Politiques départementales de sécurité routière : Vers une meilleure compréhension des disparités et des performances entre territoires
Les chiffres parlent d'eux-mêmes : en 2024, les routes départementales (hors territoires des métropoles urbaines, territoires ultramarins et routes territoriales de Corse) ont enregistré 1 893 décès, représentant 59 % des tués, alors que ces routes ne constituent qu'un tiers du linéaire de France métropolitaine
Une méthodologie robuste croisant données territoriales et organisationnelles
Cette recherche s’est appuyée sur des données concernant les dimensions socio-territoriales des départements. Elle a conduit également à collecter des données sur l’organisation de la politique locale de sécurité routière, les moyens mis en œuvre, les modalités opérationnelles et son organisation notamment en s’appuyant à la fois sur un questionnaire transmis aux CD et des enquêtes de terrain.
Grâce à une modélisation statistique avancée et des bases de données originales, il a été possible de caractériser à la fois les spécificités territoriales des contextes d’intervention et les politiques menées par la création de typologies. L'objectif a été de comprendre les effets relatifs aux contextes d’action socio-territoriaux, des politiques locales de sécurité routière menées et d’un déterminant structurel exogène, la politique nationale de contrôle (radars), afin d’évaluer leur contribution à l’évolution de l’accidentalité routière.

7 catégories de contextes territoriaux :
L'étude PDSR a identifié sept catégories de contextes territoriaux qui permettent de comparer des conseils départementaux aux défis similaires : ruraux à faible densité (peu peuplés), ruraux-montagneux à forte population âgée, ruraux-dynamiques (à PIB élevé), montagneux-touristiques, départements à métropoles, urbains à très forte densité de population et petite couronne parisienne. Cette typologie révèle la diversité des contextes d'intervention des gestionnaires départementaux.
4 stratégies distinctes aux résultats contrastés :
La recherche, s'appuyant sur une enquête nationale avec un taux de participation remarquable de 80 % des Conseils Départementaux, a mis en évidence quatre stratégies types de gestion de la sécurité routière :
- Stratégie "Essentielle" : Approche basique centrée sur le respect des obligations légales, sans développement de plans d'actions spécifiques à la sécurité routière.
- Stratégie "Réactive" : Interventions ponctuelles déclenchées après des accidents graves, avec traitement des points noirs mais absence de vision préventive à long terme.
- Stratégie "Proactive" : Anticipation des risques par l'analyse de données et actions ciblées (aménagement, contrôle) pour prévenir les accidents avant qu'ils ne surviennent.
- Stratégie "Globale" : Approche intégrée et systémique articulant en continu prévention des risques, réaction aux accidents, coordination de tous les acteurs et évaluation des actions menées. La sécurité routière devient une priorité transversale du projet de territoire.

Les résultats : Des gains significatifs avec les bonnes stratégies
Les résultats de la modélisation statistique révèlent que les stratégies proactive et globale s'avèrent les plus efficaces, permettant des gains estimés de 10 à 17 % de réduction des accidents mortels dans certains contextes, notamment les territoires ruraux à PIB élevé, par rapport au maintien d'une stratégie moins ambitieuse.
L'étude démontre également que l'efficacité des politiques dépend fortement de leur aadaptation au contexte local : une stratégie performante dans un territoire urbain dense peut s'avérer inefficace en milieu rural ou montagneux.
Un potentiel d'amélioration tangible
Seulement 24 % des Conseils départementaux appliquent aujourd’hui la stratégie identifiée comme optimale pour leur contexte. Ce décalage révèle des marges de progression réelles dans l'adaptation des politiques locales aux spécificités territoriales.
Leviers nationaux et investissements locaux : une complémentarité nécessaire
La recherche souligne que les leviers nationaux (contrôle automatisé) exercent un effet structurant mais homogène sur l'ensemble du territoire, tandis que les investissements locaux en infrastructures de sécurité jouent un rôle différencié plus marqué selon les contextes. Les écarts de performance reflètent également des facteurs organisationnels : gouvernance interne, moyens d'ingénierie, culture de l'évaluation et priorités budgétaires.
Quatre recommandations pour optimiser les politiques locales
