3 décembre 2025
Mairie du Lavandou Inondation de mai 2025
Mairie du Lavandou / Inondation de mai 2025
Dans le contexte du changement climatique et de l'amplification de ses impacts, on observe une vulnérabilité croissante des territoires, aggravée par leur forte dépendance vis-à-vis des réseaux dits "essentiels" : électricité, eau, télécommunications, transport, déchets.
Cette journée a permis d'interroger notre capacité collective à anticiper et à gérer les effets en cascade que peut entraîner la rupture d’un ou plusieurs de ces réseaux. Comment assurer une continuité ou un rétablissement rapide de ces services en temps de crise ? Quelles sont les marges d’action des collectivités pour la sauvegarde des populations face à ces dépendances ?

Croisant les approches opérationnelles, stratégiques et territoriales, cette journée a permis d'apporter des outils afin de renforcer les pratiques de gestion de crise et de résilience des acteurs locaux, pour mieux faire face aux défis d’accessibilité et de desserte des réseaux dits "essentiels".

 

1/ Témoignage du maire du Lavandou sur les inondations de mai 2025

En mai 2025, des pluies orageuses très intenses se sont abattues sur la commune du Lavandou. Gil Bernardi, maire de la commune et grand témoin de la journée, est revenu sur cet événement, sur les impacts structurels subis et la gestion de crise et post-crise mises en œuvre. Il témoigne en particulier des problématiques liées aux réseaux : 

  • Perte d’une partie du réseau routier dont la traversée de l’agglomération (pont "secoué" par la crue, effondrement de la berge, pieds déchaussés, capacité de tonnage à réévaluer), à quelques semaines de la saison touristique et l’arrivée massive de population ;
  • Perte de pistes forestières à l’approche de la saison à risque "feux de forêts" ;
  • Perte du réseau électrique ;
  • Perte de la station d’épuration (STEP) impliquant la coupure du réseau d’eau potable.

Il a insisté sur la nécessité d’être sur le terrain pour comprendre l’évènement et l’ampleur des dégâts, tout en restant calme pour coordonner les secours et prévoir les actions de retour à la normale.

Le rétablissement du réseau d’eau est une priorité, elle se fait par étape : dégagement des accès, nettoyage et alimentation des réservoirs, dépollution nécessaire pour la consommation, remise en service de la station, analyse des fuites induites et itératives, …

La problématique liée au rétablissement des réseaux enterrés est posée. Il a conclu l'intervention sur la vigilance à avoir en post-crise et l'anticipation du "coup d’après" avant qu’il n’arrive.

Ouverture de la journée
Grand témoin

2/ RETEX Hautes-Alpes : coupure des accès lors des inondations de 2023 

Le département des Hautes-Alpes gère 2 000 km de routes de montagne, un réseau essentiel fortement exposé à de multiples risques naturels comme les avalanches, les crues et les chutes de blocs.

La crise du Guillestrois de décembre 2023, déclenchée par des pluies intenses et une fonte rapide de la neige a provoqué des dégâts majeurs, coupant les routes, les communications, et isolant les hameaux et stations. La gestion de cet événement a démontré l'importance cruciale de la prévention, de systèmes de communication robustes (satellitaires, radio) et d'une organisation structurée des travaux publics pour les interventions d'urgence et la réouverture progressives des voies.

 

3/ RETEX Ain : Continuité du réseau routier face aux chutes de bloc

Dispositif TEKALP installé dans le Département de l'Ain

Le Conseil départemental de l’Ain avec la société TEKALP expose la gestion de crise de la RD1084, liaison routière Lyon-Genève essentielle et très exposée aux risques d'éboulements, dont la coupure isolerait plusieurs communes. Face à des éboulements survenus en 2023 et 2025, une organisation de crise réactive a été déployée, incluant une intervention d'experts en géotechnique en moins de 4 heures

La solution immédiate a consisté à installer en moins de 48 heures des blocs de protection modulaires et robustes "Bloc Armé®" (TEKALP), permettant de maintenir une circulation en mode alternée en moins de 72 heures et laisser du temps à une reconstruction. Le dispositif se veut modulable, réutilisable et déplaçable (stockage pré-positionné) pour de futurs évènements.

 

La présentation :

4/ Diagnostic des réseaux vulnérables : le projet de la métropole de Toulouse

La métropole de Toulouse, dont le territoire est exposé aux inondations par débordement et par ruissellement s’interroge dans le cadre de son PAPI sur les réseaux susceptibles d’être impactés (énergie, transports, eau, télécoms). Dans le cadre de l’action 5 du PAPI, la métropole lance une démarche visant à accompagner les multiples gestionnaires de ces réseaux (Enedis, SNCF, Tisséo, etc.) pour diagnostiquer la vulnérabilité de leurs équipements et les effets de leurs interdépendances en cas de crise

Sont réalisés :

  • Des cartographies ciblées de l’exposition des équipements et les zones de fragilité ;
  • Un rapport commun à tous les gestionnaires mentionnant la méthode d’accompagnement, les données mobilisables et les obligations réglementaires ;
  • Des bilans synthétiques par réseaux de connaissance, des actions engagés.

L'objectif final de ce programme, mené de façon itérative, est d'améliorer la résilience globale du territoire en réduisant les perturbations et en facilitant le retour à la normale des réseaux après une inondation.

La suite est déjà engagée dans le PAPI complet 2026 - 2030, par la consolidation des échanges via un réseau des opérateurs (échanges réguliers, partage de données et d’un outil de cartes interactives dédié), et par l’intégration du réseau d’eau dans le diagnostic de vulnérabilité et la mise en jour du PCA eau + déchets.

La présentation :

5/ Travaux du Cerema sur la vulnérabilité des réseaux

Depuis plusieurs années, le Cerema investit le sujet de la vulnérabilité des réseaux, par le biais de guides, d’études spécifiques ou de retour d’expérience. Un panel non exhaustif de ces travaux a été présenté :

  • L’étude de diagnostic des routes inondables en cas de crue de l’Arc, en partenariat avec l’EPAGE MENELIK, associant en équipe projet le SDIS13 et la DDTM13 pour conduire à des préconisations opérationnelles (pré-crise, crise, post-crise et planification) de la coordination routière en cas d’inondation
  • Les travaux spécifiques à la vulnérabilité des ouvrages aux aléas sismiques et hydrauliques, proposant des approches prédictives (étude SISMOA évaluation des risques sismiques, déclinaison de l’étude SISMET, approche multi-aléa et effet du changement climatique), des démarches préventives (Etudes de diagnostic et renforcement sismique des ponts), à la gestion post-crise (évaluation des ponts routiers en situation d’urgence post-évènement).
  • L’étude REOM « améliorer la résilience des services publics d’eau potable et d’assainissement dans les DROM et à ST Martin), en particulier les fiches de bonnes pratiques de 1 à 3 traitants de la Stratégie et Organisation (1) de la gestion de crise (2) et de la reconstruction (3). Ces fiches peuvent être notamment appliquée sur d’autres territoires hexagonaux.

Pour finir, les principaux guides sur les réseaux : multi-réseaux, routiers, eau et déchets sont présentés. 

Liste et lien vers les guides : 

  1. La résilience des réseaux face aux risques naturels – Guide d’application du décret n°22022-1077 du 28 juillet 2022 – DGPR
  2. Fiche technique : 10 étapes pour améliorer la résilience de vos infrastructures de transport – Méthode Systémique d’Adaptation des Infrastructures de Transport (Cerema)
  3. Evaluation des dommages causés aux routes par les inondations (Cerema)
  4. Prévention et gestion des déchets issus de catastrophes naturelles : Démarche opérationnelle et fiches d’application (Cerema)
  5. Guide réduire la vulnérabilité des réseaux urbains aux inondations (Ministère écologie et développement durable)
  6. Etudes Réseaux d’eau potables et d’assainissement (Cerema)
  7. Guide ORSEC Réseau d’eau potable (Ministère de la Santé)
  8. Guide ORSEC RETAP RESEAUX (DGSC)
  9. PNACC 3 Mesure 32 : assurer la résilience des services de communications électroniques.

 

La présentation :

6/ Identification des réseaux coupés lors de crises : le projet FloodDCARE

Cartographie FloodCARE Condition de traficabilité des réseaux routiers

FloodCARE (financé par France 2030) est un marché de démonstration de services satellitaires pour la surveillance et la gestion de crises d’inondation. Son objectif : fournir des produits opérationnels pour suivre l’inondation, estimer son intensité et ses impacts sur les infrastructures urbaines et la population.

4 services sont proposés : 

  • L’extraction rapide des contours inondés (S1) ;
  • La détection d'obstacles (S2) ;
  • L'amélioration des contours par modélisation (S3) ;
  • L'analyse de la traficabilité des réseaux (S4)

Ce dernier point permet notamment d’identifier l’accessibilité aux zones inondées, données essentielles pour l’accès des secours. Ces services sont mis à disposition des acteurs de la Sécurité Civile (Centre opérationnel de gestion interministérielle des crises -COGIC, Service départemental d'incendie et de secours -SDIS) via un portail web et des API[1] interopérables (compatibles QGIS[2] ou Crimson[3]) pour accélérer la prise de décision et l'organisation des secours


[1] Application Programming Interface, soit interface de programmation applicative

[4] Système d'information géographique libre

[5] Solution informatique permettant de faire de la conduite de gestion de crise, utilisé notamment par le COGIC, les SDIS…

 

La présentation :

7/ Télécommunications / Rétablissement d'urgence lors des incendies de l'Aude sur le réseau Orange

Orange dispose d’une infrastructure nationale majeure (15 M de poteaux, 734 000 km de conduites, 32 000 sites mobiles) et pilote des actions d’anticipation et de résilience : maintenance préventive par l’élagage, processus crise 24/7,déploiement de la SafetyCase comme unité mobile). Les incendies des Corbières (5 août 2025) ont détruit 17 000 ha, impacté les réseaux électriques et de télécoms sur 15 communes, et endommagé environ 800 poteaux chez Orange (jusqu’à 1 600 clients coupés).

Pour la gestion de l’évènement et le post-évènement, Orange s’est mobilisé dès les premières heures en participant au COD, en déployant un relais mobile dès le lendemain pour le PC de crise et les habitants sinistrés, en posant 8 km de fibre une semaine plus tard et en mettant à disposition un camion fibre les 3 semaines suivantes en solution d’attente sur 3 communes.

Cette expérience met en avant la nécessité d’identifier tous les acteurs opérateurs de réseaux (fixes et mobiles), l’importance d’associer les opérateurs de réseaux en centre opérationnel départemental (COD), la mise en place de dispositifs mobiles pour assurer en premier lieu les communications essentielles à la gestion de crise.

 

La présentation :

7 BIS/ Télécommunications - Radio du Futur

Le Réseau Radio du Futur (RRF) constitue le nouveau système national de communication sécurisé destiné aux acteurs de la sécurité, du secours, de la santé et de la gestion de crise. Il est piloté et déployé par l’ACMOSS (Agence des communications mobiles opérationnelles de sécurité et de secours), établissement public créé en 2023 pour assurer son développement et son exploitation. Ce réseau a vocation à remplacer les anciens systèmes radio bas-débit, aujourd’hui fragmentés et techniquement dépassés.

Le RRF repose sur des technologies haut débit, principalement en 4G et 5G, permettant de transmettre non seulement la voix, mais également des données, de la géolocalisation et de la vidéo. Il offre une interopérabilité complète entre les différents services, facilitant ainsi la coordination opérationnelle lors des interventions.

Le réseau garantit un niveau élevé de résilience et de priorité des communications, notamment en cas de saturation du réseau public ou de gestion d’évènements majeurs. Conçu pour rester opérationnel dans les situations de crise, il constitue un socle robuste pour la modernisation des communications critiques.

Évolutif, le RRF a également été pensé pour intégrer les innovations technologiques à venir, comme les objets connectés ou de nouveaux outils d’appui aux interventions. Son déploiement progressif sur le territoire vise à connecter à terme environ 300 000 utilisateurs parmi les services de sécurité, de secours et de santé.

 

8/ Rétablissement des réseaux par le plan ORSEC RETAP RESEAU

RETAP réseaux : les interdépendances

Le plan RETAP RESEAU, élaboré par le Ministère de l’intérieur, est décliné aux échelons zonal et départemental. Il permet d’organiser la coordination, sous l’autorité du préfet, de l’ensemble des acteurs concernés pour le rétablissement prioritaire des réseaux essentiels (électricité, eau, communications, gaz/hydrocarbures) après des événements extrêmes. Il vise à assurer la résilience en complétant la réponse des opérateurs sans s’y substituer, met en lumière les interdépendances critiques entre réseaux et la notion d’usagers prioritaires/sensibles.

L’échelon zonal via le Centre Opérationnel Zonal (COZ) sert de guichet unique pour agréger les informations, coordonner les opérateurs et les autorités, et mobiliser les moyens interdépartementaux. Le plan recense les réseaux, contacts, scénarios de référence et moyens de secours mobilisables depuis 2022.

 

La présentation :