10 juin 2025
Boussole
Cerema
Avec l’urgence climatique et la diversification des pratiques et des offres de mobilités, les outils de modélisation doivent évoluer et notamment gagner en souplesse, réactivité et en qualité. L’enjeu ? Éviter le décrochage entre des modèles historiques bien maîtrisés, construits pour dimensionner des infrastructures mais assez rigides, et les besoins des territoires qui élaborent des politiques et projets de mobilités toujours plus riches et divers.

Les apports du projet Forbac

Le PEPR MOBIDEC (Programme et Équipements Prioritaires de Recherche "Digitalisation et Décarbonation des Mobilités", pepr-mobidec.fr), lancé en 2023 dans le cadre de France 2030, est piloté par l’IFP Energies Nouvelles (IFPEN) et l’Université Gustave Eiffel (UGE). Il vise à mobiliser la communauté scientifique nationale, en collaboration avec les acteurs locaux de la mobilité, pour progresser dans la connaissance des usages et préparer des outils plus efficaces au service des politiques publiques.

Au sein de ce PEPR, le projet FORBAC cherche à développer des outils d'aide à la décision et de modélisation permettant d'évaluer les impacts des politiques publiques et innovations technologiques en combinant des approches de prévision classiques (FORecasting) et de rétro‑projection (BACkcasting), d’où le nom du projet. Cette approche permet théoriquement de trouver les chemins optimaux pour construire des politiques de mobilité alignées avec les ambitions politiques et mieux répondre aux enjeux économiques, de santé publique ou climatiques. Ce projet réunit des chercheurs de différents organismes : IFPEN, UGE, ENTPE, École des Ponts, INRIA. 

Divers sujets sont traités afin de répondre au mieux aux différents besoins des acteurs, qu’ils concernent directement des questions de modélisation et prévision (trafic, évolution du parc automobile, vélo, véhicules électriques et questions d’énergie associées, comportements individuels), la définition de l’architecture du modèle, ou encore les chaînes causales permettant la mise en place du backcasting. Le Cerema contribue également au projet FORBAC, notamment pour éclairer les besoins opérationnels en matière de modélisation et faciliter les liens entre l’innovation et les terrains d’expérimentations.

 

Quels besoins pour les modèles actuels ?

Le Cerema a mené une vaste consultation auprès d’un panel varié d’acteurs – collectivités, bureaux d’études, chercheurs – à travers une série d’entretiens individuels et une enquête diffusée en ligne. Résultat : si les modèles statiques agrégés, largement utilisés depuis les années 1960, restent utiles pour dimensionner des infrastructures lourdes ou alimenter les bilans d’émissions, ils apparaissent de moins en moins adaptés à la diversité des enjeux contemporains. 

Ces modèles peinent notamment à intégrer les nouveaux comportements de mobilité, les pratiques intermodales ou les "nouveaux modes" (vélo, covoiturage, trottinettes), qui sont souvent mal pris en compte faute de données disponibles et/ou d’outils adaptés. Ils peinent aussi à appréhender des dimensions importantes, telles que les inégalités d’accès à la mobilité, la variabilité temporelle des usages, ou la prise en compte des impacts territoriaux qui peuvent être différenciés.

En outre, ces modèles sont le plus souvent centrés sur le cœur des métropoles, et leur périmètre ne permet pas d’évaluer avec pertinence des projets d’envergure plus importante (comme les SERM ou projets transfrontaliers), ni à des problématiques très localisées (à l’échelle d’un quartier voire d’un carrefour). 

Le support en téléchargement ci-dessous donne une première idée des résultats de cette consultation (un rapport de synthèse plus complet est en préparation).

 

La présentation 

Une cartographie interactive des modèles de déplacements 

Afin d’améliorer la lisibilité du paysage français de la modélisation, le Cerema élabore une cartographie interactive des modèles de déplacements utilisés ou développés sur les territoires. Cet outil vise à rendre visibles les modèles existants, leurs principales caractéristiques techniques, leurs zones d’applications et les acteurs associés à la démarche.

Ces modèles sont portés par des acteurs publics, le plus souvent via des partenariats (EPCI/département/région/État). Ils ont vocation à servir à alimenter sur une dizaine d’années (validité moyenne d’un modèle), les études liées à des projets et politiques de transport menés sur le périmètre de leur territoire.

À l’heure actuelle, 43 modèles sont recensés par le Cerema en France Métropolitaine. À noter que les modèles créés par les opérateurs de transports tels que la SNCF ou la RATP qui sont souvent centrés sur un seul mode, ainsi que les modèles transfrontaliers, ne sont pas intégrés pour le moment.

Carte

 

La carte interactive aura pour vocation d’animer une communauté de modélisateurs, permettant aux différents acteurs de mieux connaitre les modèles existants pour améliorer les échanges, voire d’identifier des opportunités de mutualisation ou d’interopérabilité.

 

Quelles pistes pour l’avenir ?

L’ensemble des acteurs de la modélisation des déplacements plaide pour :

  • Une collecte de données plus systématique, coordonnée et mieux partagée pour améliorer les prévisions en amont et pour mieux évaluer l’impact des mesures mises en œuvre a posteriori. La fiabilité des modèles dépend directement de la qualité des données disponibles et de leur actualisation régulière.
  • Des modèles (ou sous-modèles) mieux adaptés aux problématiques rencontrées, comme c’est le cas par exemple pour répondre aux enjeux autour des modes avec de fortes interactions entre offre et demande, comme les modes partagés, où le modèle multi-agents s’avère souvent plus pertinent que le modèle statique.
  • Impliquer davantage les décideurs dans la construction des scénarios pour une meilleure compréhension et appropriation des résultats de modèles. Cela suppose de renforcer la "culture modélisation", afin que les élus et directions opérationnelles en perçoivent mieux l’intérêt stratégique, et soutiennent les investissements nécessaires à leur amélioration.
  • Les modèles de type "backcasting" semblent prometteurs pour les techniciens issus de collectivités territoriales, car ils permettent de partir d’objectifs politiques (par exemple : neutralité carbone, baisse de la congestion, amélioration de la qualité de l’air) pour explorer les combinaisons d’actions possibles permettant de les atteindre.

Contact

Pour nous aider à compléter le recensement des modèles ou nous contacter : 

En savoir plus :

L’ensemble des résultats du projet Forbac qui va durer jusqu’à 2027 seront disponibles sur le site du projet :