28 août 2025
Avignon ombrière sur une place piétonne
C.R - Cerema
Lancé en mai 2024 pour une durée de quatre ans, le projet national ISSU "Innovations et Solutions face à la Surchauffe urbaine", réunit un large écosystème d’acteurs : académiques, entreprises, établissements publics d’expertise et maître d’ouvrage. Objectif : construire ensemble un référentiel national d’évaluation des solutions grises ou vertes de rafraichissement.
Autour de cette ambition commune, une communauté d’expertise transversale s’est constituée, à la croisée du génie civil et du génie écologique.

 

Trois axes structurent les travaux : 

  • Comprendre les facteurs de rafraichissement à partir de caractérisation précise des propriétés des solutions vertes, bleues ou grises (albédo, évapotranspiration, perméabilité, drainabilité...) – WP1
  • Analyser les services rendus par les solutions de rafraîchissement, avec une approche microclimatique (mesures expérimentales, modélisation) et une approche multicritères pour conjuguer objectifs de rafraîchissement avec les autres enjeux de l’aménagement durable (gestion de l’eau, biodiversité, santé des sols, sobriété...) – WP2
  • Établir des méthodes d’évaluation des solutions combinées à l’échelle d’un aménagement, et proposer des sites démonstrateurs pour expérimenter les outils et valider les modèles analysés dans les deux premiers axes – WP3

 

>> Le site web du projet ISSU!  

 

Différentes perspectives sont aujourd’hui identifiées pour les prochaines années de travail :
 
  • La poursuite des revues thématiques aujourd’hui non explorées tels que la qualité des différents compartiments environnementaux (eaux, sols, air), les usages etc. ;
  • La poursuite des benchmarks avec une alimentation par les travaux du WP1
  • La définition et la structuration du cadre d’analyse multicritère ;
  • La mise en application dans le cadre de cas d’études issus du WP3.

La grille V0 est structurée en 10 catégories, avec 80 indicateurs classés par ordre de priorité :

  • Environnement thermique (ex : albédo moyen du site, nombre de nuits tropicales)
  • Confort thermique (ex : % de surface ombragée)
  • Bien-être et usages (ex : diversité des fréquentations sur site)
  • Biodiversité, sols et nature en ville (ex : indice de canopée)
  • Qualité de l’air (ex : concentration moyenne en polluant)
  • Gestion de l’eau (ex : % de surface perméable)
  • Bruit (ex : niveau moyen de nuisance sonore)
  • Coûts environnementaux et sobriété (ex : besoin en irrigation)
  • Coût économique et gestion (ex : coûts d’entretien / m2)
  • Impact social (Nombre de m2 d’espaces verts / habitants dans le quartier)

 

WP0 : assurer les échanges au fil de l’eau au sein du projet national, et avec d’autres

Un quatrième axe de travail transversal (Work Package 0) a été défini afin de structurer le transfert et la valorisation des résultats issus des trois axes de recherche, à destination d’un large public. Courant 2025, un recensement des livrables en cours de production dans le cadre des trois axes a été initié. Cette démarche vise à évaluer les besoins en matière de valorisation et à organiser les actions futures en ce sens.

Le comité de pilotage a lancé un recensement des initiatives et projets collaboratifs en lien avec le PN ISSU. Ce travail a permis d’organiser un premier webinaire d’échange, qui s’est tenu le 27 mars 2025. Un deuxième webinaire aura lieu le 15 octobre autour de nouveaux projets pour rafraîchir la ville (programme et inscriptions en ligne).

(Re)découvrez les différentes initiatives de recherche portant sur la surchauffe urbaine présentées le 27 mars 2025 — PN ISSU : 

Toulouse – Grande Rue Saint Michel : Transformation d’une voirie en centre urbain

Projet de la future Grand Rue à Toulouse - Crédit : Toulouse Métropole

Dans le cadre de la démarche "Toulouse plus fraîche", Toulouse Métropole s'appuie sur ses Directions Politique des Espaces Publics, Patrimoine Végétal et Cycle de l'Eau, porteuses des solutions grises, vertes et bleues, pour lancer en site pilote la rénovation d’une artère particulièrement structurante de son centre urbain, la Grande rue Saint-Michel. Sur 850 mètres, les évolutions attendues sont importantes : 

  • 41 arbres plantés et 750 m² végétalisés (contre 16 arbres existants et 65m² d’espaces verts) pour favoriser l’ombrage et l’évapotranspiration, en assurant la disponibilité en eau pour le végétal avec le test de fosses de Stockholm ;
  • Mise en place de matériaux avec un albédo plus intéressant, compatibles avec les circulations et les exigences patrimoniales du site (enrobé clair grenaillé, enrobé rouge, pavés du Tarn avec joints perméables, micro béton désactivé) ;
  • Apaisement des circulations, avec un plus grand partage de la voirie entre véhicules motorisés et modes actifs.

Le suivi est assuré par le laboratoire LMDC (Université de Toulouse / Insa de Toulouse), avec une méthodologie assez exhaustive au regard des axes de recherche du projet ISSU : caractérisation des matériaux utilisés en laboratoire et sur site, évaluation de la croissance du végétal et de son stress hydrique, campagnes de mesures sur la température de l’air et le confort thermique, enquête usagers pour évaluer la pertinence du nouvel aménagement et son appropriation par les riverains. 

L’ensemble des données collectées permettra la construction d’un jumeau numérique (Comsols multiphysics), pour pouvoir répliquer les enseignements de ce site pilote sur de futurs projets de la Métropole et accompagner l’évolution des choix de solutions et cahiers des charges.

Cachan – Campus de l’ESTP : un laboratoire à ciel ouvert

Jardin de pluie et dalles enherbées, zone test n°1 du démonstrateur sur le campus de l'ESTP de Cachan. Crédit : Cerema

Dans le cadre de la rénovation du campus de l’Ecole Spéciale des Travaux publics (ESTP), ce démonstrateur est proposé à l’ensemble des partenaires ISSU comme un véritable laboratoire à ciel ouvert, où tester des solutions et des protocoles scientifiques. Une première phase a permis l’aménagement du parvis de la cafétéria du CROUS, avec l’accompagnement de Source Urbaine. Ce projet a consisté à mettre en œuvre différents éléments de gestion des eaux de pluie et de végétalisation (pavage perméable, Jardin de Pluie Urbain de 10 m2, fosses d’arbres, massifs arbustifs) afin d’améliorer le confort thermique du parvis. 

Un ensemble de capteurs a vocation à monitorer la croissance et le stress hydrique des arbres et la quantité d’eau stockée dans le Jardin de Pluie Urbain. Des campagnes de mesure mobile de confort thermique permettront d’évaluer plusieurs sites du campus. Dans ce cadre, une interaction avec le WP2 est prévue avec de mesures croisées à l’aide de différents équipements dans le cadre d’une fiche d’action portée par l’ESTP et Colas.

Début 2026, de nouvelles solutions seront installées pour être également évaluées : pergolas avec plantes grimpantes à pousse rapide pour tester leur apport rafraîchissant, un revêtement à albédo adapté, formulé et appliqué par Aximum, filiale de Colas. Le résultat des mesures permettra également de valider des développements en cours d’un modèle du site par simulation sur ENVIMET.

 

Marseille – place de la Providence : d’un parking à un espace de fraîcheur

Mobilier urbain transitoire place de la Providence - Crédit : Marseille Métropole

Ancien parking totalement imperméabilisé et donc source de surchauffe urbaine, la place de la Providence va devenir un véritable puits de fraîcheur pour le quartier, permettant la création d’un nouvel espace public pour répondre aux besoins de circulation, de rencontre et d’espace vert des habitants. Après 6 mois de fouilles archéologiques réalisées en 2024, la place fait actuellement l’objet d’une démarche d’urbanisme transitoire avant l’enclenchement des travaux au début de l’année 2026 et une livraison programmée début 2027. 

La Ville de Marseille souhaite accompagner la SOLEAM dans cet aménagement, avec une analyse de l’état initial pour mieux aiguiller les derniers choix de conception du site (types de matériaux, disposition du végétal...). Urban Cooling Solutions, partenaire du projet ISSU, met ainsi à disposition son expertise et son protocole de suivi, avec des mesures météorologiques fixes et mobiles, le calcul d’un indicateur de confort (UTCI) et le calcul d’un indicateur de potentiel de rafraîchissement (IPR) pour identifier les zones prioritaires à rafraîchir sur la place. 

Après les travaux, une évaluation selon la même même méthodologie sera menée sur deux étés, pour aider à la conception de prochains projets similaires.

 

Ressources :

Nice et Bergerac : Comparaison de deux places désimperméabilisées

Projet de la place Gambetta - Crédit : ville de Bergerac

L’entreprise VINCI a souhaité mettre à disposition du projet ISSU deux sites récemment aménagés pour évaluer l’effet de la gestion intégrée des eaux pluviales et des revêtements sur la végétation et le rafraîchissement urbain. Leur évaluation va permettre notamment d’interroger le rôle de matériaux perméables qui permettent une meilleure infiltration des eaux pluviales, solutions moins présents sur les autres démonstrateurs : béton drainant, enrobé perméable, dalles enherbées. 

Plus largement, avec 3000 m² désimperméabilisés sur la place Gambetta, et la mise en place de noues végétalisées ou de tranchées drainantes (150 m² sur la place Goiran), ces sites présentent un formidable terrain d’analyse de la circulation de l’eau et de son rôle pour permettre un meilleur rafraîchissement par le végétal. Outre le retour d’expérience sur la mise en œuvre et le suivi de ces solutions, le suivi scientifique permettra :

  • la caractérisation des matériaux utilisés notamment sur le volet thermo-hydrique (infiltration et évaporation de l’eau), avec l'expertise de VINCI et du centre R&D de l'entreprise Holcim Lafarge
  • l’évaluation du confort thermique pour les habitants par la mesure et par une enquête du ressenti usagers, avec un accompagnement de CityClimateX
  • le suivi de la croissance du végétal et de la disponibilité en eau dans les sols.

Le Club des démonstrateurs – apprendre ensemble à mieux rafraîchir la ville

Rue Garibaldi à Lyon, noue végétalisée - Cerema

Dès le lancement du projet ISSU, une volonté forte a émergé : faire communauté autour de l’évaluation des solutions de rafraîchissement urbain. C’est ainsi qu’est né, le 6 juin 2024 à Cachan, le Club des démonstrateurs. Réunis pour visiter un des premiers sites démonstrateurs du Projet, le campus de l’École Spéciale des Travaux Publics (ESTP) , une cinquantaine de participants – chercheurs, collectivités, professionnels ont pu confronter leurs points de vue : quelles données suivre ? Quelles solutions évaluer ? Comment capitaliser sur les retours d’usage et de maintenance ? Ce temps d’échange a nourri les trois axes de recherche du projet ISSU.

Un an plus tard, ce fut le tour de la Métropole de Lyon d’accueillir le Club des Démonstrateurs, pour une matinée de présentation des travaux menés en 2024-2025, puis la visite de deux aménagements en faveur du rafraîchissement : la rue Garibaldi et l’îlot Danton.

Le secteur Garibaldi, qui est un axe majeur de circulation Nord-Sud de la ville de Lyon, a été réaménagé dès 2010. L’objectif était de travailler sur l’apaisement de cette autoroute urbaine en redistribuant les espaces de circulation entre les différents modes (piétons, vélos, bus et voitures). Une requalification des trémies en bassins de stockage et une végétalisation massive (création de noues et plantation de différentes strates végétales - cf. Figure 1) ont été entrepris, dans une optique de valorisation des eaux de pluie et d’amélioration du confort thermique. 

Arbre instrumenté - rue Garibaldi (Lyon)

Un suivi basé sur la mise en place d’une instrumentation complète (hygromètre, température “globe noir”, anémomètre, dendromètres, sondes tensiométriques, etc.) a été mis en œuvre dans le cadre du projet européen Biotope (2016-2018). Une évaluation du gain en termes de rafraîchissement et l’effet d’arrosages anticipatifs sur le confort thermique, le stress hydrique et la croissance des arbres a été menée. 

Les participants ont pu constater la maturité du couvert végétal et son efficacité à améliorer le confort thermique via les effets d’ombrage et d’évapotranspiration. C’est particulièrement le cas dans le tronçon situé entre les rues de Bonnel et du Docteur Bouchut qui comportait déjà des platanes de grande taille au démarrage du projet et qui ont été conservés. Le tronçon plus au sud, situé entre les rues du Docteur Bouchut et Paul Bert, planté de jeunes chênes, devrait offrir des conditions d’ombrage approchantes dans les années à venir.

 

Vues de la rue Garibaldi: secteur Bonnel (à gauche), secteur Dr Bouchut - Paul Bert (à droite).
Bandes plantées de la rue Danton (à gauche)

La visite s’est poursuivie par un passage place des Martyrs, qui a également été déminéralisée et végétalisée, avant d’arriver secteur Danton, requalifié en 2022. Le projet prévoyait la création de chicanes végétalisées et de bandes plantées, alimentées par les eaux de ruissellement collectées dans des tranchées en gabion, ainsi que la suppression de la fonction de giratoire de la place Danton, transformé en “super îlot”.

Par rapport au projet d’ampleur sur Garibaldi, ces travaux ont été réalisés dans un cadre temporel et budgétaire restreint, selon une logique d’adaptation de l’existant. Ce principe a orienté les décideurs vers une solution d'aménagement simple, de bon sens et économique, mais qui pose quelques questions de durabilité et de gestion. La Métropole compte capitaliser sur ce retour d’expérience pour déployer d’autres solutions plus robustes mais basées sur les mêmes principes.

Une dynamique à poursuivre : 

Le Club des démonstrateurs montre tout l’intérêt de croiser les savoirs scientifiques et les retours de terrain, pour faire émerger des solutions réalistes, efficaces, et appropriées aux contextes locaux. Rendez vous en 2026 sur de nouveaux sites, avec l’objectif de renforcer l’essaimage du projet ISSU et d’en faire un véritable levier d’accélération de l’adaptation des villes.

Le Projet National ISSU en quelques chiffres clés

  • Durée : 4 ans (2024 - 2028)
  • Budget Global : 1,2 M d’euros
  • 46 adhérents dont 12 organismes de recherche et 7 fédérations professionnelles.
  • Projets au service des verrous du PN ISSU: 2 Projets ANR en cours (Sweat City, Penate), 1 projet ADEME PACT2E (Cool street), 1 projet PEPR VDBI (VF++).[HA(2]
  • Lauréat de la Fondation d’entreprise FEREC
  • Les Projets nationaux sont administrés par l’IREX. Pour en savoir plus sur le dispositif : https://irex.asso.fr/projets/#dispositif-projet-national
  • 2 Assemblées Générales (2024, 2025)
  • 4 sessions du Comités de Pilotage
  • 1 webinaire d’échange entre projets de recherche sur la surchauffe (le replay)
  • 23 fiches action validées

 

Cet article a été rédigé par les membres du COPIL du projet ISSU, et notamment :

  • Les pilotes du WP1, Sophie DECREUSE (Colas) et Isabelle DUBOIS-BRUGGER (Holcim Lafarge)
  • Les pilotes du WP2, Jordan PEYRET (Naturalia Environnement) et Maëva SABRE (CSTB)
  • Les pilotes du WP3 et du club des démonstrateurs, Thibault LEROUX (UPGE), Julien Van ROMPU (Eiffage) et Loéna Trouvé (Cerema)
  • Les pilotes du WP0 : Abboud HAJJAR (Colas), Véronique TOSSER (VegePolys Valley)
  • D’autres membres du PN, de l’IREX ou du bureau : Camilo DURAN (IREX), Angélique HARDOUIN (IREX), Marc MEYER (Cerema), Perrine PRIGENT (Ville de Marseille)
  • Les différents porteurs des démonstrateurs du PN ISSU.
Contributions Cerema :