation permet d’optimiser les consommations des bus via un procédé de "Smart Charging" intégrant notamment le lissage de la charge.
- L'arithmétique des intervalles pour la reconstruction de matrices origines /destinations pour le réseau toulousain, par le CESI/ LINEACT. Trois systèmes d'informations ont été "nettoyés" et fusionnés. Les matrices origine - destination sont construites à l’aide d’un algorithme de "Trip chaining" sur des réseaux "ouverts". Elles ont été représentées de façon originale en diagrammes de chaleur donc en prenant uniquement en compte les bornes des intervalles de fréquentations. Ces diagrammes ou matrices permettent de mettre en évidence les niveaux de sollicitations des arrêts en pointant leurs limites. La suite du projet va s’attacher à étudier les fréquentations de ces lignes de transport en commun croisées à la dynamique du territoire avec l’intention d’optimiser le réseau et enfin de réaliser des analyses de mOD pendulaires.
- L'analyse des flux de mobilité par la collaboration Renault-Orange sur le territoire de Saint-Quentin-en-Yvelines, en s'appuyant sur l'IA. Le projet a notamment pour objectif de mettre en œuvre un "Data hub" collectant des sources hétérogènes de données pour fiabiliser le modèle de trafic, développer une méthode de collecte de données sans capteurs et analyser l’attractivité de zones d’activités commerciales. Des outils relevant de l’IA ont été mis en œuvre par la startup NTROPY (Managing Complexity) au sein de l’écosystème "software république" (GIE) pour "apprendre" et reconnaître les différents types de mobilités ou cas d’usage à partir de données d’entrées multiples (statiques et dynamiques). Ces données ont été capitalisées dans la plate-forme "HexaDone" et ouvre un nouveau champ des possibles pour des analyses et développement d’outils de mobilité.
- La construction d'un modèle de déplacements permettant de faciliter les études mobilité par Setec international : Un fort enjeu était d'harmoniser et de fiabiliser les données d'entrée pour en développer les usages. Le modèle construit est de type mathématique "jumeau numérique", et basé sur le maillage IRIS du territoire français en 175 macro-zones (agrégats d’EPCI). Le premier produit (cas d’usage), après calibrage aux échelles régionales et nationale, est le trafic moyen journalier annuel avec distinction VL/PL. Ces données ont été produites à partir de plus de 50 000 points de comptage. Le deuxième produit est la construction de matrices Origines/Destinations. Le modèle permet en outre d’analyser la résilience du réseau routier national (RRN) face au changement climatique. Le modèle demande encore à évoluer via des API et la fiabilisation des classifications de véhicules dont les PL.
- Une analyse du Cerema sur les défis des chaussées à voie centrale banalisée (CVCB). Clémence Bruneval et Nathalie Bertiaux du Cerema Normandie Centre ont montré comment les outils de gestion et d’analyses peuvent montrer l’intérêt d’une CVCB. Cette gestion de l’infrastructure convient à des voiries circulées à vitesse limitées à 50 ou 70km/h en prenant en compte des contraintes géométriques (largeur de la CVCB, largeur des bandes dérasées G et D, virages, points hauts, etc.) et de sécurité routière (signalisation horizontale, VLA, etc.). La signalisation verticale n’est aujourd’hui pas adaptée aux CVCB. Bien que simple à mettre en œuvre techniquement et financièrement, la CVCB est un aménagement complexe qui nécessite une importante réflexion et dans certains cas une évaluation permettant de vérifier la pertinence de l’aménagement.
Développements techniques pour le véhicule autonome
Lors de l'atelier lié aux développements techniques pour le véhicule autonome présidé par Frédéric Fabre du Cerema Ile-de-France, des présentations de haute qualité ont été partagées sur des thématiques très variées, allant du cadre réglementaire et de ses évolutions à venir, en passant par les évaluations des performances des systèmes et jusqu'aux travaux de recherches sur l'identification des indicateurs d'attention des utilisateurs sollicités dans l'avenir pour superviser ces systèmes de délégation de conduite.
Chaque intervention a suscité un lot de questions pointues de la part d'un auditoire venu en nombre pour assister à cette session. Elles ont notamment permis de mettre en parallèle les problématiques d'attention avec les délais de reprises en main demandés pour les usagers des systèmes de délégation de conduite ou encore de préciser les durées de calibration statique des capteurs embarqués des véhicules automatisés.
Les différents points mettent en lumière les progrès notables de la filière, de sa maturité et de son foisonnement. Ces travaux illustrent tout de même que, malgré la quantité d'études déjà menées, il reste du chemin à parcourir pour éclairer totalement sur les limites potentielles de la mobilité automatisée.
Mobilité innovante : Technologies, perspectives de l’IA et gestion proactive du trafic en temps réel
Dans le cadre de l’atelier "Mobilité innovante : Technologies, perspectives de l’IA et gestion pro-active du trafic en temps réel" qui avait pour rapporteur Fabrice Reclus du Cerema Territoires et ville, les présentations ont montré comment les projets d’exploitation ou des solutions commerciales intègrent à présent des briques d’intelligence artificielle (IA) pour adresser ces problématiques complexes.
L'IA permet de mieux anticiper les situations grâce à des prévisions plus précises, par exemple pour les conditions de circulation ou la gestion des mobilités, en associant la connectivité temps-réel et des capacités de traitement de données très puissantes (Cloud). Cependant, l’IA nécessite un cadre et des méthodologies pour évaluer et valider la sûreté et la sécurité, en particulier dans le cas de la mobilité connectée et autonome. Cet atelier a aussi montré comment l’IA peut être utilisée comme une aide à la décision dans les métiers de l’exploitation, en conservant la validation des décisions par des opérateurs humains.
Aux côtés de Patrick Vial, chargé de mission systèmes patrimoines et investissements, Paul Peyret du Cerema Territoires et ville a présenté une partie des travaux du Cerema dans le cadre du projet 5G Open Road. Ce projet vise à étudier et développer des services de mobilités connectées et automatisées en s’appuyant sur une connectivité 5G.
Les travaux présentés reposent sur une série d'entretiens menés auprès d'acteurs des mobilités du territoire : des AOM, des opérateurs de transports, des gestionnaires d’infrastructures et des gestionnaires de grands sites privés. Ces entretiens ont permis de dégager:
- une liste des enjeux liés aux mobilités prioritaires pour les territoires (exemples : participer à l’objectif national de neutralité carbone par une réduction de l’impact environnemental des déplacements ou encore favoriser l’intermodalité),
- les principales conditions de réussite pour les futurs déploiements (exemples : la maîtrise des systèmes pour le déploiement et l’exploitation ou encore la définition d’une gouvernance pour préserver la souveraineté territoriale),
- les principaux freins aux futurs déploiements (exemples : les aspects juridiques et le cadre réglementaire ou encore la maturité de la filière) et les services 5G Open Road prioritaires (exemples : la priorité aux bus (aux intersections contraintes) ou encore l’optimisation des temps de correspondances entre TC et navettes autonomes).
Cette restitution a été écoutée avec intérêt par l'audience qui a posé des questions autours de l'enjeu de recrutement de chauffeurs, autour des potentiels de la 5G ou encore autour de la gouvernance de ces services de mobilité automatisée.
Exploiter les données de mobilité
Présentation d’AVATAR et du Mobility Data Hub
Le Cerema a présenté sur son stand les projets AVATAR (système de collecte, d'analyse et de visualisation des données de trafic routier pour tous) et Mobility Data Hub (dont l'ambition est de transformer les données individuelles en données d'intérêt collectif pour la connaissance de la mobilité).
La plateforme AVATAR
AVATAR s'appuie sur les données des gestionnaires des réseaux routiers et sur l'intelligence artificielle pour détecter les valeurs aberrantes remontées par les capteurs situés sur le terrain et de reconstituer les données.
Piloté par le Cerema avec un financement de la Direction interministérielle du numérique, AVATAR fournit des données ouvertes et qualifiées aux décideurs, aux entreprises, aux gestionnaires routiers, aux médias, et plus largement au grand public sur les trafic journaliers et leur évolution.
Le Mobility Data Hub
L'objectif est de réunir les données de mobilité sur une plateforme open data et à fournir des outils d'analyse et de planification pour différents usages : recherche, gouvernance, organisation de la filière nationale.
Mené en partenariat avec la DGITM, le Cerema, l'Ifpen et Inria, le hub fournira des indicateurs dynamiques automatisés, des trajectoires de mobilité, des modules de traitement des données, et sera accompagné d'une communauté métier et connaissance pour fédérer les acteurs, diffuser la connaissance, et structurer la filière.
LES RENCONTRES DE L’OBSERVATOIRE DES MAAS
Pour cette 2e édition, les rencontres sont organisées par le Cerema en partenariat avec ATEC ITS France, dans le cadre du Congrès ATEC ITS France. Cet évènement annuel incarne la dynamique éminemment partenariale de l'observatoire, qui stimule et organise le partage d'expertise entre tous les acteurs en pointe sur le sujet, et fait le lien avec les projets opérationnels conduits sur le terrain par les collectivités.
Le programme de ces rencontres mettait en scène 8 séquences successives pour présenter :
- les travaux déjà publiés sur l'impact des MaaS sur les changements de comportements, ou encore les enjeux des systèmes de paiements associés a la mobilité servicielle.
- les travaux qui seront publiés très prochainement, sur les enjeux d'évaluation des MaaS et sur l'inclusion de l'écosystème de la voiture personnelle dans les MaaS
- Des retours d'expériences concrets, conduits notamment par les agglomérations de Clermont-Ferrand et Montpellier
- Des regards de chercheurs et d'experts sur les perspectives en enjeux d'avenir.
Le replay de ces rencontres, ainsi que toutes les présentations effectuées, seront prochainement mises à disposition sur la Page de l'observatoire des MaaS !
Promouvoir le covoiturage
Bruno Levilly et Honoré Rouland, du Cerema Territoires et ville, ont animé un atelier sur le covoiturage. Identifié comme un levier important de la décarbonation des mobilités, faisant l'objet d'un plan national lancé il y a un peu plus d'un an et intégré dans la planification écologique, promouvoir le covoiturage reste plus que jamais un sujet d'actualité.
Le programme de cet atelier était articulé autour de 5 présentations : une présentation sur les dimensions d'une politique publique de covoiturage à travers l'exemple de Grenoble, suivie de 3 présentations en lien avec les voies réservées au covoiturage, leur évaluation, les capteurs de mesure du nombre d'occupants et l'assistance à la verbalisation, avec, pour conclure, une présentation du projet de TRAPEZE dont le Cerema est un des partenaires.
Emergence d’un écosystème de covoiturage cohérent – retour d’expérience de Grenoble
Jean-Baptiste Ray (Ecov) a d’abord décrit les différentes dimensions d'une politique publique de covoiturage pour optimiser le développement de la pratique :
- la définition d’une stratégie mobilisant des outils dévaluation et de suivi ;
- la mise en œuvre opérationnelle s’appuyant sur des opérateurs de covoiturage planifié, des opérateurs de lignes de covoiturage et un système d’information clair à destination des usagers ;
- et la réalisation d’infrastructures favorisant la mise en relation et le partage des trajets.
Le développement du covoiturage nécessite la mise en œuvre d’une multiplicité de leviers qui relèvent de différents acteurs : la région, les départements, les AOM, les éventuels syndicats mixtes de transport et les communes. La coordination entre ces acteurs est donc indispensable pour développer un système covoiturage. Emilie Faghel (SMMAG) a présenté le cas concret du développement du covoiturage à l'échelle du SMAGG avec différentes typologies de service :
- le covoiturage anticipé et organisé avec une mise en relation par un opérateur (M Covoit'RDV)
- le covoiturage spontané organisé sous forme de lignes de covoiturage (M Covoit Lignes+)
- l'autostop organisé (M Covoit'Pouce)
A Grenoble, ces différents services s'appuient sur des infrastructures (notamment une VR2+) et une intégration dans le Maas et les calculateurs d'itinéraires.
VR2+ Nantes Métropole : mise en œuvre et évaluation
Nicolas Ditchi (Cerema) et Anne-Charlotte David (Nantes Métropole) ont présenté l'expérimentation d'une VR2+ sur le Boulevard de la Prairie de Mauves à Nantes. Il s'agit d'un axe bidirectionnel permettant de se connecter au périphérique de Nantes à la porte d'Anjou et qui subit des congestions récurrentes en période de pointe du soir avec des temps perdus pouvant dépasser les 10 minutes. Le projet a consisté en la mise en place d’une voie réservée par la réutilisation d’une voie neutralisée sur un linéaire de 2300 m et a été mis en service le 12 juin 2023.
Nantes Métropole a aménagé la voie réservée au covoiturage sur la voie de droite. Cette voie réservée est ouverte en permanence :
- Aux véhicules transportant deux personnes et plus (y compris véhicules utilitaires et deux roues motorisés) ;
- Aux transports en commun de service régulier ;
- Aux taxis ;
- Aux véhicules des services d’urgence (forces de l’ordre, services de secours...).
Les véhicules très faible émission (VTFE) ne sont pas autorisés à circuler sur cet axe, sauf s’ils transportent au moins deux personnes.
Nantes Métropole a confié la mission d'évaluation de cette VR2+ au Cerema. Le protocole d'évaluation est composé de trois grandes thématiques : l'efficience, la sécurité et l'acceptation par les usagers. Cette évaluation est en cours et les premiers résultats concernant les gains de temps de parcours, le respect des vitesses autorisés ou encore le différentiel de vitesse entre les voies (générales et réservées) ont été présentés au cours de cette session.
Evaluation d’un capteur de mesure du nombre d’occupants sur la rocade Est de Lyon
Alexis Bacelar (Cerema) et Karim Ali (Invision) ont présenté une méthode d'évaluation d'un capteur de mesure du nombre d'occupants. Un des enjeux principaux pour développer le covoiturage est de pouvoir compter avec précision le nombre d'occupants des véhicules circulant sur des voies réservées afin de limiter la fraude. Un capteur innovant des sociétés partenaires Invision AI (Canada) et Equans a été évalué par le Cerema en vue d'être déployé sur des voies de covoiturage.
L'objectif du projet était donc d’évaluer les performances métrologiques d’un capteur situé au bord de la route, qui intègre un système innovant de comptage du nombre d’occupants dans les véhicules s'appuyant sur de la reconnaissance de silhouette par intelligence artificielle.
L’évaluation se déroulait sur la voie lente de la Rocade Est à Lyon dans le sens Sud-Nord. Cet axe est géré par la Direction Interdépartementale des Routes Centre-Est et supporte un trafic de 100 000 veh/jour, avec 20 % de Poids Lourds. La vitesse y est limitée à 90 km/h pour les VL et 80 km/h pour les PL.
Cette évaluation s'est terminée en juillet 2023 avec des résultats très positifs :
- tout d’abord la mise en œuvre opérationnelle du système n’a nécessité qu’une demi-journée (de 2 à 4 heures). Cette courte durée ouvre la voie à une portabilité immédiate du capteur Invision AI, sous condition d’une disponibilité de l’énergie
- par ailleurs, sur 1223 véhicules analysables, 28 faux positifs avérés (soit environ 2,3 %) et 97,1 % de vrais positifs (autrement-dit des fraudeurs) détectés.
La "méthodologie Cerema" donne des résultats qui permettent de prendre en compte les nombreux biais existant lors de l’évaluation d’un capteur de comptage du nombre d’occupants, notamment les véhicules incertains et la répartition du trafic qui peut être très différente d’un site à l’autre. Ce capteur répond aux exigences de fiabilité et permet ainsi une mesure juste du nombre d'occupants des automobiles
VR2+ A48 (Grenoble) : arrivée de la vidéo-verbalisation assistée par ordinateur (VAO)
François Jeanjean (APRR) a d'abord présenté le contexte de la VR2+ à l'entrée de Grenoble sur l'A48. La voie de gauche est ainsi réservée dynamiquement au covoiturage. Lorsque que la VR2+ est active, la vitesse maximale autorisée passe à 50 km/h contre 110 km/h lorsqu'il n'y a pas de congestion. Toutefois, on observe un taux de respect de la VR2+ assez faible, de l'ordre de 40%, ce qui peut remettre en cause l’efficacité et l'acceptabilité du dispositif. Afin de surmonter cette difficulté, Jean-Baptiste Gall (DGITM) a présenté la phase pilote de la verbalisation assistées sur les VR2+, étape intermédiaire avant le contrôle sanction automatisé.
L'expérimentation sera menée sur 6 VR2+ avec des acteurs locaux volontaires. L’Etat met à disposition et maintient une solution technique de détection de la fraude au moyen d’un marché qu’il pilote. Les agents verbalisateurs disposent ainsi d'un outil d'aide à la constatation de la fraude. L'évaluation du dispositif sera réalisée par le Cerema en complément des évaluations des voies réservées. Le Cerema évaluera deux axes après la mise en service et à intervalles réguliers : le comportement et l’acceptabilité des usagers, et l’efficacité du système pour les agents verbalisateurs.
Décarbonation – TRAPEZE, un service de covoiturage 2.0 nouveau et inclusif
Pour conclure l'atelier, Laurent Taupin (Ecov) et Eric Lacombe (Nokia) ont présenté le projet TRAPEZE qui a pour objectif d’optimiser à la fois le taux d’occupation des véhicules et l’usage des infrastructures, en facilitant les trajets en covoiturage. Pour cela, deux innovations seront déployées :
- Un réseau maillé de lignes de covoiturage en lien avec les réseaux de transports collectifs existants (routiers, ferroviaires), afin d’encourager dans les territoires (ruraux, péri-urbains et denses) le développement de mobilités partagées et l’intermodalité ;
- Une voie réservée doublement régulée :
- lors de l’accès à la voie, pour garantir le remplissage optimal et la fluidité, en permettant aux usagers répondant le mieux aux critères d'éligibilité définis par l'autorité publique d'accéder à la voie quand celle-ci offre une capacité résiduelle inutilisée ;
- sur la voie, au travers de la diffusion de consignes de vitesse individualisées, pour optimiser les conditions de circulation avec un temps de trajet minimal sans dégrader le niveau de sécurité de la voie réservée.
Session France mobilités : L’impact du covoiturage
Nicolas Nuyttens, du Cerema Territoires et ville, est intervenu sur l'impact du covoiturage lors de la session France Mobilités sur le sujet "décarbonation des mobilités : quelle efficience des politiques publiques ?".
Face à la diminution constante des taux d'occupation des véhicules observée dans les différents enquêtes de mobilités, le covoiturage est à développer au maximum sur les territoires. Les premiers retours sur les incitatifs financiers mis en place par les collectivités montrent une augmentation sensible des trajets pouvant jusqu'à tripler sur les premiers mois de mise en œuvre. Les covoitureurs incités sont pour moitié environ de nouveaux covoitureurs reportés pour une très grande partie depuis la voiture solo qui continueraient cette pratique pour plus de la moitié si l'incitation s'arrête.
Le Cerema met en place une évaluation globale de ces incitatifs financiers basée sur des traitements opendata et des retours d'expériences sur différents types de territoires.
Les travaux 2020 du Comité Scientifique France Mobilités sur les services de covoiturage en territoires peu denses (voir document ci-dessous) ont identifié comme conditions de massification du covoiturage une identification précise des besoins de mobilités, un portage des projets par les élus, les DGS, les services techniques, les RH animation en lien avec les opérateurs, un rôle central de l'information et l'animation, un rôle clé des entreprises pour l'établissement des communautés et des rythmes de travail fixes, ainsi que l'allocation de ressources publiques.
L'appel à partenariat mis en place par le Cerema pour organiser la massification des pratiques ainsi que la communauté Expertises.Territoires éclaireront :
- les approches stratégiques autour des différents leviers d'action : infrastructures (schémas directeurs des aires, arrêts, voies réservées), services (plateformes), interfaces MaaS (lignes), animation/communication grand public comme entreprises (challenges, plans de mobilités), incitatifs financiers
- les approches systémiques pour une articulation optimale des acteurs et territoires : les zones d'emplois pour l'animation territoriale, les AOM pour la complémentarité avec les réseaux de transport public urbain, les départements pour les aires, les régions pour l'outil numérique unique rassemblant les offres des opérateurs et la coordination intermodale.