15 décembre 2025
ACC
Depuis 8 ans, une belle dynamqiue réunit plusieurs opérateurs publics autour d’une journée dédiée aux enjeux de l’adaptation au changement climatique, à destination des collectivités.
Cette année, l’Ademe, la Région Sud, l’ARS, l’Anap, l’OFB et le Cerema ont rassemblé près d’une centaine de participants à Salon-de-Provence pour explorer les liens entre santé et climat, et comprendre comment les politiques locales peuvent mieux anticiper leurs impacts.
La journée s’est déroulée en deux temps : une matinée de partages d’expériences et d’éclairages d’experts, suivie d’ateliers participatifs organisés au cœur même de l’Hôpital du Pays Salonais !

Le changement climatique impacte déjà notre santé : vagues de chaleur plus fréquentes et intenses, recrudescence des allergies, propagation accélérée des épidémies… Ces phénomènes touchent en particulier les personnes les plus vulnérables, et font émerger de nouvelles formes de détresse psychologique, comme l’éco-anxiété.

Dans ce contexte, les collectivités et les établissements de santé ont chacun un rôle clé à jouer. Repenser l’urbanisme pour créer des îlots de fraîcheur et désimperméabiliser les sols, favoriser l’accès à la nature et aux espaces verts, encourager l’activité physique et le lien social ou renforcer la résilience des infrastructures sanitaires face aux crises climatiques, sont autant de leviers à mobiliser.

La journée a été introduite par Mathilde Pascal, épidémiologiste et chargée de projet scientifique Climat à Santé publique France. Elle a rappelé que, selon l'OMS, le changement climatique constitue "la plus grande menace pour la santé à laquelle l'humanité est confrontée". Comprendre ses effets, tout en préparant une action nécessairement systémique — intégrant les liens entre santé, biodiversité, alimentation ou encore ressource en eau — est désormais indispensable.

Les acteurs publics ont un rôle central à jouer dans le suivi et la mesure des impacts. Certains sont déjà bien documentés : plus de 41 000 décès attribuables à la chaleur entre 2014 et 2024, ou encore, le Lancet countdown estime qu’entre 2020 et 2024, 700 décès par an étaient dus à la pollution (PM₂.₅) générée par les feux de forêts.

Plusieurs outils de diagnostics ont été présentés. Parmi eux, un travail visant à proposer et décrire des indicateurs de cumul d’expositions à la température, la pollution de l’air ambiant et au déficit de végétation à fine échelle en France continentale sur la période 2000-2018, en intégrant les inégalités sociales (points noirs environnementaux).

 

Le Dr Richard Chemla, co-président du Comité d’Animation des Territoires (CAT), membre du conseil d’administration du réseau Villes-Santé et adjoint au maire de Nice, a ensuite illustré de manière concrète les liens entre santé et climat à travers plusieurs exemples marquants. Il a rappelé que le corps humain n’est pas physiologiquement adapté à des températures extrêmes, comme celles dépassant les 50 °C, désormais atteintes dans certaines régions du monde et a souligné la dépendance persistante à la voiture, qui favorise la pollution et freine les mobilités actives, ainsi que l’importance de repenser notre alimentation.

Le Dr Chemla a également insisté sur la perte progressive du contact des enfants avec la nature, pourtant essentielle à leur équilibre psychique et physique. Il a appelé à mieux reconnaître le rôle des arbres, non seulement pour le rafraîchissement urbain mais aussi pour la réduction du bruit, l’amélioration de la santé mentale et la préservation de la biodiversité, trop souvent reléguée au second plan dans les politiques publiques.

Enfin, il a souligné qu’il est désormais urgent de passer à l’action, rappelant que la transition écologique ne pourra se faire sans une véritable éducation des jeunes. Pour les équipes municipales, il est essentiel de s’entourer d’experts et de tisser des passerelles avec les hôpitaux, les centres vétérinaires, les professionnels de santé, les associations et l’ensemble des acteurs du territoire.

La matinée s’est poursuivie par une table ronde réunissant trois intervenants :

  • Joffrey Elbert, chef de projet à la Société publique locale d’aménagement d’intérêt national Aix Marseille Provence (SPLA-IN AMP)

  • Nicolas Pascal, DGS de la commune de Saint-Bonnet-en-Champsaur

  • Nathalie Bruant-Sérac, directrice d’études à l’Agence d'urbanisme de l'agglomération marseillaise (AGAM)

Joffrey Elbert a présenté les impacts de l’habitat dégradé sur la santé : humidité persistante, sources importantes de pollution intérieure, mauvaise isolation ou absence de protection face aux fortes chaleurs… Il a également évoqué les difficultés liées au partage de l’espace public, marqué par une forte présence de l’automobile, qui limite les mobilités actives et dégrade la qualité de vie. 

Il a rappelé le rôle et le cadre d’intervention de la SPLA-IN AMP, qui agit à Marseille dans des opérations de requalification de l’habitat ancien dégradé et d’amélioration des espaces publics de proximité, contribuant ainsi à créer des environnements urbains plus sains et plus résilients.

Projet de revitalisation urbaine de Saint-Bonnet-en-Champsaur

Nicolas Pascal a partagé le projet de revitalisation urbaine de Saint-Bonnet-en-Champsaur (2 100 habitants) et montré comment traiter le sujet de la santé par le prisme du “bien-vivre” permet d’agir simultanément sur de nombreux enjeux — commerce, environnement, mobilités, équipements — tout en renforçant l’attractivité du territoire.

La démarche engagée par la commune s’est révélée particulièrement ambitieuse : mobilisation de multiples acteurs en mode "projet", concertation de la population, et organisation d’ateliers santé réunissant élus et professionnels de santé. La collectivité a répondu à l’AMI lancé par l’ARS et la DREAL : "Prendre en compte la santé dans les politiques publiques" ce qui a permis de de financer une étude d’impact sur la santé (EIS).

Plusieurs secteurs seront réaménagés, dont la place du Champs de Foire, qui a déjà fait l’objet d’un dispositif d’urbanisme transitoire pour accompagner les habitants dans la transformation de leur cadre de vie.

Enfin, Nathalie Bruant-Sérac a mis en lumière l’action menée par les agences d’urbanisme autour de l’urbanisme favorable à la santé (UFS). Elle a notamment présenté les résultats d’une enquête régionale visant à évaluer les besoins des acteurs, ainsi que les guides, formations, outils de diagnostic cartographique et fiches actions développés pour accompagner les collectivités dans cette démarche.

Elle a également annoncé le lancement prochain du réseau régional UFS, dont la mise en place est prévue pour 2026.

Pour clôturer la matinée, Agnès Jacques-Jean, ingénieure travaux à l’Hôpital du Pays Salonais, a présenté le projet du futur hôpital, dont la réalisation est prévue d’ici une dizaine d’années. Conçu pour être évolutif et pleinement adapté aux enjeux environnementaux, ce nouvel établissement s’inscrira dans une démarche durable, attentive à la fois à la santé des usagers et à la résilience face au changement climatique.

L’après-midi a été l’occasion pour les participants de s’immerger dans un ou deux ateliers pratiques, où ils ont pu expérimenter des outils directement transposables à leurs projets futurs :

  • Kit de sensibilisation sur la marchabilité pour tous dans l'espace publique (Cerema) → lien vers la présentation 

  • Retour d’expérience d’UFS sur un territoire alpin et rural (CAUE 05)