Les discussions ont aussi porté sur les leviers d’incitation au changement de comportement des usagers, en mettant en avant davantage les gains (engendrés par la pratique du vélo ou de la marche) en termes de santé, de cadre de vie et d’autonomie (coûts accessibles, efficacité). Le Cerema, partenaire de l'événement, y était présent pour animer des conférences ou tables rondes et intervenir lors d’ateliers.
Premières rencontres nationales après la création du Réseau vélo et marche (association qui résulte de la fusion entre Vélo & Territoires et le Club des villes et territoires cyclables et marchables), cette édition 2025 s’est déroulée à Annemasse, territoire disposant d’un réseau cyclable transfrontalier, dans un département – la Haute-Savoie – où l’organisation d’événements en lien avec le vélo est ancienne et bien ancrée. L’organisation de cet événement dans ce territoire ayant de fortes spécificités (mobilité transfrontalière, relief, proximité du lac, forte densité de population…) a permis de se rendre compte sur le terrain des enjeux et des difficultés, mais aussi de la possibilité de réaliser des aménagements qualitatifs en situation contrainte.
Les équipes du Cerema, qui avaient participé en amont aux réflexions partenariales sur le programme de cet événement, sont intervenues à plusieurs titres.
Atelier flash sur les intersections cyclables
Flavien Lopez, chef de projets Aménagements cyclables et espace public, a animé un atelier flash consacré à la conception des intersections cyclables, notamment hors agglomération. Il s’agit d’un sujet d’actualité pour lequel la doctrine est encore en construction et qui gagne à être alimenté par les retours d’expérience des territoires pionniers et des évaluations. Dans ce cadre, les sept règles d’or des intersections cyclables ont d’abord été rappelées par le Cerema :
- Assurer la lisibilité par un aménagement
- Préserver la continuité des itinéraires cyclables
- Offrir des trajectoires efficaces, crédibles et confortables
- Assurer la visibilité réciproque entre les usagers
- Réduire la vitesse des véhicules motorisés
- Réduire le nombre et la surface des zones d’interaction
- Fixer un régime de priorité adapté et le signaler en privilégiant si possible les cyclistes
Puis, plusieurs intervenants se sont succédé pour partager des exemples de référentiels locaux ou de réalisations, au cours d’une présentation flash :
- le Département du Morbihan (Xavier Domaniecki et Jean-Philippe Dussart) a présenté en particulier son référentiel départemental et plusieurs réalisations qui en ont découlé ;
- la Collectivité Européenne d’Alsace (Orianne Jouan et Patricia Gaudichet) a également présenté sa doctrine locale pour choisir le mode de franchissement des intersections (avec ou sans îlot notamment), ainsi que plusieurs réalisations ;
- l’agence d’écomobilité Savoie-Mont-Blanc (Nicolas Cailleux) a présenté un exemple de traversée cyclable à l’interface entre le réseau express vélo du Grand Annecy, et la bretelle d’insertion d’une route départementale, en intégrant à la présentation des éléments d’examen des comportements des usagers suite au réaménagement ;
- la Métropole de Tours (Olivier Mackowiak) et l’entreprise SOLCY (Camille Hanuise) ont présenté le détail technique d’un giratoire de sortie d’agglomération à la conception soignée (girations, régimes de priorité favorable aux cyclistes, etc.), revisitant notamment les dimensions de l’îlot central préexistant ;
- l’entreprise TRANSITEC (Alexandre Machu), largement implantée en Suisse, a proposé un éclairage complémentaire grâce à l’examen critique de plusieurs solutions d’aménagement, pour certaines originales, mises en œuvre ou à l’étude sur le territoire helvète.
Conformément au principe des ateliers flash, à l’issue de ce temps plénier, chaque intervenant a rejoint successivement plusieurs groupes restreints de participants. Ces temps d’échanges personnalisés ont permis d’apporter des réponses concrètes aux nombreuses interrogations soulevées par les projets présentés.
Table ronde sur la transformation du réseau routier
Lors de la table ronde animée par Thomas Jouannot sur la transformation du réseau routier pour le vélo en configuration contrainte hors agglomération, plusieurs intervenants ont apporté leurs expertises complémentaires.
- Nicolas Mercat, maire du Bourget du Lac, a partagé son retour d’expérience sur les aménagements cyclables adaptés aux réalités locales.
- Didier Caudoux, inspecteur général des routes à la DGITM, a éclairé les participants sur les enjeux réglementaires et stratégiques de la chaussée à voie centrale bidirectionnelle (CVCB).
- Cécile Rebout, animatrice de la politique cyclable du Finistère, a présenté le projet de restructuration de la RD 34, illustrant les solutions concrètes mises en œuvre pour améliorer la cyclable du réseau routier départementale
- Axel Thieulin, chef de projet aménagement et usages de la voirie au Cerema Centre-Est, est intervenu notamment pour exposer la solution innovante de l’alternat à feux déployée en Saône-et-Loire le long du canal du Centre.
- Alice Louis, cheffe de projet vélo au Syndicat Mixte des Mobilités de l’Aire Grenobloise, a abordé les adaptations spécifiques nécessaires face aux contraintes du relief montagneux.
Cette table ronde a ainsi permis d’aborder de manière concrète la reconfiguration des profils en travers, la réduction des vitesses, et la création d’infrastructures sécurisées pour les modes actifs. En conclusion, il a été souligné que l’adaptation du niveau de service du réseau routier national est indispensable pour mieux intégrer ces modes, en tenant compte des spécificités locales et des contraintes techniques, afin d’assurer une cohabitation sûre et harmonieuse entre tous les usagers.
Table ronde sur le patrimoine et les aménagements cyclables
Marion Ailloud, responsable du secteur Espace public et voirie urbaine, a animé, à partir d’un travail préparatoire réalisé avec le Réseau vélo et marche, une table ronde participative sur la thématique "Comment concilier enjeux environnementaux et patrimoniaux et projets d’aménagements cyclables ?"
L’atelier, qui a réuni plus de 80 participants, était consacré à la gestion de projets d’aménagements cyclables dans des contextes réglementaires complexes, notamment en présence de protections patrimoniales (site patrimonial remarquable, monument historique…), paysagères (site classé, site inscrit…) ou liées à la biodiversité (site Natura 2000, ZNIEFF, zones humides, règlementation espèces protégées…). Il s’est nourri de contributions de collectivités maitres d’ouvrage (Eurométropole de Metz et communauté d’agglomération Rochefort Océan) et d’une entreprise réalisant les travaux (Colas).
Les deux collectivités ont témoigné sur leur manière de piloter ces projets complexes : ils nécessitent une préparation rigoureuse et une concertation avec les services de l’État (architecte des Bâtiments de France, DREAL, etc.). L’exemple de Metz, ville concernée par un site patrimonial remarquable très étendu, illustre l’importance d’une co-construction des projets avec l’ABF.
Les collectivités ont décrit les adaptations techniques qu’elles ont pu être amenées à proposer pour tenir compte de ces enjeux : tracé de l’aménagement, choix des matériaux (aspect esthétique, perméabilité…), limitation des terrassements et affouillements, protection des arbres... La communauté d’agglomération Rochefort Océan a conduit des projets qui étaient à la fois en site classé de l’estuaire de la Charente et en site Natura 2000, devant ainsi respecter différentes prescriptions.
En phase chantier, le représentant de Colas a évoqué les précautions que les entreprises peuvent prendre pendant les travaux pour limiter les impacts : utilisation d’engins plus petits, programmation de la période des travaux tenant compte de la présence d’espèces protégées, gestion des espèces invasives, etc. Enfin, ces projets complexes favorisent l’innovation, comme l’usage de mini-pelles électriques ou de nouvelles techniques pour protéger les racines.
Pascal Balmefrézol (Directeur de projet Sécurité des routes et des rues) a participé à l’atelier "L’importance du plan de circulation pour apaiser tous les territoires" dont l’objectif était de présenter des retours d’expérience d’élus sur la mise en place de plan de circulation dans les agglomérations de Paris Centre et d’Annecy et d’esquisser les pistes aujourd’hui envisagées pour développer les plans de circulation en milieu rural.
Le Cerema a présenté dans cet atelier, le programme lancé au printemps 2025 avec 8 collectivités adhérentes du Cerema, dont l’objectif est de co-construire en 18 mois environ, une méthode pour élaborer des plans de circulation hors agglomération favorables aux modes actifs.
Une partie de Play-Mobile
Lors de l’atelier Flash "Serious Game" Christelle FAMY (Cheffe de projet Politique cyclables et marchables) a invité les participants à venir découvrir "Play-Mobile". Il s’agit d’un jeu où il faut faire évoluer le profil en travers d’une voirie en essayant d’atteindre collectivement les meilleurs résultats en termes de qualité de l’air, déplacement et sécurité.
Outil de sensibilisation (pour des techniciens, élus, citoyens…), il permet de se mettre à la place d’autres usagers de l’espace public et d’appréhender la complexité des choix modaux et l’intérêt collectif.
Il offre ainsi une base de discussion intéressante pour introduire les principales notions du partage de la rue (réduction des places de stationnement automobile, zone de rencontre…).
