Cet article fait partie du dossier : Un groupe collaboratif pour réfléchir aux quartiers de demain
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Cet atelier débat était le 4e organisé dans le cadre de la communauté d'échanges "Quartiers de demain"
Les ateliers débats sont des rendez-vous réguliers qui permettent de réfléchir collectivement à une problématique d’actualité concernant l’aménagement opérationnel, et d’échanger sur les
innovations et solutions possibles pour y répondre.
Ce webinaire qui a réuni 70 participants était proposé sur la plateforme collaborative Expertises.territoires, dans la continuité des rendez- vous de la communauté Quartiers de Demain qui visent à réfléchir aux enjeux d’aménagement pour des villes et des territoires plus résilients et plus agréables à vivre. La communauté Environnement-Santé était également conviée pour participer et enrichir les échanges.
La communauté Quartiers de Demain
Un espace collaboratif pour faire émerger de nouvelles pratiques d'aménagement...
Intégrer la santé de tous dans les pratiques d'aménagement : un atelier pour réfléchir à l'action des territoires
Traiter de la thématique de la santé dans les projets d’aménagement n’est pas un sujet nouveau. Différents outils et méthodes existent et certains acteurs de l’aménagement et de la santé sont engagés de longue date pour faire évoluer les projets en intégrant la diversité des enjeux liés à la santé.
Si les enjeux sont connus, la diversité des thématiques à traiter est complexe et les solutions apportées ne sont pas toujours à la hauteur des enjeux.
Plutôt que d’aborder de manière exhaustive le sujet, cet atelier débat était l’occasion de donner la parole aux acteurs de l’aménagement et de la santé, de montrer des retours d’expériences dans les territoires et de traiter prioritairement de deux angles : la transition écologique et les inégalités sociales de santé.
Il s’agissait ici de focaliser les débats à l’échelle du quartier et des opérations d’aménagement, mais pas nécessairement avec des réponses définitives ou des solutions toutes faites. En effet les ateliers débats de la communauté Quartiers de Demain sont l’occasion de se questionner.
L’atelier s’est déroulé avec une alternance de présentations d’experts et de professionnels (qui ont pu poser le cadre et des éléments de référence) avec des temps d’échanges avec les participants (à l’aide d’un support sur l’outil Klaxoon. L’animation d’intelligence collective a permis de rythmer les temps et de favoriser le débat
Les temps forts de l'atelier débat
Introduction
Après un temps de brise-glace où il a été demandé aux participants de choisir, parmi une série de photos, leur lieu de vie idéal, Anne Vial nous a présenté la communauté "Quartiers de demain" et les objectifs de la matinée ont été clarifiés. Le fil conducteur de cet atelier débat était, à travers la présentation de retours d’expérience et les problématiques identifiées, d’encourager les échanges et discussions entre les acteurs présents aux profils variés.
Analyse santé-environnement à Lodève
Louise Barrière, chargée de mission santé au pays Coeur d'Hérault dont fait partie la ville de Lodève et Theo Sigiscar, responsable d'études - Appui à la transition des territoires, volet santé-environnement au Cerema, ont présenté l’analyse en santé-aménagement menée sur la ville de Lodève, prenant en compte les inégalités sociales de santé et le changement climatique. Elle avait pour objectif d'identifier et de localiser les groupes de populations exposés aux inégalités sociales et de santé, et de mieux comprendre la manière dont l’aménagement du territoire influe sur les modes de vie.
Territoire de plus de 85 000 habitants, il a servi de territoire d’expérimentation d’Urbanisme Favorable à la Santé (UFS). La méthodologie d’intervention comportait trois volets : une enquête sociologique, une analyse par les déterminants de la santé et un lien avec le changement climatique. S’appuyant sur des analyses de données quantitatives, une balade sensible avec les habitants et un atelier jeu "cité-santé" du Cerema, les enjeux ont pu être débattus afin de faire ressortir des pistes d’actions lors d’un dernier atelier. Cette expérimentation aura permis de sensibiliser les agents à l’UFS ainsi que leur montée en compétences.
Les différents services du territoire auront également réussi à travailler ensemble et acquérir une base de connaissances pour les prochains projets de la ville. Le Cerema, qui a accompagné ce travail, a mis à disposition des outils afin d’en faire bénéficier d’autres territoires.
Projet du quartier de la Saulaie à Oullins
Camille Fiorucci (groupe SERL) et Alice Donguy (AIAI) nous ont ensuite présenté le projet de la Saulaie à Oullins. Vaste projet d’aménagement d’une ZAC de 20 ha à proximité de Lyon, l’intégration de la santé s’est d’abord faite sous le prisme de la santé environnementale. Après avoir analysé les constats sur les nuisances physiques du site ainsi que les constats sociaux, une AMO santé a été intégrée au groupe de conception. La démarche santé a consisté en un diagnostic détaillé à travers l’analyse de nombreux déterminants parmi lesquels l’offre de soins, les pratiques sportives et récréatives, les espaces verts et les logements.
L’approche à la fois sensible, avec la mise en place d’ateliers avec les habitants et les acteurs du territoire, et quantitative, avec la prise en compte de données statistiques, ont permis de faire émerger les enjeux et de les fédérer. Malgré quelques difficultés à cibler les déterminants de santé spécifiques au territoire, à optimiser les mesures ayant un impact sur la santé d’une diversité de population (actuelle et future, plus ou moins jeune, etc.), à croiser les données statistiques et de terrain ou à mobiliser et mettre en relation les différents professionnels, des axes de réflexion sont en cours, comme la mise en place d’indicateurs de suivi, la question de la place de l’enfant dans le quartier, du design actif ainsi que le défi de la temporalité sur le long terme du projet.
Les ateliers
3 ateliers ont été organisés en sous-groupes :
Comment rendre les citoyens acteurs de leur santé et dans quelle mesure l'aménagement peut y contribuer ?
Maxence Moreteau de l’agence Adeus a présenté l’expérience de la ville de Miramas et la mise en place d’une démarche de co-construction dans les phases de diagnostic, de programmation et de projet, dans le cadre d’un projet de renouvellement urbain.
Sur la base de cette expérience, les participants ont débattu sur les défis, les freins et les leviers à la participation citoyenne en santé environnement, dans un projet :
- les défis concernent principalement l’installation d’un cadre propice à des échanges constructifs (sensibilisation aux enjeux collectifs en santé environnement, temps accordé aux échanges dans la construction du projet, inclusivité de la concertation) en donnant du sens à la concertation ;
- les freins et les difficultés constatés mettent en évidence l’enjeu que constitue la mixité de publics, ainsi que, parfois, la faiblesse du soutien politique à la concertation, mais aussi les limites de l’aménagement face aux nombreuses attentes citoyennes en santé ;
- Les participants ont noté de nombreux leviers face à ces enjeux et les bénéfices nombreux de la concertation pour l’élaboration d’un projet : la richesse des échanges entre acteurs de divers horizons (acteurs institutionnels, associatifs, maisons de quartier, issus du secteur des sports, de la culture, de la santé…) contribue à la création d’une culture commune au service d’un cadre de vie préservé. Pour les élus et les responsables techniques, la concertation sur un projet concret enrichit leur réflexion pour les projets de planification et de stratégie territoriale par une meilleure connaissance des citoyens et de leurs attentes.
Comment mieux intégrer la santé dans les choix d’aménagement par une approche décloisonnée et un dialogue entre acteurs ?
Carole Poisson, responsable de la mission santé urbaine et Grand Paris de l’ARS Ile de France, a présenté lors de ce second atelier, outre les missions de l'ARS, les outils de contractualisation territoriale en santé publique. Quelques initiatives en illustration de l'objectif de coopération entre acteurs ont permis de lancer les débats.
Les échanges entre les participants ont identifié quelques grands enjeux pour décloisonner les approches et placer la santé au cœur des politiques publiques :
- un fort besoin d’acculturation : faire monter l'ensemble des acteurs en compétences sur ces sujets afin de parler le même langage et de partager les mêmes bases d'un diagnostic ;
- la nécessité de développer une approche systémique qui vise à s'assurer de la présence des acteurs sur l'ensemble des phases du projet ;
- de ce fait, s'assurer d'une réflexion à toutes les échelles temporelles et géographiques.
Même si le défi est complexe, les leviers existent, tant sur les méthodologies développées (analyse fine des comportements et besoins des habitants pour activer des solutions favorables à la santé, mise en place des indicateurs spatialisés et avoir une approche intégrée de l'accessibilité) que sur le déploiement d'une gouvernance efficiente (mise en place une gouvernance transversale avec l'appui d'un animateur/facilitateur pour instaurer les échanges entre acteurs).
Comment s’assurer que les enjeux de transition écologiques répondent aux enjeux de santé tout en réduisant les inégalités sociales ?
Alice Collet et Véronique Tirant de l’ANRU ont partagé lors d'un troisième atelier leur expérience en matière de santé et transition écologique dans les projets de renouvellement urbain.
Depuis quelques années, l’ANRU s’est saisi de ce sujet : en effet les opérations de renouvellement urbain dans les quartiers politique de la ville (QPV) donnent une capacité à agir sur les habitats et les espaces publics. L’enjeu est fort car les habitants des QPV sont plus vulnérables d’un point de vue sanitaire, en raison de la précarité sociale et économique, et ont un accès plus limité à l’offre de soins ; certaines pathologies chroniques (diabète, asthme, dépression, etc.) sont plus courantes dans les QPV.
Il est observé également que ces quartiers ont une exposition plus forte aux nuisances environnementales du fait de leur localisation fréquente à proximité de grandes infrastructures routières ou de zones industrielles. Un certain nombre de leviers d’action ont été présentés par les intervenantes : il s’agit de combiner la transition écologique et une approche égalitaire de l’urbanisme pour réduire les inégalités sociales de santé. Pour ce faire, les vulnérabilités de santé doivent être intégrées à toutes les étapes d’un projet de renouvellement urbain : depuis les diagnostics, les phases de programmation, conception et de chantier, et enfin l’évaluation du projet.
En outre, le programme "quartier résilient" a été présenté, comme un accompagnement permettant de faire le lien entre enjeux climatiques, sociaux et de santé.
Les participants ont échangé autour des aspects sociaux et conviviaux qui permettent de fédérer et d’impliquer les habitants autour d’un projet, tout au long de la démarche : divers moyens peuvent être mobilisés, tels que l’aménagement d’espaces publics avec mobilier, l’organisation de temps festifs et de partage, etc.
Parmi les défis à relever, a été soulignée la complexité du jeu d’échelle, du jeu d’acteurs, et de la coordination des politiques encore souvent menées en silo : il semble essentiel de mener les projets avec une vision systémique. Les recommandations en lien avec la santé peuvent porter sur les usages et l’accompagnement (au-delà des projets d’aménagement urbain) : par exemple avec l’organisation d’activités physiques, en amont d’un projet. L’importance du suivi et de l’évaluation des projets a également été soulignée, afin d’identifier les points de blocage avec les bailleurs.
Synthèse des ateliers et des interventions
Un constat fait consensus lors des échanges : la nécessité d’acculturation, de partage des connaissances et de la sensibilisation de TOUS les acteurs (habitants de tout âge et milieux, professionnels et institutionnels) à la diversité des enjeux en santé aménagement. Pour cela, il est important d’avoir une vision collective des projets et que chaque partenaire participe de manière active en parfaite transparence et transversalité.
Il ressort également l’importance de la prise en compte des déterminants de la santé en amont et durant toute l’élaboration du projet.
Malgré certains freins (coûts, mesure des bénéfices sanitaires, implication des parties prenantes, …), les nombreux leviers et outils proposés laissent à penser que la prise en compte de la santé dans les projets d’aménagement a finalement commencé à diffuser dans les esprits pour devenir un des fils conducteurs des politiques d’aménagement.
Conclusion, BILAN, PERSPECTIVES
Nous tenons à remercier les intervenants qui ont apporté des éclairages sur ce sujet rassemblant de nombreuses composantes ainsi que l’ensemble des participants pour leurs suggestions et leurs retours d’expériences.
Cet atelier débat représente donc une opportunité de mettre en lumière ces aspects, de montrer à quel point ce sujet, qui n’est pas nouveau, a besoin d’être approfondi, enrichi et mis en pratique. La poursuite des échanges et des travaux collectifs est nécessaire pour acculturer la diversité des acteurs qui sont à mobiliser et pour que les projets d’aménagements puissent prendre en compte, à tous les stades, cette thématique de la santé et que des solutions concrètes soient mise en œuvre pour améliorer la qualité de vie des habitants.
En savoir plus :
Animateurs : Anne Vial Directrice de projet Quartiers durables/Cœurs de Ville TV, Stéphanie Favre Directrice de projet Environnement Santé Evaluation Dter CE, Priscille Genesco cheffe de groupe Aménagement urbain Dter IdF, Raphaèle Ratto Directrice de projet en aménagement et Petites villes TV, Lucie Anzivino Directrice de projet Santé Environnement Dter CE, Mélanie Belot Responsable d'études en stratégies urbaines DTer IdF, Juliette Maître Directrice de projets Aménagement et Transitions Dter Ouest
Intervenants :
Théo Sigiscar (Cerema Dter Occitanie)+ Louise Barrière (Pays Coeur d'Herault Lodève, Chargée de mission santé,)
Camille FIORUCCI (Directrice de projet SERL) + Alice Donguy (responsable AIA Environnement Lyon)
Maxence Moreteau (sociologue-urbaniste Adeus)
Carole Poisson (ARS : responsable de la mission santé urbaine et Grand Paris ARS Ile de France)
Alice Collet (responsable pôle Cohésion sociale ANRU) + Véronique Tirant (Directrice des études et de l’innovation ANRU)
Dans le dossier Un groupe collaboratif pour réfléchir aux quartiers de demain